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Billet de blog 25 août 2016

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Avec Henri PENA-RUIZ, levons un voile sur la laïcité et la liberté oubliées.

Par les temps qui courent où chacun se jette à la face des [vérités d'] opinions pour le moins tranchées, un petit rappel de quelques principes de laïcité et de liberté que nous offre le droit commun de notre République semble nécessaire. Les français musulmans comme les français non musulmans ont intérêt à réfléchir à ces principes factuels, légaux et éthiques, plutôt qu'à s'invectiver.

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Levons un voile sur la laïcité avec Henri Pena-Ruiz page 215 à 218 (folio actuel 2004) de Qu'est-ce que la laïcité  (la présentation par paragraphes a été modifiée pour facilité la lecture par rapport au livre NDLR)

[...] Le communautarisme islamique en raison d'une radicalité qu'exacerbe souvent la situation sociale, se décline dans une série de revendication symboliques, politique et juridique. Aujourd'hui, il s'agit d'obtenir partout le port du voile obligatoire. Demain la censure s'abattra sur les disciplines scolaires jugées trop subversives. Après demain, au nom de l'identité culturelle habilement thématisée comme refus du néo-colonialisme, c'est un code de statut personnel qui sera réclamé par les tenants des communautés, afin de faire exceptions aux lois républicaines qui font obstacle à la mise en tutelle.

En France, certains penseurs proches de l'UOIF (L'union des organisations islamiques de France) n'hésitent pas à taxer de "fondamentalisme " tout rappel des principes de la laïcité, appelée à se réformer pour faire droit aux revendications antilaïques.

« Il existe un état de reconnaissance réciproque et de respect mutuel qui ne peut se suffire de l'affirmation définitive et intransigeante d'un cadre laïque enfanté par une histoire à laquelle les musulmans n'ont pas participé...Penser que rien ne saurait permettre une telle reconsidération, c'est traduire littéralement un certain « fondamentalisme » qui confond une étape de la tradition française avec sa justification par l'absolu. »

Curieuse utilisation de la relativisation historique, dont la tradition islamique est quant à elle préservée: c'est au nom d'un code de statut personnel supposé inscrit dans le Coran qu'il est demandé à la laïcité de s'adapter, c'est à dire en fait de se nier elle-même en consacrant les exceptions à la loi commune. Il est manifeste ici qu'on dénie à la laïcité les valeurs fondatrices qui sont les siennes, et qu'on ne veut voir en elles qu'un dispositif juridique malléable, modifié au gré des rapports de force. L'argument selon lequel les musulmans n'ont pas participé à l'émancipation laïque atteste une singulière cécité. Cette émancipation n'a pas été en effet une affaire qui s'est jouée entre l'État et une religion déterminée, mais un processus plus général de double libération de l'État par rapport à toute tutelle religieuse, quelle quelle soit, et les institutions religieuses elles-mêmes par rapport à l'État.

En présence d'une telle attitude de certains penseurs religieux, la république laïque a pu sembler parfois flottante, en adoptant des formulations qui présentaient le risque de communautariser les citoyens de confession musulmanes. Ce fut le cas à la fin de l'année 1999, lorsque le ministère de l'Intérieur organisa une consultation destinée à aboutir à la mise en place d'un organisme représentatif des musulmans de France. Le libellé initial faisait état des « droits et obligations des fidèles du culte musulman en France ». Elle avait l'avantage de mettre l'accent sure la citoyenneté, et de faire de la religion une option, au lieu de lui river des personnes. La formulation changea très vite, au profit d'une référence aux « rapports entre les pouvoirs publics et le culte musulman de France ».

Comme le font remarquer à juste titre Michèle Tribalat et Jeanne-Hélène Kalterbach dans La république et l'islam , cette modification relève plus d'une démarche concordataire que d'une logique républicaine, puisqu'on se croit obligé d'ajouter des dispositions spécifiques à la loi commune, et qu'on force presque les citoyens de confession musulmane à se définir comme musulmans, comme si l'appartenance religieuse devenait le facteur identitaire exclusif. Plus grave, à la demande de l'UOIF, on fit disparaître du texte de la déclaration initiale, la référence à la liberté de changer de religion ou de conviction. On sait que dans la version intégriste de l'islam, l'apostasie est punie de mort.

Bref, la République s'était engagée dans une douteuse démarche destinée à obtenir une proclamation de fidélité d'une partie de ses citoyens, ce qui pouvait avoir quelque chose de stigmatisant. Si la loi commune et laïque est un fait qui s'impose à tous, pourquoi mettre ainsi le points sur les i pour certains. Et après quelques jours, elle passait de cette démarche de franche complaisance en refusant d'expliciter les conséquences du cadre du droit commun au regard de toute tentative de faire valoir des normes propres à une communauté religieuse. Ce refus peut se comprendre dès lors que la mention sélective de la liberté de changer de religion fait peser sur les citoyens de confession musulmane le soupçon d'être a priori ralliés à une version intégriste de l'islam, ce qui est évidemment faux. Mais dans ce cas la demande d'une proclamation de fidélité à la République est sans objet.

Pour la laïcité qui considère l'individu comme seul sujet de droit, le communautarisme est le danger majeur. (c'est moi qui souligne)

L'idéal laïque implique une culture de la distance réflexive dans l'affirmation des convictions, mais n'exige aucune uniformisation. En ne reconnaissant que l'individu comme seul sujet de droit, elle entend le délivrer par principe de toute tutelle exercée au nom de l'identité religieuse, voire de l'identité culturelle. Il s'agit de préserver la singularité, et le libre choix des références identitaires par lesquelles elle se construit. Le communautarisme est à cet égard un véritable défi, aggravé par les effets psychologiques et sociaux des tensions et des conflits qui se jouent au niveau international. Il tend à construire une communauté exclusive, cimentée par une allégeance à un credo qui devient vite une soumission à des hommes autoproclamés guides. Ainsi se met en place un système assujettissement, voire de destruction des libertés individuelles. On passe alors souvent de façon insensible, de la solidarité communautaire, qui réchauffe et réconforte, à la dépendance communautariste. L'émancipation laïque n'est véritablement une alternative à un tel processus que si elle s'assortit d'une amélioration des conditions d'existence.

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