Pour un vote joyeux !
Le président grincheux ….
En ce dimanche matin, de bonne heure, j'ai rempli, comme ils disent, mon devoir électoral. Il y avait dans l'air comme un petit brin de muguet, une impression diffuse que l'espoir changeait de camp. J'allais joyeux porter deux bulletins qui sentent bon l'insurrection populaire, le rêve à portée de vote, l'espoir de jours qui tôt ou tard seront meilleurs pour les exclus du partage.
J'étais heureux, j'avais décidé de me rendre à pied dans ce bureau de vote installé dans une école dont le nom rappelle les grandes heures de la Révolution Française, pas celle d'aujourd'hui, celle de 1789. En entrant, je lançais à la cantonade un bonjour qui ne trouva qu'un seul écho. On n'est pas ici pour se saluer, c'est que le vote est un moment grave en terre de réaction !
Je demandais à l'assesseure service aux enveloppes et aux bulletins ce que je devais faire puisque porteur d'une procuration quand une voix aboya dans mon dos. La dame se faisait réprimandée par un homme sans doute important qui n'avait que faire des petites gens. Il y était question des enveloppes qu'elle ne devait surtout pas tendre aux futurs électeurs. C'est que le moment est un acte codifié en terre de conservatisme !
Je devais au préalable signer le registre des procurations puisque j'avais le plaisir de voter deux fois pour mon candidat de cœur. Une autre dame œuvrait à cette noble tâche et remplit son office avec le
sourire quand dans ce bureau pourtant, régnait une ambiance lourde et pesante de fin du monde. C'est que la tendance est mauvaise pour qui vit en terre droitière.
Je revenais prendre mes enveloppes, n'ayant pas besoin de participer à ce gaspillage scandaleux de papier que provoque un système archaïque et onéreux. Bien encombré avec mes deux cartes d'électeurs, ma carte d'identité et ma feuille de procuration, je lui demandais, à moitié ironique qu'elle me donna deux enveloppes. La dame de s'excuser, presque terrorisée, de n'avoir la possibilité de le faire. C'est qu'un regard inquisiteur épiait ce qu'elle faisait. C'est qu'on ne prend aucune initiative en terre sécuritaire !
Je pensais dans l'isoloir pour remplir mon bonheur d'électeur, car voyez-vous, messieurs les pisse-vinaigre, ce n'est pas un devoir, c'est un plaisir que nos anciens nous ont légué bien à l'encontre de vos convictions secrètes. Je comprends pourquoi vous faites de ce moment de citoyenneté assumée un temps solennel d'un ennui indicible. Vous voulez décourager l'électeur heureux et vous vous y prenez merveilleusement bien. C'est qu'on a la componction républicaine en terre johannique …
Au moment de glisser mon second bulletin dans l'urne, l'aboyeur président exigea que je signe à nouveau un registre de procuration. Je lui fis remarquer que je venais de le faire, qu'il était surprenant de faire par deux fois la même démarche. Je lui demandais alors si la procuration précédente avait fait de même de peur qu'en agissant ainsi il trouva moyen de fabriquer un motif d'invalidation. Il grogna qu'il savait ce qu'il faisait Lui, sous-entendant qu'un électeur de base n'a rien à dire à ce grand personnage. C'est qu'on a le vote sélectif en terre élitiste !
Exaspéré de tant que morgue, d'un comportement si désagréable pour un moment qui devrait être rendu agréable, je répliquais à cet homme important que je croyais que le vote devait être un moment joyeux. Il faut avouer qu'il ne trouva rien à redire à ce crime de lèse démocratie que je venais de commettre. Quant aux assesseures qui entouraient cet âne bâté qui pourrait fort bien s'appeler Martin, elles me firent grand clin d'œil pour signifier discrètement leur accord. C'est qu'on a l'importance austère en terre de notabilité !
J'en avais fini avec ce qui devient du fait de petits barons vicinaux, une corvée, un moment douloureux de silence et de recueillement. Ils agissent ainsi un peu partout en France pour détourner des urnes ceux qui n'ont pas la même manière grave et servile de penser le Monde. J'espère qu'un grand coup de balai va résulter de ce vote et que notre démocratie retrouvera des allures de fête populaire. C'est que nous autres, nous avons la démocratie joyeuse en cette Nation révolutionnaire !
Insurrectionnellement vôtre.