Le très large succès de Fillon s’appuie notamment sur le rejet de deux personnalités , de deux caractères, de deux « pratiques » politiques.
Deux échecs en un pour construire une victoire : en régurgitant les plats indigestes des frères ennemis Sarkozy et Hollande, malgré la surabondance d’une sauce aigre-douce qui n’arrive pas à masquer le rance et le moisi, Fillon a réussi la prouesse de se faufiler entre deux spasmes, autour d’un haut-le-cœur partagé.
Les bilans des deux quinquennats du Sarkhollande, 2007-2017, dix longues années, sont largement déficitaires au sens économique du terme, socialement et moralement aussi. Un échec politique complet, rien ne manque !
L’exploit de Fillon de masquer son implication personnelle et son entière responsabilité dans les échecs de Sarkozy ne peut donc pas s’expliquer par quelque chose d’objectif, les chiffres et la mémoire ne suffisent pas.
La preuve !
Les tempéraments, les dérives comportementales, les reniements, les contradictions, les trahisons, les manœuvres, le cynisme et l’entêtement, l'absence de lucidité font la différence et marquent l’inconscient collectif au fer rouge, à gauche comme à droite : Fillon l’a emporté largement en surfant sur la vague des émotions négatives y compris dans la perspective de la menace Le Pen.
Ce que Fillon ne pouvait pas faire publiquement – tuer le Maître, lui le « collaborateur », lui l’esclave – une partie de la gauche l’a fait en votant Juppé, 15 % dit-on.
Tactiquement bien joué.
A la gauche de méditer sur cette collaboration douteuse, sa naïveté risque de lui couter très cher.
En 2012 Hollande était l’anti Sarkozy.
En 2017 Sarkozy pensait revenir sous les traits d’un anti Hollande déterminé, la revanche du looser.
La boucle est bouclée, ils tournent en rond, leurs destins sont étroitement liés, ils ont simplement oublié qu’ils étaient hors jeu.
Fillon rafle donc la mise : il n’est plus Sarkoziste, encore moins Hollandais, l’ultra libérale articule sa campagne sur le « redressement nationale » avec une sauce patriotique, catholique et traditionaliste qui lui donne des arguments face à l’extrême droite.
Le Chiraquisme est mort, le Sarkozysme est mort, le Hollandisme n’a jamais existé, l’avenir dira si le Fillonisme est né, cela reste à démontrer.
Le Pen, dont le flanc droit pâlit sous la concurrence Fillon, est obligée, maintenant, de dénoncer la « casse sociale » promise par le vainqueur "de la droite et du centre", à ce rythme là elle risque de doubler sur sa gauche un Macron, un Valls, une bonne partie de la gauche molle.
Si, par malheur, Hollande décidait de briguer un second mandat, Fillon l’emporterait contre n’importe qui, contre tout le monde.
Pendant que Sarkozy et Hollande entretenaient leur combat de petits coqs, le libéralisme avançait tranquillement et sûrement, le MEDEF doit se pincer en voyant ce score de 66 % qu'il vient d'obtenir, hier soir, du pain béni, oui du pain béni...
Ce que la droite a fait en éliminant Sarkozy, la gauche doit le faire en éliminant Hollande.
Une question de survie.