Lancement d'un site web consacré à la justice internationale et à la réconciliation de sociétés déchirées par des conflits.
Capture d'écran
« En Afrique, la CPI contestée », « Les combats de la veuve de Thomas Sankara », « Les violences extrêmes, un nouveau type de crimes ? », « Je regrette d’avoir témoigné devant la CPI »… Tels sont les principaux titres qui ont fleuri cette semaine en une du nouveau média électronique qui a fait son apparition sur le web ce 17 juin : Justiceinfo.net, qui ambitionne de fournir une information indépendante sur les processus de réconciliation à l’œuvre dans de nombreux pays, la justice internationale, le devoir de mémoire, la reconstruction de sociétés déchirées par des années de crimes et de violences.
Justiceinfo.net est issu d’un partenariat de la Fondation Hirondelle, basée à Lausanne en Suisse, avec Oxford Transitional Justice Research et la Harvard Humanitarian Initiative. Depuis une vingtaine d’années, la Fondation Hirondelle crée et soutient des médias indépendants dans des zones de conflits, et a pu compter sur le précieux soutien de ses journalistes au Mali, en Centrafrique, en République démocratique du Congo et ailleurs pour mettre sur pied cet ambitieux projet. Ce site souhaite bel et bien répondre aux besoins d’informations vérifiées et documentées sur ces questions brûlantes et sensibles. Au programme : le suivi systématique des Commissions vérités et réconciliation, les procès des criminels de guerre, les programmes de réparation des victimes, ainsi que les modes de gestion du passé.
« Ce qui se passe actuellement en Afrique est très intéressant, estime sur les ondes de la Radio suisse romande Pierre Hazan, l’un des responsables de Justiceinfo.net. D’un côté, certains pays africains se montrent totalement hostiles à la Cour pénale internationale (CPI) ; de l’autre côté, des pays tels que la République centrafricaine, le Mali, l’Ouganda, la RDC, réclament son intervention. Il existe une véritable complexité, qu’il s’agit de décoder, pour mieux agir ».
Pas question cependant pour l’auteur de l’ouvrage « La Paix contre la Justice ? » et son équipe de se poser en « inconditionnels de la justice internationale » ; mais bien plutôt de s’intéresser, de manière pragmatique, à son potentiel, mais aussi à ses limites, ainsi qu’à ses ambigüités. Car aux yeux de Pierre Hazan, « la justice internationale ne saurait être une réponse automatique, presque mécanique, qui devrait s’imposer dans toutes les situations ».
« Justiceinfo.net raconte comment les communautés blessées se reconstruisent, comment elles châtient, comment elles pardonnent », peut-on lire dans le communiqué de presse qui annonce son lancement. Outre Pierre Hazan, ancien grande reporter devenu chercheur et enseignant en justice post-conflit, c’est François Sergent, fort de sa longue expérience au quotidien Libération, qui officie en tant que rédacteur en chef. Il est épaulé par Ephrem Rugiririza, qui, pendant 15 ans, a couvert à Arusha en Tanzanie, le travail de la justice pénale internationale.
Premier média bilingue anglais-français d’envergure internationale consacré aux grands processus de justice et réconciliation, Justiceinfo.net risque hélas de ne pas être à court de matière, tant ces problématiques, aux frontières de la justice et de la politique, du droit et de la morale, demeurent omniprésentes, sous toutes les latitudes. Outre le suivi de l’information, le site web entend offrir des espaces de débats, des tribunes, des points de vue. Pour rendre le monde un peu moins cruel, conjurer les horreurs qui continuent à s’abattre sur tant de populations sans défense ?
Alors que je suis en train d’écrire ces quelques lignes, un site d’information m’apprend, justement, que des rescapés des combats qui ravagent le Sud Soudan viennent de témoigner des crimes atroces perpétrés contre des enfants, saignés à mort, violés, ligotés ensemble avant que leurs agresseurs ne leur tranchent la gorge, et les jettent dans des bâtiments en feu…