Refaire sa vie
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Après un deuil, un échec douloureux, une séparation cuisante, une bataille de procédures, des déchirements et des souffrances, ils sont nombreux à s'interroger sur l'inflexion à donner à leur vie amoureuse. La plaie cautérisée, la vie parfois offre une seconde chance, un nouveau départ, une belle promesse. Parfois ceci survient au couchant de l'existence, à d'autres moments au mitan de la vie. Pour tous, se lancer ainsi dans une nouvelle aventure, suppose de prendre quelques précautions puisqu'il est de coutume de prétendre que chat échaudé craint l'eau froide.
Je n'aborderai pas ici, la dimension financière que je laisse aux avocats, notaires et autres banquiers avisés. Chacun sait que c'est souvent la pierre d'achoppement quand familles et héritiers se mêlent des histoires de cœur. L'argent semble ne pas faire bon ménage avec les sentiments surtout quand ce n'est pas du sien dont il est question. Prendre parti à ce sujet est bien délicat et je ferai l'économie de ce sujet.
La préoccupation essentielle alors se résume en cette formule qui s'est imposée à moi comme une évidence alors que ce cas de figure ne m'est que purement théorique : « S'apprivoiser sans se domestiquer ! ». Il est permis de penser à Saint Exupéry par le truchement de ce délicieux programme pour refaire éventuellement sa vie.
S'apprivoiser est le premier terme de cette belle promesse. Au cours des années, chacun a pris ce qu'on nomme des plis et qui finissent par froisser le ou la partenaire. L'existence ne se contente pas d'un coup de fer pour aplanir les petits écueils du quotidien. L'apprivoisement est une longue école de la tolérance, du pardon et de la mansuétude que l'amour permet de rendre plus aisé. C'est du moins ce qu'il convient d'espérer.
S'apprivoiser c'est entrer dans une forme de communion qui autorise les moments de vie commune à travers ces petits gestes du quotidien qui ne s’intègrent pas aux effusions de la passion. Ce sont ces petits riens qui font souvent les grandes fâcheries quand une manie ou un comportement finissent par ulcérer le partenaire. L'apprivoisement passe outre avec beaucoup d'indulgence à la condition que le second volet soit mis en application.
La plus sage résolution alors est de ne point se domestiquer. Pour que l'aventure ne s'effrite pas, qu'elle ne profite que des bons moments, qu'elle s'offre des plages de solitude, la domestication est la pire des contraintes, passé un âge certain. Trop de concessions tuent les efforts et provoquent courroux et ressentiments. La vie en couple au quotidien dans pareille situation est une prise de risque à laquelle il est prudent d'échapper.
Sans se domestiquer, le chacun chez soi assure l'équilibre et la pérennité d'un nouveau départ dans la sérénité surtout quand viennent à surgir les familles respectives. Les deux partenaires ont tout intérêt, quand c'est financièrement possible, de garder un territoire privé, une chasse gardée, un havre de paix parfois. C'est là la bulle d'oxygène qui permet de reprendre son souffle afin de repartir du bon pied.
Voilà, pour quelqu'un qui n'est pas concerné par cette hypothèse, les quelques réflexions qui me viennent à l'esprit alors que s'est imposé à moi cette formule qui a déclenché le besoin de coucher sur le papier ces quelques lignes : « S'apprivoiser sans se domestiquer ! »
Je me suis peut-être fourvoyé. Ce sera alors l'occasion de lancer le débat ou de recevoir des témoignages de la part de ceux qui vivent contrairement cette nouvelle étape alors qu'ils refont leur vie sur le tard. Voilà bien un sujet qui ne s'encombrera pas des insupportables pressions idéologiques de l'heure, celles-là même que jamais nous n'apprivoiserons collectivement. Quant à la domestication, elle risquerait alors de se nommer asservissement ou privation des libertés essentielles. Mais ceci est une tout autre histoire...