Les hypothèses que je prends et qui se fondent sur la moyenne de variation de l’espérance de vie des 5 dernières années (2016-2021) pour la fourchette basse et des dix dernières années pour la fourchette haute (20211-2021) donnent un résultat tout autre que ce que propose le COR. Elles amènent à un écart d’espérance de vie à 60 ans de 3 à 5 ans pour les femmes en 2070 et de 5 à 7 ans pour les hommes par rapport à l’hypothèse moyenne du COR.

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Cet écart d’espérance de vie à 60 ans suffit à remettre totalement en cause les hypothèses de déficit annoncés sur les décennies prochaines et sur lesquelles se fondent certains de nos hommes politiques pour réclamer rapidement une augmentation de l’âge de départ.

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Ce que nous vivons en 2022 avec les mortalités liées à la canicule et la poursuite des mortalité liées à l’épidémie de COVID confirme ce que j’annonçais dans mon précédent article. L’espérance de vie a certainement cessé d’augmenter. Selon les dernières données INSEE, les mortalités entre janvier et début septembre sont supérieures de 31 000 à ce qu’elles étaient en 2019 ce qui va certainement rendre totalement caduque les projections du COR pour 2022.
Le COR se projette en 2070 et n’intègre même pas l’effet du changement climatique en terme de mortalités liées aux canicules qui risquent d’être massifs si nous n’arrivons pas à réduire rapidement nos émissions de gaz à effet de serre et qui resteront importantes même si on y arrive. Les inflexions des courbes du COR vers le haut ne sont absolument pas logiques alors que les tendances passées amènent vers un plateau.
Si on part de projections qui s’appuient sur la réalité des 5 dernières années et des 10 dernières années et qui intègrent l’impact des êtres humains sur leur environnement, les dizaines de milliards d’euros de déficits annoncés sont donc complètement faux.
Comme je l’indiquais dans mon précédent article, il y a plusieurs facteurs qui amènent à penser que l’espérance de vie ne va plus augmenter et que les hypothèses que je prends sont proches de la réalité :
- Le stress et la fatigue au travail vont continuer à augmenter en lien avec :
- Le recul de l’âge de la retraite lié à la réforme en cours
- Le travail accru en soirée, de nuit et le week-end pour de plus en plus de monde
- La perte de sens de certaines missions
- Les périodes d'activité fragmentées
- Le cumul de plusieurs activités et les heures supplémentaires pour ceux qui gagnent le moins et qui ont des emplois précaires
- Les difficultés d'accès aux soins pour les personnes les plus pauvres et pour une partie des français dans des déserts médicaux
- Les personnes qui ont des mauvaises couvertures santé ou ont absolument besoin de travailler hésitent à se faire soigner lorsqu'elles sont malades
- Les activités physiques pénibles au travail sont plus usantes pour les personnes de plus de 60 ans
- Le changement climatique avec ses évènements de plus en violents comme les canicules de plus en plus fréquentes accroissent les décès de personnes âgées.
- Les cancers du poumon augmentent chez les femmes
- L’obésité augmente dans la population
- L'impact des virus, bactéries et l'antibiorésistance va impacter à la hausse le taux de mortalité certaines années
- La vies est de plus en plus compliquée pour une partie des français qui ont de plus en plus de mal à accéder à leurs droits à cause de la numérisation à outrance des services publics et la disparition des accueils physiques.
Si je pouvais reprendre deux points de ma précédente analyse :
- Augmenter l’âge de départ à la retraite est une mesure anti-pauvre qui ont une espérance de vie beaucoup plus faibles que les personnes riches (13 ans d’écart pour les hommes et 8 ans d’écart pour les femmes entre les 5 % les plus pauvres et les 5 % les plus riches)
- Augmenter l’âge de départ à la retraite va continuer à détruire la cohésion sociale en réduisant de plusieurs centaines de milliers par an le vivier de bénévoles qui s’investissent pour les autres. Or nous avons plus que jamais besoin de jeunes retraité.e.s qui s’engagent pour les autres dans les associations de lutte contre les exclusions, sportives ou toutes les activités qu créent de la cohésion sociale dans nos territoires.

Il y a également de plus en plus de personnes qui ont besoin de temps pour s’occuper d’un ainé en mauvaise santé et qui ne pourront plus en avoir sauf à partir plus tôt avec une retraite dégradée.
Après 60 ans, il y a énormément de moyens de s’investir pour le autres en dehors du travail et c’est cela qu’il faut favoriser et reconnaître.
Non, il n’y a pas urgence pour reporter l’âge de la retraite. Si l'on se projette d'ici 2030, avec l'augmentation de la durée des cotisations qui passe progressivement à 43 ans et des études qui font rentrer dans la vie active plus tard, il n'y a donc aucune raison de changer quoi que ce soit au système actuel. Il oblige déjà les français à partir de plus en vieux ou à percevoir moins de retraites en partant plus tôt.
Oui, il y a urgence pour lutter contre la pauvreté sous toutes ses dimensions et la préservation de la planète.
Mesdames et Messieurs les membres du COR reprenez vos calculs et intégrez mes hypothèses qui se fondent sur la réalité des 5 et 10 dernières années !
Liens :
Septembre 2022 : Rapport annuel du COR septembre 2022 - Evolutions et perspectives des retraites en France
Septembre 2022 : Nombre de décès quotidiens - INSEE
Mars 2022 : L'espérance de vie a cessé d'augmenter - la retraite à 65 ans n'est pas justifiée – Bruno Rakedjian
Février 2022 : Espérance de vie à la naissance par sexe et niveau de vie mensuel - Données annuelles 2012-2016 - INSEE
Mars 2022 : Synthèse. Baromètre France Bénévolat / IFOP 2022