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Billet de blog 27 septembre 2025

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La Loire sans une scène.

Illustration 1
© Christian Beaudin

Quoiqu'on prétende que les petits ruisseaux font les grandes rivières, il convient de raison garder lorsqu’un soliste de la parole tente de remonter le courant face à des torrents de décibels, dévalant la scène. Le combat est inégal, les uns paradent et sont les locomotives de la manifestation tandis que le malheureux n'est qu'un petit artiste de ru, tout juste sorti du fossé.

Le spectateur pêcherait-il par négligence lorsqu'il rechigne à pousser le bouchon plus loin pour aller à la rencontre de celui qui taquine les muses et réclame une attention de tous les instants. Le silence s'impose à son contact ce qui n'est guère la pratique habituelle de ceux qui baguenaudent ainsi, sans vraiment savoir ce qu'ils viennent chercher.

De la scène à la Loire, l'histoire et la géologie ont définitivement scindé le cours de cette union d'un passé lointain. Alors, celui qui se contente d'en rester aux rus, risque fort de se noyer dans un flot continu de bruits amplifiés qui viennent brouiller les écoutes et faire des nœuds si peu marins dans le fil de ses récits.

Même si de la noue voisine surgit une sorcière et quelques maléfices, le badaud se refuse à jouer les chalands pour accoster quelques instants, s'offrir de belles frayeurs ou bien se laisser porter dans les abysses d'une légende insondable. La parole se fracasse à un océan d'indifférence tandis que les vagues humaines viennent lécher les buvettes et les stands de bouffe. La nourriture spirituelle n'est que de peu d'importance quand l'estomac prend le pas sur l'esprit.

Le client se rue sur le fongible, il se fait commensal surtout pour les spectacles en plein air et aime à fréquenter les tréteaux en se pensant bien dans son assiette. Il y retrouve ses semblables qui goûtent avec force mastication et grandes lampées le seul menu qui vaille, celui d'un repas pris sur le pouce, histoire de passer la main.

Que faire pour attirer l'attention et gagner l'écoute de ces convives, force impassible d'une fête qui se fait plus aisément foire que concert. Même les camarades juchés sur le podium héritent fort peu d'une audition attentive. Ils se contentent de n'être qu'une toile de fond sonore, un décor qui sert de prétexte à la sortie.

Le pauvre va-nu-pieds se laisse marcher sur les arpions alors qu'il tente vainement de dérouler une aventure qui pour picaresque qu'elle puisse être, n'en demeure pas moins, un murmure qui se noie dans le brouhaha ambiant. Lutter à la fois contre la scène, la sonorisation et la foule bruyante est un combat perdu d'avance.

De vous à noue, si de la nue, tombe des hallebardes, c'est alors la grande débandade, le repli général sous les chapiteaux de toile sous lequel le cirque prend de l'ampleur. Plus rien alors ne peut se faire et l'artiste de ru range ses affaires et va se mettre au sec afin de sauver la face. Il peut se réfugier près de la seule pompe qui va à ses pauvres pieds sans rime ni raison : celle qui débite des bières par quart qui deviennent des demis.

S'il ne s'est pas fait mousser, il se réconfortera sans faux col en avalant à petites lampées une boisson aussi amère que son état d'esprit. La parole se disperse, la foule s'abrite sous bien des prétextes pour s'autoriser ainsi à ne pas prêter l'oreille à qui aimerait les convier à cette pratique des temps anciens qui n'est plus de mise aujourd'hui.

L'eau continuera de couler sous les ponts et, faut-il qu'il m'en souvienne, la joie venait toujours après la peine. Alors je ne désespère pas et retourne tenter de toucher les cœurs en me disant inlassablement :

Vienne la nuit sonne l’heure
Les jours s’en vont je demeure …

Toujours fidèle au poste et ancré dans ma foi en la puissance des mots, en dépit des apparences !

Photos de Christian Beaudin

Dédicace du livre : "Au gré du vent et des courants " lors du

Festival de Loire - ORLEANS

ce samedi 27 septembre à 17 h à l'arbre 67 avec

Vitalité Rurale le groupe

Illustration 2
© Christian Beaudin

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