L'hypocrisie scolaire.
Il faut reconquérir le mois de juin nous affirment, péremptoires, nos chers décideurs, rois de la formule qui sonne bien ! Pourtant, derrière la façade, le marasme demeure, les derniers jours de juin tournent comme toujours à la farce tandis que le calendrier officiel, sans rire, prétend que l'échéance est programmée au 5 juillet.
Notre système est à revoir de fonds en combles en changeant vraiment tout. Ce mois qui voit partir un à un les élèves de nos classes dès qu'ils sont en collège est une gangrène qui instille un climat délétère dans les esprits des élèves. L'absentéisme est une norme, c'est même en cette fin juin un vœu même pas secret pour les professeurs totalement désarmés devant la totale démobilisation des élèves.
Tout participe à cette parodie pitoyable. Les conseils de classe sont bouclés. Pour les troisièmes, la lourde procédure d'orientation impose que ce soit fait début juin. Les élèves ne sont pas dupes, ils ont appris, dans cette société libérale, que tout travail mérite salaire. Quand il n'y a plus de notes, ce n'est plus la peine …
Les livres (pour ceux qui en disposent) sont rendus la semaine avant le brevet. Là encore, un nouveau signal est envoyé. C'est fini les amis, vous pouvez rester à la maison. Alors les plus indépendants, les plus rétifs à l'école, les moins craintifs entendent le message. Les uns après les autres, ils désertent la classe qui se vide tristement.
Bien-sûr, nous pouvons en profiter pour aller sur d'autres chemins avec nos derniers élèves. Ils sont peu nombreux, ils sont généralement bien plus sages. Mais croyez-vous qu'ils apprécient ce climat délétère ? Pensez-vous qu'ils n'aient pas eux aussi, l'envie de jouer les filles de l'air ? Heureusement, cette année, le temps morose réfrène les envies de fuite, car autrement, c'est parfaitement intenable !
Nous perdons notre temps, nos nous contentons de faire bonne figure et d'ouvrir nos classes pour maintenir la continuité du service. Pauvre de nous, que le temps est long quand personne n'a envie de travailler ! Et c'est ainsi que l'année se termine, effiloche devrai-je dire durant ces quelques jours qui confirment implicitement que l'école ce n'est pas très sérieux.
Nous signifions surtout que chacun, au fond, fait ce qui lui plait. Que tout ceci n'est que de pure forme, que l'absentéisme ce n'est pas très sérieux, qu'on choisit ses jours de présence et que rien vraiment n'entrave la volonté des élèves. J'enrage de toujours répéter les mêmes choses en ne voyant au loin que l'herbe qui poudroie et le soleil qui rougeoie !
Modifions radicalement notre organisation. Travaillons vraiment jusqu'à une date raisonnable, la plus tardive possible en juin puis libérons en même temps tous les élèves avec des classes pleines qui organisent un petit cérémonial de fin. Puis attelons-nous à toutes les tâches administratives : examen, bulletin, conseil de classe, dossiers d'orientation, commissions diverses et variées durant une quinzaine de jours sans élève mais pas sans travail.
Oh, il faudrait tout revoir, chambouler le bel ordonnancement administratif qui s'impose à tous et qui influence si gravement le fonctionnement de nos classes ! C'est impossible au pays de Courteline ! L'hypocrisie est préférable au courage de prendre le taureau par les cornes afin de ne pas laisser pourrir nos fins d'année.
J'ai pourtant l'intime conviction que ce lent délitement de nos classes influence négativement nos débuts d'années suivantes. D'ailleurs là encore, la rentrée est de plus en plus à la carte, des vacances se prolongent, des enfants arrivent quelques jours après les autres. Parfois, ce sont les mêmes qui sont partis les premiers. Et ainsi, le pli est pris et nos lascars de vivre une scolarité en pointillés sans que nous puissions véritablement agir contre ce fléau que nous avons initié.
Finalement leur.