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Billet de blog 24 décembre 2025

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Saveurs d'antan.

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Les oubliés de nos assiettes.

Illustration 1
© Friedrich Prölss

J'ai bien peur de semer l'effroi et le dégoût parmi les adeptes de la grande distribution et des plats tout préparés. Je leur conseille de fuir au plus vite ce billet qui risque de leur faire tirer au cœur tout en les laissant fort mal dans leur assiette. Il est vrai qu'il ne sera pas ici question de micro-ondes et de cuisine vite expédiée et encore moins de ce que certains, peu regardants sur le code du travail et des droits humains, se font livrer par des officines de la mal bouffe.

J'ai bien l'intention en ces temps de bombance codifiée, réglementée et formatée d'évoquer pour vous, par le menu, ces plats oubliés que ma grand-mère n'eut de cesse de me préparer afin que je sois le digne héritier d'une longue tradition de cordons bleus de l'authenticité et de la simplicité. Avouons tout de go que désormais, pour la simplicité, il faudra repasser tant certains ingrédients sont devenus introuvables.

Ainsi, j'aimerais débuter par une minute de silence en mémoire de nos défuntes triperies qui nous apprirent jadis à accommoder les bas morceaux pour trois francs six sous et l'art de faire des prouesses avec presque rien. Je vais ici vous vendre tripes et boyaux, cervelles et poumons, pieds et oreilles de cochon, fraise et ris de veau sans oublier les rognons et ces rates qui aimaient tant le court bouillon.

Si j'avais du cœur et un peu plus de foie en l'humanité, j’évoquerais encore le paleron et le plat de côte pour une géométrie de la bidoche, la joue et la langue pour vous faire un pied de nez, les animelles appelées aussi rognon blanc afin de pousser le bouchon plus loin encore. La liste serait trop longue pour les virtuoses du congélateur et les solistes des robots magiques, il convient de ne pas en rajouter.

Illustration 2
© Pierre Brueghel l'Ancien

Oserais-je me jeter à l'eau en évoquant justement les poissons de Loire, si injustement décriés tout autant que ceux qui osent les manger, vilipendés par des pêcheurs sportifs qui trouvent dans la torture de leur proie un plaisir à renouveler. Le brochet ou le sandre sont bien souvent supplantés désormais par le silure qui n'est pas désagréable une fois dans l'assiette. La friture se fait rare sur la ligne et l'anguille a connu tant de vicissitudes qu'elle est en voie de disparition.

Quant aux poissons de mer, il y a ceux qui se prétendent nobles, ce qui se remarque à l'étiquette et les injustement délaissés qui demandent un savoir-faire tout autant que l'art de ne pas se focaliser sur les arrêtes. Le tout offre de réelles possibilités de plats économiques pour peu que l'on connaisse un bon poissonnier, ce qui est mon cas.

Les légumes seront toujours de la fête pour peu que vous soyez experts dans le maniement de l'économe et du couteau, car chose impensable pour certains, le légume ne s'achète pas épluché et sous vide. Il requiert l'art de savoir le mettre à nu, de le dépouiller de ce qui l'encombre sans oublier parfois que des pépins ou des peaux peuvent à leur tour parader sur la table sous une forme ou bien une autre, jusqu'aux radicelles des poireaux qui se mijotent avec amour. Et que dire des racines de persils ? Un pur régal !

N'oubliez pas les vieux légumes, ceux que la mode a laissé de côté comme nos salsifis qui n'ont jamais eu le vent en poupe, les bulbes de cerfeuil, les crosnes ou encore les cardes ou les blettes. Penchez-vous encore sur les légumineuses de chez nous en redonnant leurs lettres de noblesse aux pois cassés et aux flageolets.

Si vous voulez faire un tabac, réhabilitez le topinambour et le rutabaga, le panais et le merveilleux chou rave et faites place à toutes les cucurbitacées qui peuvent se conjuguer de mille et une manières. Pour terminer en beauté, le champignon mérite qu'on s'arrête pour lui offrir une place de choix tandis que la châtaigne peut attendre mieux qu'une simple farce.

Pour vos repas de fêtes, pensez aux saveurs d'antan et laissez donc choir tous ce qui vient à vous en prenant l'avion ou le bateau. Le local s'impose comme une évidence et le bio comme une certitude.

Illustration 3
© Pierre Brueghel l'Ancien

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