Le Burkina Faso, ou “patrie des hommes intègres” en langue moré et dioula est pris dans une spirale de violences qui ne lui laissent aucun répit. Alors que les médias nationaux sont sous haute surveillance, que la chaîne de télévision France 24 et Radio France internationale, très suivis, sont interdits, que des correspondants étrangers ont été expulsés, l’Agence de Presse du Burkina publie chaque jour le bulletin de ses victoires contre les groupes djihadistes; lesquels occupent désormais des portions entières du territoire national et essaiment vers les pays voisins. Des informations au ton martial, difficilement vérifiables, destinées à remonter le moral des troupes et des milliers de Volontaires pour la Défense de la Patrie (VDP) qui les ont rejoints.
Ainsi, une dépêche de l’Agence de presse du Burkina, officielle, datée du 22 avril relate-t-elle que “l’armée burkinabè a fait feu sur des terroristes en fuite vers la frontière malienne, décimant les assaillant et leur importante logistique”. Avec, en guise de conclusion, une recommandation adressée aux “égarés qui ont rejoint les groupes armés terroristes”, priés de “déposer les armes immédiatement ou de périr”. Une réthorique guerrière qui illustre l’état d’exaspération des militaires au pouvoir, avec, à leur tête, le président Ibrahim Traoré, depuis le coup d’Etat de septembre 2022. Les attaques incessantes dont ce pays fait l’objet ont propulsé le Burkina Faso à la 2e place des pays les plus affectés par le terrorisme à l’échelle mondiale, derrière l’Afghanistan, selon l’Indice mondial du terrorisme 2023, un rapport publié par l’Institut pour l’économie et la paix.
Un drame particulièrement meurtrier s’est déroulé le 15 avril dernier, après une nouvelle attaque de djihadistes, qui a coûté la vie à quelque 40 militaires. Cinq jours plus tard, le village de Karma était réduit en cendres par des hommes portant l’uniforme de l’armée nationale. Le 1er mai, des survivants de ce massacre qui a coûté la vie à quelque 150 personnes, ont témoigné, lors d’une conférence de presse, de l’horreur qui s’est abattue sur eux, avec des exécutions sommaires d’hommes, de femmes, d’enfants, de “bébés morts sur le dos de leurs mères exécutées”. Dans cette véritable guerre menée par l’armée burkinabè contre des groupuscules djihadistes se réclamant d’Al Qaida et de l’Etat islamique, la communauté peule paie un lourd tribut, accusée qu’elle est de sympathies à l’égard des “terroristes”. Mais lors du massacre de Karma, la plupart des victimes appartenaient à l’ethnie majoritaire des Mossi.