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Billet de blog 1 décembre 2025

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L'innocent imaginaire.

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Du barreau aux tréteaux

Illustration 1

Prologue

Votre plus haute justice n'est que pure comédie,

Vains et peu fiables magistrats,

Vous ne pouvez punir par vos grandes plaidoiries

La douleur qui me désespère.

Au nom d'un code civil de pure hypocrisie.

Hélas ! Hélas ! Je n'ose me départir

De ce douloureux martyre,

Qu'un peuple félon désire me faire subir

Mes pairs seuls viendront me secourir.

Pour qu'enfin on daigne m'élargir

Félons juges d'instruction, vous ne me ferez taire,

Vos sentences ne sont que vaines chimères.

Ces peines infamantes, réservées aux vulgaires

Vous me les imposez par esprit de vengeance,

Pour des fautes qui n'ont rien de sincères

C'est ainsi que votre intransigeance,

Condamne un innocent IMAGINAIRE.

Argan Sarkozy

•••

Illustration 2

Il advint qu'un pauvre homme sombra dans les plus terribles dérives, poussé qu'il fut par son appât du gain, son goût du luxe et des belles femmes, son désir d'imposer son pouvoir sur une cour de valets tous disposés à favoriser ses désirs et ses volontés, quelle qu'en furent les conséquences.

Il trompa ses admirateurs en fondant son discours sur la guerre impitoyable qu'il entendait mener contre les racailles, les délinquants des quartiers, les petites frappes et grands caïds sur lesquels devaient s'abattre les rigueurs de la loi. Peines planchers, application rigoureuse des sentences, conditions rigoureuses d'incarcération … L'homme avait enfilé un gant de fer pour manier le karcher et laver le pays de cette lèpre transgressive.

D'aucun remarquèrent que la virulence de ses propos ne se fondait non pas sur le désir sincère de rétablir la sécurité et l'harmonie en extirpant le mal et les comportements délictueux. En réalité, notre innocent imaginaire ne pouvait supporter que ceux qu'ils vouaient à la rigueur du bras séculier partageaient en tous points ses propres valeurs. C'était pour lui insupportable de se reconnaître ainsi en cette lie de la société qui transgressait les règles se vautrer tout comme lui dans le luxe et une vie opulente.

L'homme en dépit de cette convergence flagrante des valeurs, se fit alors le champion de l'ordre et de la sécurité, de la nécessaire sévérité de la justice vis à vis de cette délinquance qui devint son cheval de bataille. N'évoluant pas dans les mêmes eaux troubles que ces bandits de petit destin, il se permit de transgresser, de tricher, de mentir, de truquer ou du moins de profiter de toutes ces entorses à la morale et à la loi en profitant des manœuvres de ses sbires et âmes damnées.

Sa fonction le convainquait à la fois du bien fondé de ces petites manœuvres mais qui plus est de leur absolue nécessité pour poursuivre son grand œuvre tout en s'enrichissant incidemment au passage. Simple conséquence inopinée de la masse considérable d'argent ainsi détourné à son usage par des tiers dont il n'avait pas à assumer la loyauté à son égard.

Petit à petit, les affaires finirent par éclater au grand jour et l’opprobre s’abattit sur lui. Il demeura droit dans ses escarpins, convaincus que le temps jouerait toujours en sa faveur, usant à plaisir de manœuvres dilatoires et de grandes scènes de l'honneur outragé. Il joue si bien son rôle qu'en dépit d'un nombre considérable de casseroles, il se convainquit sincèrement de son innocence. Il fut en cela bien aidé par tous ses amis politiques qui ayant à des degrés divers, profité ou trempé dans les combines, ceux-là se firent ses plus fervents avocats.

Notre innocent imaginaire tomba des nues quand le couperet finit par tomber. À force de trop tirer sur l'élastique, il finit par casser. Ce fut un drame et non le début de la rédemption. Il vécut se petit passage derrière les barreaux comme une insulte à sa personne et pourquoi ne pas enfoncer le clou, un outrage à la nation tout entière.

Ne lui jetons pas la pierre, il est véritablement un innocent imaginaire et la force de sa croyance est inaltérable. Rien ni personne ne le fera changer d'avis. Il est convaincu de n'avoir aucun compte à rendre à la justice. Nous devrions l'aider et continuer nous aussi à le bercer de cette douce illusion. C'est la condition pour qu'il ne nous impose pas une pièce de théâtre en prose et en trois actes.

Vous voyez d'ici le tableau. Il nous faudrait lui expliquer que ce qui n'est pas prose est vers et ce qui n'est pas vers est prose, qu'une comédie ballet combine les éléments de la comédie et de la contre-danse et que celle-ci serait sans doute sa dernière œuvre dramatique tandis qu'il lui faudrait mourir sur scène lors de son ultime représentation. C'est quand même mieux qu'en prison !

Illustration 3
© Chaunu

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