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Billet de blog 21 novembre 2025

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Une histoire orléanaise.

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Le royaume des condiments

Illustration 1

La tradition et le goût se perdent dans un univers industriel qui joue autant avec notre santé qu'avec les saveurs et les origines. La grande distribution dans cette illusoire guerre des prix vous pousse toujours plus à vous tourner vers des produits insipides qui viennent de si loin qu'il est bien difficile de suivre précisément les conditions dans lesquelles ils ont été cultivés ou fabriqués.

Nos condiments sont sans doute à la toute fin de la chaîne alimentaire pour le consommateur qui aura peut-être un regard attentif sur l'origine de sa viande, de ses légumes, de son vin mais se contentera de prendre une marque quelconque pour sa moutarde, son vinaigre, ses cornichons. Et en agissant ainsi, il accentue une fois de plus le déficit de la balance commerciale tout en ingérant des produits plus que douteux.

Illustration 2

Il est pourtant une ultime poche de résistance dans le pays qui refuse de se satisfaire de la dictature de cette mondialisation suicidaire pour produire du local, du sain et de l'authentique. C'est à Boigny-sur-Bionne que l'on trouve cette forteresse du goût et des saveurs avec la société Martin-Pouret qui a quitté ses locaux historiques et vétustes pour une merveilleuse installation qui ne se contente pas de permettre des productions dans les normes d'hygiène et de sécurité, mais qui plus est, convie les curieux à des visites et des animations.

Créée en 1797, la maison Martin-Pouret est la dernière survivante des quatre cents vinaigreries qui fleurirent dans l'Orléanais, quand ce terroir constituait alors le plus grand vignoble de France. La légende urbaine prétend encore que le vin tournait vinaigre en arrivant au port et que celui du pays était si mauvais qu'il ne valait pas mieux. La réalité est toute autre…

Illustration 3

Les vinaigres d'Orléans n'émanaient pas d'une mère qui donne certes rapidement un vinaigre qui demeure alcoolisé (6 à 7°) et, qui plus est, est fort acide. La méthode fonctionne à plein régime dans l'industrie agro-alimentaire puisqu'un vinaigre de basse qualité est produit au bout de trois jours. Ici, il en va tout autrement…

La nature avait doté la région d'une levure qui existait à l'état naturel, qui sous des conditions drastiques d'humidité, de température et d'air, prenait son temps pour transformer tout l'alcool du vin en des notes gustatives sans égales. Ajoutons à ce petit trésor, des terres dans le nord de la ville d'Orléans qui fournissaient les raisins les plus aboutis pour donner des vinaigres d'exception, et le tour était joué.

Illustration 4

Puis la levure à l'état naturel a disparu et quelques gardiens du temple ont cherché à la préserver un peu à la manière des gardiens du feu lors de la préhistoire. Ils ne furent bientôt plus que deux : Martin-Pouret et Dessaux avant que ce dernier se dissolve sous la houlette de la société Amora. Depuis, il n'y a plus qu'un gardien du temple et de cette levure qui, si elle venait à mourir dans l'entreprise, disparaîtrait à jamais.

Je vous invite à venir visiter cette belle installation pour écouter le récit épique du transport de ce trésor lors du déménagement de l'entreprise. Il ne fallut pas moins de quinze expériences pour trouver comment déplacer cette potion magique sans la tuer. C'est ainsi que la merveilleuse alchimie se perpétue désormais dans les locaux de Boigny-sur-Bionne tandis que les plus grands restaurateurs du pays ainsi que le chef de l'Élysée y font vieillir en fût de chêne leurs nectars, préparés selon leur recette personnelle.

Je pourrai encore évoquer la moutarde qui est fabriquée elle aussi dans le respect du circuit court avec des graines venant du secteur de Pithiviers et de Puiseaux tandis que les cornichons sont cultivés eux aussi dans la région (Loir-et-Cher). D'autres préparations viennent compléter une gamme de produits qui enchante les gourmets. N'hésitez pas à venir vous faire votre opinion par vous-même.

Illustration 5

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