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Billet de blog 2 mai 2024

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Touche pas à Israël, s... !

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Surtout, parler des vilains étudiants qui brandissent des pancartes antisémites, qui ne savent pas ce qu'est un génocide, qui sont très très minoritaires, qui expriment des slogans de détestation envers Israël, envers les Juifs. Surtout, inviter des commentateurs qui appuient  en boucle sur les dérives idéologiques douteuses de certains étudiants, qui ne parlent jamais de la longue histoire du colonialisme sioniste, des pratiques indignes ou criminelles des gouvernements israéliens qui se sont succédé depuis la création de leur Etat, ont poursuivi les violences sociales, physiques, envers les Palestiniens, et ont approfondi  la séparation, la ségrégation des communautés. Surtout, ne pas parler du financement du Hamas à coups de millions par Netanyahou.  Surtout, parler à chaque fois de cette extrême-gauche qui fricoterait plus que jamais avec l'antisémitisme, et taper, taper inlassablement sur les élus de la France Insoumise qui évitent de qualifier les actes du 7 octobre comme des actes terroristes, pour que la France entière finisse par les voir comme de dangereux apologistes de la violence, et finalement, des complices de tout ce mal.

Mille deux cents personnes tuées le 7 octobre, d'autres violentées de manière abominable : c'est horrible, tout humain normalement constitué vous le dira. Ces morts-là, presque toute la presse, un maximum de radios et de télés les ont rendues bien plus horribles, bien plus monstrueuses, bien plus indéfendables que les autres, comme lors du fameux 11 septembre. Celles qui ont suivi, les trente ou quarante mille de la bande de Gaza, les 14.000 enfants tués, en particulier, n'ont pas du tout le même poids pour tous ces gens.  Cette fois, la masse écrasante des hommes et des femmes qui ont le privilège de parler à des millions de citoyens,  qui incendient les très rares représentants politiques refusant la caricature idéologique, ont préféré dire la plupart du temps, chacun à leur manière, que le gouvernement israélien était allé "trop loin" :  Quelle est donc, pour toutes celles et ceux qui se sont exprimés de cette manière, la limite acceptable de morts Palestiniens ? 

Idéologie, encore et toujours. Manque total d'aspiration à la justice, à l'égalité des êtres humains.

Surtout, ne pas parler d'histoire, de colonisation, de domination, des mille et une raisons des explosions de violence. Celles-ci ont, d'ailleurs, plus de cent ans d'âge, et elles ont une histoire qu'il faut connaître en détail pour se permettre de parler intelligemment sur la question. Le 7 octobre est loin d'être la première d'entre elles, et très probablement, comme très malheureusement, pas la dernière. Préférer plutôt tourner le dos à cette cruelle réalité en affirmant le droit d'Israël à se défendre, en rappelant parfois les  malheurs de l'Holocauste, cette abomination dont les Arabes ne sont en rien responsables, en évoquant à longueur de journée le fléau de l'antisémitisme, son inquiétante augmentation. Surtout, ne pas employer de mots choquants pour parler des dirigeants israéliens, Netanyahou en tête, et réserver les pires insultes publiques à Poutine, Xi Jinping, voire Trump, ou d'autres chefs du monde tout aussi imbéciles que corrompus, mais contre lesquels il est implicitement permis de se défouler sans entrave.

Israël est une démocratie, bien sûr, et n'a rien à voir avec un régime autoritaire et détestable. Il y a des élections et on n'oblige personne à voter depuis l'indépendance pour des dirigeants qui poursuivent inlassablement le sale boulot des premiers colonisateurs sionistes. Il y a des cartes d'identité différentes selon que vous êtes Juif, Palestinien des territoires occupés ou non, c'est Israël qui décide, comme de savoir si vous allez avoir le privilège d'une carte d'identité, d'une plaque d'immatriculation de telle ou de telle couleur, pour établir des catégories plus ou moins respectées de citoyens. Israël, c'est une démocratie qui compte des "Territoires occupés", où l'accès des Palestiniens à l'eau est contrôlé et limité par le pouvoir colonial, où le gouvernement hébreu peut couper à loisir l'électricité, le carburant, vous contrôler, vous empêcher l'accès de ceci ou de cela, et en dernier ressort, vous priver de nourriture, si certains des vôtres se sont très mal comportés envers des Juifs, innocents ou pas.  Israël, c'est une démocratie où les organisations juives et sionistes ont beaucoup de prérogatives.  Où les Arabes israéliens n'ont pas le droit d'administrer leurs propres écoles, tandis qu'à l'intérieur de la communauté juive, il existe différents systèmes d'éducation qui apprennent l'histoire glorifiée des Juifs, pas celle des Palestiniens. Où les habitants palestiniens de Jérusalem-Est ont le droit de voter aux élections locales mais pas nationales. Où les Juifs peuvent construire encore et encore des colonies sauvages, pour accaparer encore plus de terres aux indigènes, des villages modernes fermés hermétiquement, certains bénéficiant de la protection de l'armée, d'un réseau électrique privé et bien d'autres services inaccessibles aux habitants arabes alentour : Dans certains pays, on appelle ça de l'apartheid.

Cette liste, à caractère éminemment démocratique, pourrait être allongée indéfiniment, mais j'ai trop de dégoût pour la continuer. Envers ceux qui entretiennent ces profondes injustices. Envers tous les ignares, tous les cuistres, tous les idéologues qui se sont multipliés partout dans les médias, polluent l'espace public et empêchent d'éclairer les citoyens sur la réalité des choses. Par ignorance. Par lâcheté. Par hypocrisie. Par idéologie, surtout. 

P.S : Pour tous ceux qui n'ont pas le temps ou pas le désir de lire des dizaines de livres sur la question, j'ai décidé de consacrer une synthèse la plus documentée possible à l'histoire de la tragédie palestinienne, qu'on peut lire ici  :

LE LIVRE NOIR DU SIONISME (I) Introduction | Le Club (mediapart.fr)

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