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Une réalité inquiétante dans un contexte de reprise d’influence considérable de l’institution financière internationale. Pour déconstruire le discours de la directrice générale du FMI, nous commenterons quelques extraits de cet entretien et nous nous appuierons sur le rapport annuel 2023 du FMI.
Extrait 1 : L’hypocrisie de Kristalina Giorgeva
Marie Charrel : La tentation protectionniste monte sur tous les continents. La mondialisation basée sur le libre-échange est-elle morte ?
Kristalina Giorgeva : « Nous avons trop insisté sur les bénéfices de la mondialisation. Ils ont été considérables : sur les trois dernières décennies, l’économie mondiale a triplé, en particulier au profit des économies en développement qui, elles, ont quadruplé, et il en a résulté une incroyable réduction de la pauvreté. Mais tout le monde n’en a pas profité. Trop longtemps, l’attention n’a pas suffisamment porté sur ceux dont les emplois et les moyens de subsistance se sont évaporés, parce que les mécanismes de compensation ont été insuffisants. Cela a créé un terrain fertile pour les mouvements altermondialistes et le populisme. »
Dans cet extrait, Kristalina Giorgeva semble faire un mea culpa des politiques du FMI appliquées ces dernières décennies.
Revenons d’abord sur ce qu’elle avance au début du passage. Si le taux d’extrême pauvreté (personnes vivant avec moins de 1,90$ par jour) dans le monde est passé de 36% à 10% entre 1990 et 2015, 700 millions de personnes vivent encore avec des revenus inférieurs à ce seuil extrêmement bas [1]. Si, comme le dit la directrice générale du FMI, les « économies en développement » ont quadruplé, nous sommes en droit d’exiger qu’elles ne laissent personne dans l’extrême pauvreté. Ce qu’elle ne dit pas, c’est que depuis la pandémie de Covid-19, 500 millions de personnes risquent de tomber dans la pauvreté [2], et que 350 millions de personnes dans 79 pays sont en situation d’insécurité alimentaire aiguë [3]. C’est inacceptable dans une économie mondiale aussi riche avec autant de milliardaires et d’inégalités.
Comme l’écrivent Éric Toussaint et Pablo Laixhay : « Selon le dernier rapport de la Banque mondiale, entre 2019 et 2022, 95 millions de personnes supplémentaires sont tombées dans l’extrême pauvreté au niveau international. D’autre part, selon le World Economic Outlook du FMI paru en avril 2023, alors qu’en 2008, 80 ans étaient nécessaires pour réduire de moitié la différence de revenus par habitant entre les pays du Sud et les pays du Nord, le calcul actualisé annonce aujourd’hui 130 ans nécessaires pour la même avancée. Ces deux constats soulignent la détérioration des inégalités entre le Nord et le Sud, entre les classes capitalistes et les classes populaires, entre les pays dits « en voie de développement » et les pays dits « développés » et la faillite de ces deux institutions censées lutter contre la pauvreté et pour la stabilité économique mondiale. »
De plus, ce semblant d’autocritique est un trompe-l’œil absolu : le FMI, qui revient en force avec 300 milliards de dollars prêtés à 96 pays depuis la pandémie de Covid-19 [4], continue d’appliquer des recettes néolibérales qui creusent les inégalités.

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Prenons l’exemple sri lankais. Après son défaut de paiement sur sa dette extérieure au printemps 2022, le gouvernement sri lankais a trouvé un accord avec le FMI en mars 2023, pour un prêt de 3 milliards de dollars US qui s’étalera jusqu’en 2027 [5]. Comme le FMI le fait depuis les années 1980, il a imposé au gouvernement des mesures d’austérité désastreuses pour la population, et en priorité pour les femmes, les ouvrièr·es, et les plus pauvres : réduction des dépenses publiques, hausse de la taxe sur la valeur ajoutée de 50%, qui frappe les plus pauvres de façon beaucoup plus violente, réduction des subventions sur l’électricité, sur le gaz et le kérosène. 500 000 ménages ont été déconnectés du réseau électrique. Les agriculteur·ices et les pêcheur·euses ont subi de plein fouet la hausse de 400% du prix du kérosène, devant par exemple réduire leurs sorties en mer, donc leurs revenus.
Le Sri Lanka n’est qu’un exemple des conditionnalités imposées par le FMI dans de très nombreux pays depuis la pandémie de Covid-19. Celles-ci sont les mêmes que dans les années 1980, qu’en Grèce dans les années 2010… Contrairement au discours trompeur de Kristalina Giorgeva, le FMI n’a pas changé et continue d’accroître les inégalités par ses politiques néolibérales destructrices.
Extrait 2 : Aucun changement souhaitable ne viendra du FMI et de ses dirigeant·es
Kristalina Giorgeva : « Notre conseil aux pays est de ne pas jouer la carte de l’intérêt national contre les autres, mais de réfléchir aux mécanismes permettant de poursuivre l’intégration mondiale et d’équilibrer les risques. Car une plus grande fragmentation du commerce mondial aurait une conséquence très claire : nous serions tous plus pauvres et moins en sécurité. »
Marie Charrel : « Quel pourrait être le coût, précisément, de cette fragmentation ? »
Kristalina Giorgeva : « Selon les scénarios, il pourrait atteindre entre 0,2 % et 7 % du produit intérieur brut (PIB) mondial, 7 %, le cas extrême, équivaudrait à exclure deux pays comme l’Allemagne et le Japon de l’économie mondiale. Pour limiter ce risque, nous devons résister à la tentation d’imposer des barrières commerciales, dont le nombre est passé de 500 environ en 2017 à 2 000 en 2019 et 3 000 en 2022. […] »
Ces deux passages montrent à merveille les priorités du FMI et de sa directrice générale : préserver le commerce mondial et la croissance, deux des principaux facteurs de destruction des écosystèmes, d’émissions de gaz à effet de serre et d’extraction des ressources.
Le commerce international pousse les pays à se spécialiser dans la production d’un ou plusieurs produits pour lequel ils seront les plus compétitifs. Pour les pays des Suds, c’est synonyme d’exportation d’une matière première produite en masse, au prix de l’appauvrissement des sols, de l’abandon de toute souveraineté alimentaire (car le pays importe ce qu’il ne produit pas ou plus), d’un extractivisme qui détruit le vivant. Ces pays sont encouragés à exporter toujours davantage pour se procurer un maximum de devises permettant d’importer de rembourser la dette. Ils s’embarquent donc dans une course effrénée à la croissance, multipliant les effets décrits plus haut et l’épuisement des ressources.
Cette course à la production et à l’échange international, basée sur le PIB comme indicateur de référence de la santé d’un pays, génère également une pollution énorme aux gaz à effet de serre, cause principale du réchauffement climatique. En effet, ce système génère une quantité astronomique de déplacement en avion, en porte-conteneurs, en camion. Il produit des tonnes et des tonnes de plastique. Ce système, en poussant à la production de tonnes de produits absolument inutiles qui s’échangent entre tous les endroits du monde, pollue et épuise les ressources de la planète.
Lire aussi : L’ABC du Fonds monétaire international (FMI)
On voit bien dans ce passage que pour la directrice générale du FMI, rien ne justifie le renoncement à la mondialisation néolibérale et à la course vers une croissance sans limite. Elle justifie la nécessité de la poursuite du commerce mondial par un risque de baisse du PIB si des pays imposaient trop de barrières douanières. Pour elle et pour le FMI, la catastrophe ultime est un ralentissement de la croissance et du rythme du commerce international.
Or, un ralentissement du commerce international couplé avec des politiques nationales ou régionales allant dans le sens d’une indépendance alimentaire (diversification des productions agricoles et des industries via la mise en place de barrières douanières) serait salvateur pour les populations des Suds, pour la planète et les espèces qui y vivent. Les États des Suds sortiraient de leur dépendance aux importations, aux exportations, aux devises extérieures, et aux conditionnalités du FMI et de la Banque mondiale.
De la même manière, un ralentissement de la croissance combiné à une politique de réduction des inégalités, de redistribution via une forte taxation des plus riches et des grandes entreprises [6] serait également une très bonne nouvelle pour la planète et pour la grande majorité de la population.
Les deux réalités que nous venons de décrire sont appelées par Kristalina Giorgeva « la carte de l’intérêt national contre les autres ». La directrice générale du FMI préfère la bataille de tous contre tous, avec des gouvernements qui sacrifient toujours plus les conditions de vie de leurs populations pour être compétitifs, pour pouvoir exporter leurs marchandises en épuisant les ressources et en détruisant la planète. L’extrait suivant le montre très bien :
Kristalina Giorgeva : « Un gouvernement souhaitant faire monter en gamme son industrie peut par exemple agir en rendant son économie plus attractive pour les investissements plutôt qu’en instaurant des barrières commerciales, au mépris des règles de l’Organisation mondiale du commerce – ce qui se révélerait négatif pour le monde. »
Sans avancer aucun argument, pas plus que dans les extraits précédents, Kristalina Giorgeva affirme que pour développer une industrie plus prospère, un État doit devenir encore plus compétitif, au mépris de la taxation des plus riches et des conditions de travail des travailleur·euses. Or, l’Histoire montre tout l’inverse. Les États occidentaux tels que l’Allemagne se sont développés en protégeant leurs jeunes industries, pour qu’elles puissent grossir sans concurrence internationale et rejoindre le marché international une fois qu’elles avaient atteint une taille suffisante. C’est exactement ce qu’a fait la Corée du Sud, pourtant érigée en exemple de « développement » par la Banque mondiale et le FMI.
Lire aussi : La Corée du Sud et le miracle démasqué
La Corée du Sud est un des seuls États qui n’a pas suivi le modèle préconisé par ces deux institutions, à savoir l’industrialisation par substitution d’exportation (adaptation des activités exportatrices selon la demande du marché mondial), mais un modèle d’industrialisation par substitution d’importation (fabriquer sur place ce qu’on importait avant) [7]. « Grâce » à la très forte intervention de l’État, l’application de barrière douanière, la fixation des prix par l’État pour protéger les industries naissantes, le fort soutien des États-Unis, la surexploitation des paysan·nes et des ouvrier·es et une série d’autres mesures, la Corée du Sud a réussi à développer des industries fortes en valeur ajoutée (à quel prix humain et environnemental ?). Le pays s’est donc appuyé sur de nombreuses mesures déconseillées par la Banque mondiale et le FMI (intervention de l’État, fixation des prix, barrière douanière, contrôle de l’État sur le secteur bancaire, planification, contrôle sur les changes et sur les mouvements de capitaux…) pour devenir un « modèle de développement ». Inutile de préciser que ces institutions ont modelé un autre récit pour faire croire que la Corée du Sud avait « réussi » parce qu’elle avait suivi leurs conseils.
Éric Toussaint sur le cas de la Corée du Sud pendant la conférence d’ouverture du contre-sommet de Marrakech : Ici.
Donc, contrairement à ce qu’avance Kristalina Giorgeva, un gouvernement souhaitant faire monter en gamme son industrie doit instaurer des barrières douanières pour que ces industries aient le temps de se développer sans affronter la concurrence des industries similaires du monde entier [8]. C’est une évidence. Comment une industrie naissante pourrait-elle affronter des multinationales qui réalisent des économies d’échelle gigantesques en produisant des quantités astronomiques ?
Nous devons par ailleurs nous interroger sur la pertinence d’un développement tel que mis en place par la Corée du Sud, au regard des besoins des populations d’une part et de la destruction de la planète de l’autre.
Cet extrait vient encore confirmer que la directrice générale du FMI et son institution sont totalement intoxiquées à l’idéologie néolibérale, au mépris de toute logique, et que nous ne pouvons absolument pas leur faire confiance pour mettre en place une bifurcation écologique efficace et réduire les inégalités. Ces personnes continueront à appliquer leurs schémas sans réfléchir et mèneront la planète et le vivant à leurs pertes. Ces institutions doivent être combattues et remplacées par d’autres, qui permettraient la mise en place de réparations versées par les pays du Nord vers les pays des Suds pour l’ensemble des dégâts commis pendant la période coloniale et après.
Extrait 3 : Droit dans le mur
Marie Charrel : N’y a-t-il donc jamais de bon protectionnisme, ne serait-ce que pour protéger l’environnement, ou éviter que des produits ne fassent trois fois le tour de la planète avant d’être vendus ?
Kristalina Giorgeva : « Nous devons tirer les leçons de l’histoire. Celle-ci nous a appris que la division du travail entre les pays est bénéfique, car elle permet d’apporter de la nourriture, des biens et des services à tous, et ce, à moindre coût. Mais ces échanges doivent prendre en considération le bien-être de la société. Il convient de réfléchir aux chaînes d’approvisionnement mondiales en tenant compte de leur empreinte carbone, mais là encore, en prenant garde également à l’ampleur des préjudices que leur restructuration pourrait causer à des travailleurs ailleurs sur la planète. Il est possible d’accélérer la décarbonation de nos sociétés sans engendrer de tels préjudices. Des subventions à la R&D permettant aux technologies vertes de pénétrer plus rapidement l’économie sont, par exemple, une bonne utilisation de l’argent public. »
Cet extrait nous montre bien que le FMI est très loin de toute remise en question sur la question écologique et climatique. Kristalina Giorgeva continue tout droit les yeux fermés en espérant que la technologie sauve la planète. Hors de question pour elle de réduire les échanges internationaux alors même qu’elle reconnaît à demi-mot qu’ils sont responsables de la catastrophe climatique. Hors de question de renoncer à quelques points de croissance comme nous l’avons vu précédemment. Hors de question car cela causerait des « préjudices » aux travailleur·euses. En poussant à la concurrence des travailleur·euses du monde entier entre elleux, aux coupes dans les budgets sociaux, à la destruction des services publics de santé et d’éducation, aux privatisations, le FMI, depuis des décennies, ne cause pas seulement des « préjudices » aux travailleur·euses, il détruit leurs vies.
Se mobiliser : Manifestation contre l’austérité le 12 décembre 2023 à Bruxelles
On voit ici que le FMI a intégré l’urgence climatique dans son discours néolibéral, en affirmant que cette crise sera résolue en continuant à produire plus, mais vert grâce aux « technologies vertes ». Une vision absolument illusoire étant donné l’urgence de réduire les émissions de gaz à effet de serre, et compte tenu de la baisse des investissements publics dans la recherche fondamentale. Même la découverte par magie d’une source d’énergie 100% propre (ce qui est totalement illusoire) ne résoudrait pas les problèmes liés à l’extractivisme, aux monocultures agricoles d’exportation qui appauvrissent les sols et les populations.
Pourquoi cet entretien est grave ?
Ce qui est grave, c’est que cet entretien de Kristalina Giorgeva est le reflet d’une institution qui a récupéré un pouvoir considérable dans le monde en multipliant les prêts depuis la pandémie de Covid-19.
En effet, le FMI, institution absolument déconnectée de l’urgence climatique, obnubilée par la croissance (mot qui revient 23 fois dans le dernier rapport annuel du FMI), par l’approfondissement du système extractiviste et l’accroissement des échanges internationaux, revient en force, profitant de la crise de la dette que traversent les pays des Suds depuis la pandémie. Dans le rapport annuel 2023 du FMI, nous pouvons lire : « D’autres priorités sont également essentielles, notamment le renforcement des échanges commerciaux [9] ».
L’institution est logiquement en phase avec sa directrice générale.
Ce rapport nous apprend également que le FMI a prêté 300 milliards de dollars à près de 100 pays entre le début de la pandémie de Covid-19 et le 30 avril 2023. Ces prêts n’ont pas seulement été « accordés » pour combattre directement la pandémie, puisque depuis le début de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, le FMI a approuvé 41 demandes émanant de 37 pays membres pour 128 milliards de dollars [10]. À chacun de ces prêts sont associées et conditionnées des mesures d’austérité : baisse des budgets de la santé, de l’éducation, privatisations, baisse des subventions publiques, hausse de la TVA, spécialisation vers des monocultures d’exportation… À chaque prêt, la population du pays paie un peu plus le prix de la domination de l’idéologie néolibérale incarnée par des institutions telles que le FMI et la Banque mondiale. Dans les termes du FMI, ça donne ça : « Le FMI recommande aux gouvernements les mesures d’ajustement nécessaires. Ces activités guident le système monétaire international dans la poursuite de son objectif : faciliter les échanges de biens, de services et de capitaux entre les pays et, partant, soutenir une croissance économique saine [11]. »
Lire aussi : Déclaration de Marrakech : 79 ans d’exploitation et de destruction néocoloniale de la BM et du FMI, ça suffit ! et Les revendications issues du contre-sommet de Marrakech : Dette, microcrédit, justice climatique, souveraineté alimentaire, mouvements sociaux, migrations...
Il n’y aura pas de futur souhaitable venant du FMI et de la Banque mondiale, qui ne changeront pas car les États-Unis y possèdent un droit de véto sur toute décision importante. Nous avons besoin d’alternatives au FMI et à la Banque mondiale, d’institutions démocratiques soutenant des alternatives féministes, antiracistes, radicalement écologistes. Une banque du Sud qui prête à du 0% pour des projets allant dans le sens d’une telle bifurcation en est un exemple.
Par Maxime Perriot
L’auteur remercie Christine Pagnoulle, Sylvie Cartaillac, Fiona Vanston, Thérèse Di Campo et Éric Toussaint pour leurs relectures et les compléments apportés
[1] ONU, « Objectifs de développement durable, « Objectif 1 : Éliminer la pauvreté sous toutes ses formes et partout dans le monde », https://www.un.org/sustainabledevelopment/fr/poverty/
[2] Ibid.
[3] Rapport annuel du FMI 2023, https://cdn.sanity.io/files/un6gmxxl/production/96f729bf7054033df58b50abeea30bfe268df1d5.pdf
[4] Ibid
[5] Balasingham Skanthakumar, « Sri Lanka : Renflouer les créanciers », CADTM, 24/10/2023, https://www.cadtm.org/Sri-Lanka-Renflouer-les-creanciers
[6] Cette politique de taxation devrait être associée à un contrôle des mouvements de capitaux. Par exemple, une interdiction de toute transaction internationale au-dessus d’un certain montant.
[7] Éric Toussaint, La Corée du Sud et le miracle démasqué, CADTM, 15/06/2020, https://www.cadtm.org/La-Coree-du-Sud-et-le-miracle-demasque
[8] Sur ce sujet, voir les écrits de Friedrich List, qui a théorisé le « protectionnisme éducateur ».
[9] Ibid, p.22.
[10] Rapport annuel du FMI 2023, https://cdn.sanity.io/files/un6gmxxl/production/96f729bf7054033df58b50abeea30bfe268df1d5.pdf
[11] Rapport annuel du FMI 2023, p.25, https://cdn.sanity.io/files/un6gmxxl/production/96f729bf7054033df58b50abeea30bfe268df1d5.pdf