Les confréries ennemies.
La tradition n'a pas que du bon, il se peut parfois que des luttes souterraines imposent des tiraillements qui échappent à l'observateur distant et ignorant du secrets des gueux. Il en va ainsi des confréries batelières de notre bonne ville de Cenabum. Elles se multiplient, se regroupent, se divisent au grès de mouvements obscures de querelles intestines ou de sombres machinations.
Cela pourrait prêter à sourire si cela n'avait aucune incidence sur l'image de notre marine de Loire. Mais bien au contraire, ces fâcheries, ces retrouvailles, ces séparations fracassantes sont autant de raison de diviser la petite flottille et de diminuer l'impact des animations proposées. Pire même, ces divorces bien peu amiables donnent une piètre image à ce qui ne devrait être qu'une passion partagée.
Les confréries poussent comme des champignons sur les quais du port d'Orléans. Les familles se divisent, les amis se tournent le dos. Il faut organiser plusieurs pontons pour éloigner les bateaux des uns et des autres. Les querelles deviennent batailles navales et quelques accrochages attestent de la rudesse de l'animosité. Il se dit même que certains en sont venus aux mains …
J'avoue ne rien comprendre à cette guerre d'image. Il se peut que se cachent des intérêts étranges, des conflits d'égo ou bien pire encore, des luttes souterraines pour quelques promesses municipales. Le Festival de Loire a grande importance et fortes répercutions. Il doit bien attirer les convoitises et réveiller des ambitions personnelles.
Là, vraiment, nous sommes loin de la tradition et de la préservation d'une culture locale. La modernité a mis son grain de sel dans ce qui autrefois se contentait de subir la gabelle sans piper mot. Les coups de Trafalgard pointent même le bout de leur vilain nez sur la Loire pour un bien étrange dépaysement.
Je ne sais quel jeu joue la municipalité dans la joyeuse pétaudière navale. Il se peut que la présence d'un bateau à aubes, l'inexplosible, ait ajouté aux tiraillements des hommes. Le titre de capitaine de ce grand bateau doit certainement flatter les plus ambitieux et honorer celui qui hérite de la barre prestigieuse. De là à se penser maître des lieux, il n'y a qu'un pas qui peut aisément se franchir au risque de faire l'unanimité contre soi en tenant la barre d'un poing bien trop ferme !
C'est le bal des vanités locales pour un bassin d'un peu plus d'un kilomètre de long. Ces misérables ronds dans l'eau seraient risibles s'ils ne nous faisaient pas passer, nous les autres mariniers sincères et fraternels, pour des guignols à l'aulne du spectacle qu'offrent nos compagnons aveuglés par des conflits dont les origines doivent se perdre dans les vapeurs de vinaigre.
On ne peut accepter que les bannières s'ajoutent aux mauvaises manières, que la division s'installe dans ce qui ne devrait être qu'une passion partagée. J'en appelle à la raison de tous ces charmants compagnons chalandiers, ces amoureux de notre fille Liger qui n'aiment pas, j'en suis certain ces luttes de girouets, ses querelles de mâts, ses guerres Picrocholines !
Une confrérie comme son nom l'indique est une réunion fraternelle de gens partageant une activité commune. La Loire est unique, revenez à de plus raisonnables positions, suivez son exemple, acceptez vos différences, oubliez vos divergences, effacez vos griefs et retrouvez vous unis en ce merveilleux fief ligérien…
Ne voyez aucune leçon de morale ni une ingérence déplacée. C'est par soucis de voir se prolonger ma passion Loire que je souhaite que le bassin qui regroupe tous les bateaux de bois de la ville d'Orléans ne soit plus un espace belliqueux. Nous avons pour mission de maintenir une mémoire, de faire vivre une tradition. Point n'est besoin de se quereller, regroupez-vous autour de belles chansons et d'un bon vin du pays et faites pour toujours, la paix des braves !
Apaisement vôtre.