Le mois du ramadan est une période de consommation intense, durant laquelle les promos commerciales se multiplient.
“Réalisez votre rêve et gagnez un voyage à la Mecque”, peut-on lire sur les grands panneaux qui bordent les rues de Niamey, la capitale du Niger. En proposant à ses clients de gagner par tirage au sort un pélerinage à La Mecque, cette compagnie de téléphonie mobile fait fort dans la promo en ce mois de ramadan. Et elle n’est pas la seule…
C’est que le ramadan, trente jours de jeûne, de prières et de recueillement pour les musulmans du monde entier, est une période d’intense consommation, avec des séances prolongées de shopping dans les boutiques et les (super)marchés. La période du carême représente de fait une véritable aubaine commerciale, au même titre que Noël, Pâques, ou d’autres fêtes religieuses.
Pas question donc pour les marques et les enseignes de la grande distribution, de la restauration rapide, des banques, des compagnies de téléphonie mobile de passer à côté de ce juteux marché. La lune, érigée en symbole du Ramadan par les créatifs des agences de pub, figure sur tout leur matériel promotionnel, et accompagne leurs voeux “pour un mois de don et de partage”, à l’orientation très marketing.
La succursale d’Ikea à Dubaï offre ainsi des menus spéciaux qui permettent de rompre le jeûne dans ses restaurants; et une publicité – sur laquelle une assiette bleue d’Ikea forme un croissant de lune en recouvrant partiellement une assiette blanche – souhaite un bon ramadan à ses clients. Quant à Coca-Cola, la firme diffuse dans les pays arabes un tout nouveau spot publicitaire durant ce mois saint, qui met en scène un grand-père dont le petit-fils lui crée un compte Facebook, censé réunir les générations. A l’instar de la célèbre boisson américaine, très présente au moment de la rupture du jeûne.
Dans un contexte de forte augmentation des prix et de précarité économique, les publicités, dont les budgets explosent durant cette période, redoublent d’offres alléchantes, mettent l’accent sur les prix cassés, les promotions “spécial ramadan”, qui poussent les gens à consommer et à s’endetter encore davantage… Pourvu que la fête soit belle lors du repas qui marque la rupture du jeûne, juste après le coucher du soleil, pris en famille ou entre amis; et celui qu’on prend à l’aube, avant d’entamer une nouvelle journée sans boire ni manger.
Les couloirs et les stations du métro parisien n’échappent pas aux publicités créées spécialement pour l’occasion : “Partagez la joie du ramadan” proclame ainsi la société de transfert d’argent Western Union, qui promet de doubler le montant transféré "pour un gagnant par jour". Tandis qu’une société de téléphonie mobile offre des forfaits gratuits vers l’Algérie, le Maroc et la Turquie au moyen d’une affiche géante, sur laquelle une femme souriante, en hijab, proclame : “Je peux gassar sans compter”, le terme “gassar” voulant dire “discuter, prendre du bon temps” en arabe du Maghreb.
Les chaînes de télévision du Maghreb et du Moyen-Orient vendent à prix d’or des spots de pub conçus spécialement pour cette période de l’année, qui atteint des pics d’audience. Au Niger, il faut ingurgiter plus d’une demi-heure de publicité avant le journal télévisé. A tel point que des voix s’élèvent pour demander un retour à davantage de retenue. Pour qu’après une longue journée passés sans boire ni manger, le moment de la rupture du jeûne, l’iftar, demeure un moment de calme et de sérénité : quelques dates, un verre de lait ou de thé, un peu de bouillie de mil à l’heure où le soleil se couche.
Mais la fièvre consumériste reprend rapidement le dessus. Le premier repas du soir se prend souvent devant le poste TV, où les familles se réunissent pour suivre les feuilletons égyptiens ou syriens produits spécialement pour être diffusés durant le mois sacré. D’incroyables rebondissements et un suspense insoutenable… juste avant les coupures publicitaires “spécial ramadan”.