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Billet de blog 24 septembre 2017

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« Têtes à claques », catégorie « politique »

L'entarteur d'hier a cédé sa place à des gens peut-être moins drôles, sans doute plus agressifs, spécialistes de la gifle voire du coup de poing exclusivement réservés aux hommes et aux femmes politiques : régression ? dérive ?

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Question : quel est le point commun entre Nathalie Kosciusko-Morizet, Mariano Rajoy, Boris Faure, Georges Bush fils, Manuel Valls, Nicolas Sarkozy et Jean-Vincent Placé ?

Réponse : elle, ils prennent des claques, des coups de casque et de poing ou se font attraper par le revers du veston, certain peuvent même recevoir une chaussure en pleine poire…

Le spectacle de ces « dérapages démocratiques » (Yves Calvi, multirécidiviste) me fait sourire.

Quand ils ne se font pas tirer dessus comme ce fut le cas pour Chirac, son assaillant s’excusant en avouant très simplement avoir « pété les plombs ».

Beaucoup moins drôle, restons sur la gifle, sur Valls et NKM, loin de Kennedy, loin d'Henri IV, très loin de Ravaillac et d'Oswald.

« Péter les plombs » est une expression que les psychanalystes ont requalifié en « passage à l’acte ».

Car, en effet, sans un long et profond processus de désinhibition pas de passage à l’acte, l’agresseur potentiel est frustré, la mine triste, les épaules rentrées, le dos vouté, la démarche incertaine, il rumine en voyant chaque matin dans le miroir Ikea de sa salle-de-bain le visage de ce lâche qui n’a pas le courage de ses opinions.

Petit à petit il se rabougrit.

Selon une expression populaire connue et néanmoins bien maîtrisée il « ronge son frein ».

Elections après élections sa colère remplace l’espoir.

Je lui ressemble.

Par exemple je rêve de gifler ce bouffon de Trump, je rêve aussi de tirer Marine Le P par les cheveux…ou par les oreilles.

L’agresseur est en manque de victime, il a besoin de se défouler mais n’y arrive pas, pas toujours heureusement, c’est la grande majorité, les autres franchissent le Rubicon (?)

Comment expliquer ce phénomène relativement récent ? Pourquoi une partie de la population mondiale a soudainement envie de gifler les hommes et les femmes politiques ?

Le désœuvrement ? l’inactivité ? le chômage ? le désespoir ? l’amertume ? la jalousie ?

L’exaspération politique ?

Ils osent franchir les cordons de sécurité, défier les gardes du corps, braver policiers et gendarmes devant les caméras.

Un besoin soudain de notoriété ? le désespoir ? un suicide médiatique ?

Des gens courageux ?

Impossible de savoir avec précision ce qui les motive mais une chose est certaine : plus les politiciens se montrent et plus ils, ou elles, prennent des risques.

Plus l’exercice du pouvoir est long, plus ils s’incrustent dans le paysage politique et plus la probabilité de se faire gifler augmente.

Sarkozy a une vraie tête de "tête à claque", non ?

La déception arme le bras vengeur, la provocation renforce ses muscles.

La seule exception concerne l’Allemagne d’Angela Merkel pour des raisons évidentes liées notamment à la consommation régulière et excessives de bières blondes, bien blondes. Mais pas que.

Il parait que des listes nominatives de « têtes à claque » politique circulent sous le manteau et se distribuent à la sortie des facultés, des usines ou des métros mais c’est mal connaître les lanceurs de chaussures : leur stratégie est à la fois personnelle voire individualisée et originale en même temps, ils n’obéissent à aucun schéma préétabli, le choix de la victime leur appartient, il y a quelque chose qui est du ressort de l’intime entre le bourreau et sa future victime, un syndrome de Stockholm à l'envers. 

Reconnaissons aussi qu’ils ont l’embarras du choix…les têtes à claque sont transgénérationnelles, Sarkozy, Fillon, près de 40 ans de "vie politique"...

Autrefois on avait recours à des pleureuses lors des funérailles, elles étaient chargées de feindre le chagrin à grand renfort de larmes et de sanglots bruyants, c’est à elles que je pense quand j’entends Jean-Vincent Placé menacer d’abandonner la politique après voir été agressé.

Comme tête à claque…

Il n’abandonne pas la politique, c’est la politique qui l’a abandonné.

« La claque est à la gloire dramatique ce que les pleureuses étaient à la douleur ».

Il faut dédramatiser tout cela, il y a des choses beaucoup plus inquiétantes qu’une banale petite claque devant une caméra.

J’ai oublié de dénoncer ces « attaques insupportables » (Yves Calvi encore et toujours…) à l’encontre de nos hommes et de nos femmes politiques.

Un oubli, en effet, volontaire, soyons honnêtes.

Relativisons.

Nos icônes déconnent, alors évidemment…

Chaque métier, chaque activité humaine a ses contraintes et comporte des risques : celui de manifester, comme Rémi Fraisse et Adama Traoré, celui de porter secours à des migrants, comme Cedric Herrou.

Les lanceurs d’alerte sont tous menacés de taule, pourchassés jusque dans les ambassades, prisonniers livides et blêmes comme la mort.

Si ce n’est pas de la violence…

De la vraie violence.

Mon indignation est de ce côté là, pas de l'autre, ce n'est pas seulement un choix, c'est un réflexe.

« Celui qui m’assure ignorer la rancune, j’ai toujours la tentation de lui donner une gifle, pour lui montrer qu’il se trompe ».

Il a raison Cioran, la tentation est forte, il y a des claques qui se perdent…

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