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Billet de blog 18 mars 2012

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2 De Nation à Bastille.

Prendre la Bastille Des cars par milliers crachent des provinciaux à l'assaut de la capitale, des bouches d'égout vomissent leurs flots de révolutionnaires tout de rouge vêtus, une foule immense, bon enfant, sans intentions belliqueuses, une foule immense vient ouvrir la voie d'une nouvelle République. Le peuple en mouvement se rassemble pour monter tranquillement prendre toutes ces Bastilles qui se dressent encore sur le chemin de l'égalité. 

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Prendre la Bastille

Des cars par milliers crachent des provinciaux à l'assaut de la capitale, des bouches d'égout vomissent leurs flots de révolutionnaires tout de rouge vêtus, une foule immense, bon enfant, sans intentions belliqueuses, une foule immense vient ouvrir la voie d'une nouvelle République. Le peuple en mouvement se rassemble pour monter tranquillement prendre toutes ces Bastilles qui se dressent encore sur le chemin de l'égalité.

Ils arborent fièrement des badges, des auto-collants, des drapeaux, des affiches, des petits messages personnels, le rouge domine, le vert, le blanc et le noir complètent la gamme chromatique. Ils se remettent en marche après des années de mépris, d'insultes, de provocations et d'humiliation. Ils sont si nombreux que cette fois, il sera impossible de les négliger !

Le rouge domine partout, rouge au front, rouge au cœur, rouge aux joues, rouge partout sur les vêtements ou les drapeaux. Le peuple avance pour réclamer une sixième République. Chacun a derrière lui des années de douleur et de désillusion, de recul des droits et de perte de pouvoir d'achat. Ils ont tous la farouche volonté de mettre un terme à ce système dans lequel ils ne se reconnaissent pas.

La multitude se met en marche, de toutes parts, c'est un bloc humain, une masse compacte, une fourmilière incroyable. Les manifestants piétinent, des circuits parallèles s'organisent sur les rues adjacentes. Des faubourgs Saint Antoine, Voltaire ou Montreuil, d'autres flots se lancent eux aussi à l'assaut de la Bastille.

Arrivée sur la place, c'est le goulet d'étranglement. Pourtant pendant trois heures, ils vont se répartir sur la place et partout sur les branches de cette magnifique toile d'araignée au cœur de la cité. Les gens se pressent les uns contre les autres, se faufilent, se croisent. Pourtant, nulle violence verbale, nuls cris déplacés. C'est un cortège serein, tranquille qui avance et s'étale. Il y a une dimension paisible qui ne cesse de me surprendre.

Les gens se sourient, se parlent, évoquent les manifestations d'antan, les défilés d'hier et d'avant hier. C'est un rassemblement d'humains en marche vers un monde nouveau qui redonne sa place à l'individu. Pas de policiers, pas de service d'ordre, cent vingt mille personnes se pressent dans la plus grande fraternité.

Je croise José de Boulogne. Il me raconte ses défilés. Il se vante de n'en avoir pas manqué beaucoup. Il évoque Billancourt, son mai soixante-huit à lui, ses barricades. Il m'évoque sa banlieue, son Ardèche. Il vibre d'émotion en retrouvant des parfums qu'il ne pensait plus sentir dans ce pays. Lui aussi admire la quiétude de cette multitude …

Plus loin, c'est René de Bondy qui me sert à peu près les mêmes souvenirs quand il retrouvait sa femme pour passer ses soirées sur les barricades. Aujourd'hui, il a le sourire aux lèvres, « je sens un souffle de liberté, une volonté de prendre en main notre destin. Il y a bien longtemps que je n'avais senti cette force qui avance et qui me redonne espoir en demain. » me dit-il

Sur le podium, loin, si petit que seuls les écrans géants peuvent nous en donner une image, des artistes viennent chauffer le public. Curieusement, ils sont accueillis tranquillement. Peu de cris, ni d'applaudissements délirants. On devine l'attente, le désir d'écouter le discours de celui qui représente la possibilité d'inverser les rapports de force, de réussir l'impossible : rendre la parole au peuple !

Puis, soudain, IL arrive. Là encore, pas de délire, pas de crise d'hystérie comme on veut bien nous en servir ailleurs. C'est sérieusement, c'est attentivement que cette foule écoute les paroles du Candidat qui porte leurs indignations et leurs colères, leur espoir et leur fierté. Ils applaudissent brièvement, ils se taisent à nouveau pour écouter. C'est impressionnant de dignité.

Bastillement vôtre.

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