Comme en 2015, la presse suisse pèse ses mots et évoque suite aux résultats des législatives en Suisse « un triomphe de l’UDC ». Pardon? Parlons-nous ici réellement d’une simple victoire comme on parlerait d'un score en foot ? Je dirais plutôt un véritable retour en arrière !
Tandis que tous les journaux parlent déjà de « tactique pour le second tour aux Etats », de « bras de fer pour un siège gouvernemental » ou encore de « réveil difficile », personne ne semble réellement s’émouvoir du fait que la Suisse persiste et signe: le pays est du côté des populistes. Pire, la Suisse est nationaliste, europhobe et raciste.
Certes, il est facile de cacher ces tendances xénophobes sous de fausses appellations; ainsi, il est plus politiquement correct de dire que l’UDC est un parti « conservateur » ou « agrarien ». Nos voisins européens, eux, ne s’y laissent pas prendre, à l’instar de Franceinfo qui titrait dimanche : « Législatives en Suisse : la droite populiste en tête »[1]. Du côté du Monde, on reste perplexe devant ce résultat qui contraste avec le fait que « les Suisses sont parmi les plus riches au monde, avec un taux de chômage d’environ 2 % et un PIB par habitant très élevé » [2].
En résumé, la Suisse n’a ni immigration de masse, ni chômage, ni crise économique, mais elle se barricade tel un pays accablé de tous les maux. Quant aux véritables enjeux que sont ceux du changement climatiques ou des droits sociaux, ils sont sciemment occultés.
Outre le manque d’émotion suscité dans la presse par les résultats de ce dimanche, ce qui me paraît le plus révoltant, c’est le manque de rébellion de la part de la population. Où sont les jeunes à qui le pays prépare un brillant avenir ?
Car c’est bien moins d’Europe, moins d’écologie et plus de chômage qui sont désormais les perspectives offertes à la nouvelle génération, car comme l’a joliment exprimé la RTS, entre la fin du mois et la fin du monde, les Suisses ont tranché pour la première option. Et où sont les femmes à qui l’UDC promet un fabuleux destin derrière les fourneaux à s’occuper des enfants ? Car c’est bien un retour en arrière sur les droits des femmes que visent notamment deux initiatives en cours de l’UDC pour réduire le nombre d'avortements. [3]
Au vu de ces différents constats, il est clair que nous allons au-devant de temps difficiles pour les jeunes, pour les femmes, pour la communauté LGBT, pour les étrangers et pour l’action climatique en Suisse. Mais il n’est pas trop tard pour s’engager, pour aller voter et pour exprimer ses opinions. Car ce ne sont pas les valeurs de l’isolement, de la peur et du mépris que je souhaite pour mon pays, mais celles de l’ouverture, de la solidarité et du partage, valeurs que nous partageons avec les Européens.
Enfin, nous avons le devoir d’aider à trouver des solutions, de participer à la création d’une démocratie européenne plutôt que d’adopter la posture de l’observateur critique et détaché, qui est souvent celle du lâche. Car n’y a-t-il pas plus grande lâcheté que de vouloir quitter le navire qui coule quand on aurait les moyens de le maintenir à flot ? Alors non, je ne renoncerai pas à m’engager pour nos valeurs et pour l’Europe et j’encourage chacune et chacun à lutter pour ses libertés – il n’est jamais trop tard pour cela.
[1] https://www.francetvinfo.fr/elections/legislatives-en-suisse-la-droite-populiste-en-tete_6139638.html
[2] https://www.lemonde.fr/international/article/2023/10/22/en-suisse-la-droite-populiste-largement-en-tete-aux-elections-legislatives-avec-29-2-des-voix_6195990_3210.html