Député des plateaux télé.
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Notre trublion de la vie politique aime à brouiller les pistes et les étiquettes sauf lorsqu'il s'agit de produits alimentaires. Jamais rassasié, il court de plateaux en plateaux pour diffuser sa petite musique personnelle quitte à contrarier ceux dont il est censé porter les couleurs. Rien ne l'arrête, pas même les relents nauséeux de ceux qui l'invitent.
À l'heure du dîner, il est devenu le chantre de la ruralité, le bon samaritain des oubliés, le défenseur de ceux qu'à la Capitale on qualifie sans vergogne de ploucs ou de pécores. Il porte sur lui son éternelle tunique Mao achetée chez le Bon Laboureur lui qui aime à creuser son sillon médiatique pour que germent ses idées. C'est ainsi qu'il se présente sans cravate et avec ses hublots pour regarder la France dans les yeux, devant les caméras pour honorer ces territoires qui ne sont pas entendus en ces lieux.
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Il ne ménage pas ses efforts allant de LCI à C News, de BFM à Europe 1 en dépit de contradicteurs qui sont là pour préparer le terrain à une idéologie qui prône la sulfateuse dans bien des domaines. Il est émouvant dans sa défense du bon sens, qu'il a sans doute trouvé près de chez lui avant que de se laisser bercer par les sirènes de Lutèce.
Car notre bon député en oublie les petites communes de sa circonscription, passant beaucoup trop de temps au parlement avant que de répondre aux innombrables invitations des chaînes Boloré et consorts qui ont trouvé en lui un excellent client, une sorte de faire-valoir plaisant et patelin sans être urbain pour atténuer de temps à autre leur sombre idéologie. Et ça fonctionne au-delà de leurs espérances puisque le brave Richard Cœur de Lion et Jambon sans nitrate, la baguette de pain sous le bras, ne cesse de crever l'écran.
Il s'est laissé charmer par cette notoriété illusoire, jouissant ainsi sans modération de la trompeuse assuétude des projecteurs et des microphones. Hélas, corollaire déplorable, n'ayant pas le don d'ubiquité, il en oublie le comice agricole de son canton, la fête de l'andouille, l'élection de Miss Canal d'Orléans et l'assemblée Générale des Charbonniers de la forêt des Loges. À son grand regret, il doit faire des choix.
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Ne lui jetons pas la pierre car il a sacrifié sa réputation et sans doute sa santé à courir ainsi d'un plateau à l'autre après des heures harassantes au parlement, où là aussi, il ne laisse pas sa part aux chiens. Il a démontré à tous qu'il faudrait à l'avenir envisager une nouvelle fonction, une nouvelle circonscription. Comme il y a les députés des Français de l'étranger, il conviendrait de créer les députés des plateaux télé…
Ce serait plus simple pour ceux qui hériteraient de cette représentation sans provoquer la grogne parmi leurs électeurs frustrés de ne plus les voir assez sur le terrain de leur circonscription élective. Bien-sûr, il faudrait une sélection pour établir une liste de candidats ayant la gueule de l'emploi, la faconde et le bagout pour amuser les téléspectateurs et une parole qui se libère aisément des diverses lignes politiques.
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Se posera alors la nature même de l'électorat. On peut imaginer de grandes émissions au terme desquelles, dans chaque camp, les téléspectateurs éliraient leur représentant sous les projecteurs des studios. Ainsi, ces nouveaux représentants seraient dédouanés de l'obligation de courir à contre-cœur un territoire qui les éloignerait par trop de leurs chers plateaux.
Nous mesurons à quel point Richard Ramos, par le don de sa personne qu'il a fait aux journaux d'information en continue a fait avancer la réflexion sur la représentation politique. J'invite par la même tous les déçus de sa circonscription, tous ceux qui déplorent de ne le voir que trop rarement sur le terrain, à se féliciter tout au contraire de l'immense modernisation de la vie publique que leur député a initiée. Quant à sa volonté de participer aux municipales à Orléans, ceci l'éloignerait fort des plateaux parisiens. Il faudra qu'il y réfléchisse à deux fois.
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