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Billet de blog 2 décembre 2025

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I.A. générative : La fin de l'histoire

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L'intelligence sacrificielle.

Illustration 1
© Mike MacKenzie

L'humanité est entrée dans l'histoire quelque part en Mésopotamie et sans doute ailleurs dans le Monde, lorsque les humains ont déployé des trésors d'imagination, de réflexion et d'analyse pour mettre en place différents systèmes codés d'écriture. Ce fut sans doute pour favoriser le commerce que ces prodiges d'intelligence furent mis en œuvre avant que d'être exploités par tout ce qui allait faire la grandeur de notre espèce : philosophie, poésie, mythologie, récits épiques ou mémoriels, traités, textes administratifs, correspondance, …

Écrire fut un privilège acquis au terme d'un long et délicat apprentissage auquel tout le monde hélas n'avait pas accès. Il en fut ainsi lors de ces temps qui avaient fait entrer les humains dans l'Histoire, cette période qui mettait fin à la préhistoire, justement par l'appropriation de l'écrit et non de la simple lecture.

Écrire c'est d'abord réfléchir, penser, élaborer des phrases complexes, manipuler des concepts, choisir son vocabulaire, manier les correspondances de temps, élargir le champ d'expression de la phrase grâce aux introducteurs de complexité. C'est solliciter sa culture, ses connaissances, son pouvoir d'analyse, sa capacité à produire à la fois du sens, de l'émotion, de la compréhension et du beau. C'est enfin laisser une trace, une offrande, une déclaration, un témoignage, une œuvre.

L'écriture avait installé notre humanité dans une vaste aventure intellectuelle qui n'avait cessé d'honorer les individus, de leur permettre de grandir et d'affirmer leur personnalité, leurs goûts, leurs sentiments, leurs passions. Chaque trace laissé sur l'argile, le papyrus, le parchemin, le papier ou bien les disques durs était un pas de plus qui faisait de chacun de nous des êtres inscrits dans la grande chaîne de l'humanité.

Certains ont bien compris le terrible danger que représentait ce savoir émancipateur en pourchassant les écrivains, en brûlant les livres, en interdisant l'apprentissage de l'écriture à certains couches sociales, aux femmes, aux esclaves. Ce fut un combat de tous temps afin que tous aient accès à l'école pour s'élever non pas nécessairement dans l'échelle sociale mais dans l'humanité pensante.

Puis, reprenant le flambeau destructeur des tyrannies, des religions, des oligarchies, des élites qui refusaient de partager le savoir, l'intelligence artificielle, mise en place par des êtres pervers, cupides et manipulateurs est venue semer les ferments d'un abrutissement pernicieux, adroit certes mais totalement destructeur. La machine va écrire à la place des humains, non pas sous sa dictée mais en se substituant à eux dans les fonctions cognitives et de pensée que suppose l'écriture.

Ils vous ont vendu des avantages illusoires. Le gain de temps tout d'abord pour supprimer la nécessaire réflexion qu'impose le fait de coucher sur le papier sa pensée. La maîtrise de la forme ensuite en allant piller ce que d'autres ont écrit tout en élaborant ainsi de manière fort élégante des écrits qui n'ont demandé aucun effort ni aucune culture.

Au bout de cette vaste opération d'abrutissement général des masses et mêmes des élites, la machine pensera à votre place. Vous aurez éventuellement encore besoin de la lecture et de quelques éléments basiques d'expression écrite pour rédiger les demandes en abandonnant toute forme de régulation sur ce que produira cette immense cerveau artificiel.

On mesure d'ores et déjà  les ravages dans la création musicale, dans les romans, dans les discours. Des petits robots imbéciles fussent-ils des politiciens de haut vol, des écrivains reconnus ou des artistes tombent dans cette facilité alors qu'à l'école, les enseignants y perdent leur latin devant ces élèves qui délèguent à ce monstre numérique le soin de rédiger mais plus grave encore, de penser à leur place.

Vous êtes des millions et probablement bientôt des milliards à vous extasier devant les prodiges de cette création machiavélique. Vous êtes tout autant à ouvrir les portes à la prochaine barbarie, à la fin de l'histoire en déléguant votre humanité à quelques apprentis sorciers et à des pieuvres informatiques à l'échelle de la planète. Votre sottise est incommensurable !

Illustration 2
© Zelda Zonk

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