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Billet de blog 29 septembre 2025

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Débattre le pavé.

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À contre-courant.

Illustration 1
© Jean_Yves Obert

« Vilain sur terre, seigneur sur l'eau ! » La devise des mariniers d'antan qui se décline de bien des manières, laisse peu de place à ceux qui vont battre le pavé, le pierré de notre quai en se situant dans un entre-deux qui échappe aux deux flots qui vont souverainement s'ignorer durant le Festival de Loire.

Les gens du fleuve se taillèrnt la part belle en effectuant une noria presque ininterrompue pour transporter de bonheur des spectateurs qui durent longuement patienter pour mériter un bref dépaysement total en effectuant le tour de la bassine sur notre beau chenal avec vue sur la ville. Durant cette parenthèse, les passagers échappent à la foule qui se pressera sur un bitume de toutes les sollicitations.

Les marchands sous leurs guitounes, les « véritables artistes » sur les podiums, les confréries et les associations se chargent de remplir leurs escarcelles ou leur mission en proposant tout ce que l'imagination humaine sait mettre au service des bonnes affaires, de la gourmandise et de l'appétence, de ce qui peut rapporter un flot d'argent à qui fait étalage de son savoir-faire ou savoir-recevoir tandis que les institutions font étalage de leur sens du service public.

Entre ses deux vagues humaines, un espace relativement inconfortable pour qui marche difficilement et inaccessible pour qui ne peut plus le faire. Sur ces pavés irréguliers, reconstitution historique d'un quai de la grande époque, les gueux vous proposèrent un aperçu des activités qui animaient jadis un port fluvial. Du matelotage au travail de l'osier, du charpentier naval au pêcheur de Loire, du fumeur de poisson au fabricant de cordages, de la voilière à la lavandière et bien d'autres encore, chacun s'activa pour donner l'illusion d'un temps qui n'est plus.

Les groupes scolaires durant les trois premiers jours ont constitué leur public préférentiel pourvu que les accompagnateurs aient préparé la sortie pour en faire un objet pédagogique (ce qui n'est hélas pas toujours le cas), les exposants eurent alors le plaisir de transmettre des informations ou de proposer des démonstrations. Ensuite, plus rares furent les visiteurs en quête de découverte. Le pierré devint alors un vaste lieu de déambulation, pour se préserver de la presse de l'allée marchande.

Plus loin, à l'écart du cœur de ce grand barnum, d'autres espaces se targuèrent eux aussi d'apporter connaissance, réflexion et évasion avec des dimensions non mercantiles. C'est l'honneur de ce Festival de faire une place à la poésie, la biodiversité, la science et l'Histoire, c'est plus encore un pari qui demande beaucoup d'engagement pour une maigre considération du grand public. Qu'importe, la motivation des acteurs de ces espaces est si grande qu'ils parvinrent à susciter l'intérêt de ceux qui échappent à la fièvre consumériste.

De mon côté, je me confinai au pierré pour évoquer l'histoire de la marine fluviale, ses petits métiers et les anecdotes qui s'y rattachent. À la manière d'un pêcheur qui jadis prêchait dans le désert, j'espérais attirer dans mes rets quelques badauds qui prendraient le temps d'écouter dans le tumulte d'une fête ou le bruit prend souvent toute la place. Il en va souvent ainsi, c'est la loi du genre.

Curieusement, il est une catégorie qui échappe toujours à cette gourmandise de la découverte. Paradoxalement, Orléans, capitale historique du vinaigre, ne fait pas exception à la règle ; les « huiles » évitent soigneusement de prendre le risque de se trouver en situation de démontrer leur ignorance sur le sujet. Ils préfèrent disposer de guides plus prévenants qui savent toujours leur épargner de se trouver le bec dans l'eau.

Je ne vais pas pousser le bouchon plus loin d'autant que ce sont des tonneaux qui roulèrent leurs bosses et leurs rouelles sur cet espace inconfortable aux escarpins et talons aiguilles pour qui entend vivre heureux auprès de sa bonde, en ouvrant la cannelle. Hélas, il y a peu de chance de voir couler des bulles pour remplir une coupe qui forcément sera loin des lèvres pour qui battit le pavé.

Illustration 2
© Jean_Yves Obert

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