Agrandissement : Illustration 1
.
A Janusz Korczak.
Médecin, pédagogue révolutionnaire, inspirateur de la Convention
des droits de l’enfant, créateur dans un orphelinat de Pologne
de la République des enfants. Mort à Treblinka après avoir
refusé d’abandonner ceux dont il avait la charge
dans le ghetto de Varsovie.
.
Parmi ceux que l’attaque du Hamas a révulsé au point de ne rien vouloir entendre d’autre, beaucoup, je suis certain, ignorent totalement ce que vivent au long cours les Palestiniens et particulièrement les enfants de cette communauté.
Découvrir cet autre versant de l’horreur, c’est être révulsé deux fois.
Il faut donc une dose supplémentaire du premier courage, celui qui consiste en l’intérêt égal que l’on porte à l’autre, quelles que soient jusque-là nos préférences d’attention.
Car les êtres vivants ne sont pas des chocolats qu’on choisit dans une boîte, n’est-ce pas ?
L'Etat d’Israël n’est pas une véritable exception. C’est même plutôt la règle maximalisée, un work in progress tapis jusque-là dans le silence coupable d’autres Etats et d’un quatrième pouvoir globalement servile et suiveur. C’est aussi l’éclat d’un verre brisé, celui d’un miroir opaque, mélange d’une société orwellienne où rien n’est nommé avec les mots justes, puisque tout est simulacre, et l’équivalent d’un mélange mi-stalinien, mi-sud-africain de la triste époque, où votre identité à elle seule, suffit à justifier que l’on vous torture.
Par chance, en Israël, c’est bien connu, on ne torture pas.
On utilise des « moyens spéciaux ».
« Le mardi 28 juin 2022, vers 4 heures du matin, une trentaine de policiers israéliens et d'agents de l'Agence de sécurité israélienne (Shin Beth ISA), dont certains masqués, sont arrivés au domicile de la famille Rweidi, dans le quartier de Silwan à Jérusalem-Est. Plusieurs d’entre eux sont entrés dans la chambre de Majd (15 ans), le réveillant effrayé. Le père de Majd a tenté de rassurer son fils et lui a dit qu’ils étaient policiers. Lorsque Majd a répondu à son père : « Que suis-je censé leur faire ? l'un des policiers l'a poussé avec force et Majd l'a repoussé. D'autres policiers se sont jetés sur l'adolescent, l'ont battu puis l'ont arrêté, pieds nus et torse nu. »
B’Tselem 14 août 2022 Organisation israélienne qui documente depuis 1989 les violations du droit international en territoire palestinien.
La suite dans Israël (2) Le cauchemar au fond du puits
https://blogs.mediapart.fr/cham-baya/blog/020124/israel-2-le-cauchemar-au-fond-du-puits
Comment se fabriquer un ennemi haineux, à coup sûr.
En lui refusant tout ce qui lui permet de rester un être reconnu dans ses droits les plus fondamentaux, lesquels sont avant tout, si l’on y réfléchit un instant, des devoirs heureux. Celui de partager, de soutenir ses proches, de venir au secours, d’accueillir les voyageurs et les pourchassés, de soulager les souffrants, d’aider à grandir les petits, et de rendre hommage à la vie pleine, qu’on appelle l’amour et l’amitié sincères.
A l’opposé extrême de cet Etat devenu otage de sa propre démence, otage d’une politique martelée de l’enfermement, de la forteresse, de la ruse et de la peur de l’autre, autrement dit, d’une redite des pires idéologies fascistes du 20e siècle, Janusz Korczak est un phare.
Un homme immensément libre et puissant. Juif, médecin pédiatre, écrivain, journaliste et pédagogue, ayant consacré sa vie à l’amélioration des conditions de vie des êtres les plus abandonnés de la première guerre mondiale, les orphelins. S'il incarne la part la plus universelle du courage quotidien des peuples opprimés, son génie propre fut d’être un penseur et un praticien radical, enseignant et vulgarisateur des courants pédagogiques de l’éducation nouvelle, dans la Pologne d’un début de siècle, monstrueusement destructeur.
Ce courant pédagogique fut réellement le premier dans l’histoire à se préoccuper à ce point de la misère terrible des enfants, en particulier au cours des épisodes guerriers les plus massifs. Et ici, lors de la Grande Guerre, c’est peu dire que ça ne manquait pas, les orphelins, les enfants des rues, les enfants handicapés, les enfants faibles ou malades.
Ce courant de pensée, ce courant philosophique de l’action, animé majoritairement par des chercheurs sortis des idéologies de la reproduction et de l’autorité, des praticiens ayant compris à la suite d’une longue lignée de précurseurs plus ou moins inspirés et cohérents, Rousseau, Pestalozzi, Tolstoï surtout, à quel point la puissance de dépassement des traumatismes générationnels, passait par la joie profonde de chercher et de créer tout de suite.
De chercher pour de vrai surtout, et de préférence en relation avec des questionnements, des préoccupations, des savoirs déjà là des enfants, et surtout, à travers de véritables projets, y compris complexes, concernant la communauté ou l’école, comme la fabrication d’un livre, d’un journal, d’une exposition ou d’un spectacle, chacun permettant de découvrir et d'innover ensemble, maîtres inclus. Des enseignants chercheurs, femmes et hommes, qui se sont déclarés de plus en plus confiants et enthousiastes quant aux capacités hors norme, à la fois, de compréhension, de résilience, et souvent, d’excellence, de ces enfants, y compris chez les plus paupérisés, ou blessés par les violences sociales et culturelles. A une condition première essentielle, faire d’abord et d’entrée, appel à leurs perceptions, à leur créativité, à leurs modes d'approche personnels, à leur sens de la justice et de la solidarité, autrement dit, à leur capacités déjà matures, d'œuvrer ensemble.
La grande œuvre de Korczak, ce sont donc les enfants pauvres, orphelins, abandonnés, juifs et non-juifs, et les questions sans fin que leur condition, leur statut et la méconnaissance abyssale que les pouvoirs en place en avaient à cette époque, tout comme d’ailleurs des enfants mieux protégés socialement. En 1899, il écrivait dans un des périodiques de l'époque : « Les noms de Pestalozzi, Fröbel et Spencer brillent avec non moins d'éclat que ceux des plus grands inventeurs du XXe siècle. Car ils ont découvert davantage que les forces inconnues de la nature ; ils ont découvert la moitié inconnue de l'humanité : les enfants. » (1)
Imaginons une seconde ce novateur et créateur désintéressé, dont les qualités intellectuelles sont totalement conjointes à son éthique et à son énergie foncière, dirigée vers la résolution d’un des pires cauchemars de la communauté humaine, la destruction de ses enfants. La Bible est pleine de ces calamités réitérées, que nombre de courants réactionnaires ou de personnalités fascistes, en poste actuellement, interprètent glorieusement à voix haute. Imaginons une seconde ce que Korczak ressentirait. Une bombe atomique sur Gaza, oui, c’est possible. En Israël, 20.000 Gazaouis sont responsables de leur propre mort ! Quant à la médiane de cet inconscient sur-formaté de la société israélienne, que ce soit par cette guerre constante de sept décennies, ou par les surenchères médiatiques ou étatiques, elle indique que 50% des Israéliens plébiscitent la torture. Un dernier élément qui n’a rien de récent.
Malgré la chape de plomb et le lobbying forcené des prétendues démocraties occidentales pour taire ces joyeuses in-humanités, pour laisser l’ami de l’ami américain, jouer son rôle de chien de garde dans une impasse, voilà un des aspects récurrents du quotidien, parmi cents autres faits, qui conduisent depuis des décennies la vie misérable d’un peuple, les Palestiniens. Parqués, contrôlés, racisés, tués, blessés, battus, emprisonnés sans jugement, sans avocat avant d’avoir avoué n’importe quoi, puisque la torture est faite pour ça, humiliés et maintenant génocidés ou tirés à vue dans deux enclaves, Cisjordanie et Gaza, devenues littéralement aujourd’hui, deux territoires de chasse, quelles sont les perspectives restantes, ne serait-ce que pour les israéliens ? Devenir une société de maîtres et esclaves, édoniste, éthiquement lobotomisée ?
Un peu d’histoire éclair.
Israël aurait donc le droit de se défendre contre son agresseur du 7 octobre 2023. D’accord.
Et les Palestiniens, eux, contre un apartheid de 75 ans, dont chaque détail montre à quel point il est méprisable et implacable, non ?
Oui, le 7 octobre était une horreur. Et probablement un acte suicidaire du Hamas. Ou paraissant suicidaire. Je ne suis pas un stratège. Je sais seulement, comme tous ceux qui s’intéressent en profondeur à leur vie, que beaucoup de Palestiniens, après tant de temps passé à souffrir, estiment que tous les dés sont pipés, qu’ils sont à peu près abandonnés de tout le monde et qu’ils n’ont plus rien à perdre. Que plus de trois générations d’occupation, de misères et de contrôles permanents, dont certains, juste faits pour rendre dingue, déclenchent fatalement de la haine, est-ce un processus miraculeux ? L’Etat israélien ignorerait-il cela ? Et devrait-il s’étonner que les Palestiniens ne soient pas toujours organisés en mouvements démocratiques ? A l’image d’Israël peut-être ? Et qu’ils vous jettent des pierres, ça vous étonne ? Et qu’évidemment, ses dirigeants se trouvent ailleurs qu’à Gaza aujourd’hui. Avons-nous vu, au Moyen-Orient, ou partout dans le monde, beaucoup de dirigeants installés, riches et dominateurs, mourir au combat depuis les dernières croisades de Saint-Louis ? Allons-nous comprendre enfin que tout délire nationaliste conduit à la guerre, car ses ressorts sont la grille la plus éloignée de la nature profonde et possible, de l’humanité.
Quand allons-nous centrifuger les ruses de la peur et de la guerre, ces deux siamois sans tête ?
Pour toute entité militarisée n’avouant aucun intérêt dans le conflit lui-même, et pour autant ne voulant pas faire la paix, une paix juste, sincère et honorable, la ruse est un puits sans fond.
La ruse. Bénéfice immédiat, coût éternel.
On ne joue pas avec la vie d’une population entière. Combien d’énergie, de ténacité, de tendresse pour créer un Janusz Korczak, un Mahmoud Darwish, un Daniel Barenboïm, un Edward Saïd ?
Combien d’aveuglement et de milliards, pour produire des guerriers psychopathes en nombre suffisants, pour que la guerre devienne inévitable, voire éternelle dans des têtes en béton ?
La question fondamentale est toujours celle-ci. Quel est ton projet ?
Quel était en particulier le projet des paramilitaires de droite / fasciste, très proche du Mussolini philosémite d’avant 1938 ? Avec qui ils combattront dans la guerre coloniale contre l’Ethiopie, soit dit en passant. Ces groupes que dénoncera Einstein comme antinomiques des richesses humaines justifiant la création d’Israël. La filiation Nethanyahou, quelle est-elle ? Son père, Bension Netanyahou fut un historien de droite, dans la mouvance de Zeev Jabotinsky, dont il fut le secrétaire. Jabotinsky, fondateur de l’informelle légion Juive, combattit d’abord auprès des Britanniques contre l’Empire Ottoman en 1915, dans la perspective impérieuse d’une conquête à venir de la Palestine. Inspirateur plus tard de l’Irgoun, force paramilitaire particulière violente, qui deviendra Hérout en 1948, et sera finalement le noyau de la naissance du Likoud, parti actuellement au pouvoir.
Jabotinsky est un personnage saillant, dont les positions politiques et philosophiques, alors minoritaires et en partie iconoclastes, expriment aujourd’hui quelque chose de parfaitement visible, avéré, dans la frénésie de contrôle à tout prix de la Palestine, par l’Etat israélien.
Contrairement à ce que proféraient d’après lui, nombre de ses interlocuteurs, il ne pensait pas que les Arabes, venant d’être libérés de la tutelle ottomanne, étaient pour autant des « imbéciles qu'on peut escroquer. (...) Ils sont aussi fins psychologues que nous. On peut leur raconter ce qu'on voudra, ils lisent aussi bien dans notre cœur que nous dans le leur. (...) » Et ils ne sont pas « une populace avide, disposée à vendre sa patrie pour une ligne de chemin de fer. »
Le problème, c’est ce qu’il en tire comme conclusion. L’obligation d'imposer dès le départ un rapport de force supérieur, par une immigration soutenue et une présence militaire massive. Un concept Muraille d’acier, qui finira dans sa forme réalisée, par devenir ce mur de séparation tue-la-vie dont on voit aujourd’hui l’étendue du désastre.
« Il n'y aura un accord que lorsque le rapport de force sera clairement établi en faveur des sionistes : « autrement dit, le seul moyen d'obtenir un accord dans l'avenir, c'est de totalement renoncer à en obtenir un dans le présent ».
Sentence immémoriale, déchirement tectonique entre deux conceptions du monde. Renoncer à obtenir un accord de paix dans le présent, pour l’impalpable promesse d’un accord, solide, le croit-il, mais plus tard... Est-il enfin réalisé ? Non. Autrement dit, l’accord de qualité, n’est pas celui des vies mêlées des Juifs et des Arabes vivant en confraternité depuis des siècles sur cette Terre promise, aride, sépulcrale, dépouillée, splendide selon l’humeur de la mer. Non hélas. Un clone du futur plutôt, à l’aune d’un Jabotinsky, visionnaire à œillères. Avec centres commerciaux vrombissants, trains hypersoniques filant sous le désert du Negev et miradors volants pour parer à tout ?
Faut-il rappeler la déclaration Balfour, prévenant Sir Rothschild, du désir de Sa Majesté Georges V de faire connaître son accord pour l’implantation en Palestine d'un foyer national juif ? Et de faire « tout ce qui est en son pouvoir pour faciliter la réalisation de cet objectif » etc, etc, missive on ne peut plus claire, qui entérinait surtout la reconnaissance que le Royaume-Uni se devait d’exprimer à Chaim Weizmann, chimiste juif d’origine russe, et alors citoyen britannique, pour son invention de l’acétone, laquelle allait révolutionner l’utilisation de la dynamite, offrant un avantage technique capital aux alliés de la Grande guerre. Les puissances colonisatrices, exponentielles sans limites, qui se la pètent sous le nez de Dieu, voilà que les Occidentaux, avant deux holocaustes bien organisés (2 ), tenaient à remercier les cerveaux juifs pour leurs apports au scientisme guerrier. Weizmann devint le premier président du nouvel état juif.
Et non, cher Janusz Korzcak, ton génie ne servira jamais à l’internationale des guerriers affamés. Pour les autres ?...
En attendant, que pourraient dire les Monty Python, de ce sacre empoisonné ?
Mieux que le Nobel de la paix d’Obama et ses milliers d'assassinats par drones : Chaim Weizmann devint le premier président d’Israël grâce à la dynamite qui pète plus vite que la mort !
Einstein, lui, avait refusé le titre.
.
Les faits de violences et de torture « édulcorée » qui suivent ici, seront forcément désagréables à lire. Mais je me suis fendu de vous les rapporter, via un vrai publiciste d’Etat, un véritable spécialiste de l'humour guerrier ! Tout en n’inventant rien, pas un seul fait, certes.
Car que pourrions-nous trouver de plus fou que cette réalité ?
Cet homme immobilisé au milieu d’une place de Tel Aviv, tel un supplicié de l’Ancien Régime, n’est pas un martyr exposé à la vindicte populaire.
Oh non. Ça n’existe pas, en Israël. Jamais ! Et pourtant, paradoxalement, cet homme ne fait pas semblant. Non, cet homme s’est chargé d'avertir, en particulier ses compatriotes, ou tout au moins les passants, les enseignants, les commerçants, les touristes, les grands-mères, les enfants, les adolescents, les fonctionnaires nationaux ou internationaux, ainsi que les éventuels journalistes encore ignorants de ces faits, afin qu’ils sachent de quelle façon l’Etat israélien respecte aujourd’hui ses opposants ! Y compris lorsque leur dénomination de Palestiniens, pourrait ne plus leur conférer aucun des droits privilégiés accordés aux véritables citoyens, habitués aux standards minimaux des Droits de l’homme. Et dont ils ne sauraient se passez évidemment. Mais qu’on le sache, dans les démocraties labélisées, on ne fait plus ça. Non non non ! On ne torture plus en place publique. Pouah ! Dégoûtant ! Fini ! The end.
Je le répète néanmoins, car il est vital pour chacun de le comprendre, cet homme abandonné à la solitude de sa condition, ne fait absolument de chiqué. Observez-le bien d’ailleurs, car il va devoir très vite laisser sa place à quelqu’un d’autre. Non, cet activiste ne rigole pas. De même que les agents du renseignement intérieur, le Shin Beth, ou la Police israélienne, les forces armées ou les services pénitentiaires, soyez certain que chacun d’eux, sait clairement, qu’il s'agit là d'une technique, parfaitement valable. Oh oui. Parmi de nombreuses autres tout aussi spécialisées n’ayez crainte ! En tout cas, chacune, parfaitement conçue et capable de produire les meilleurs résultats en matière d’aveux. Et qui y a t-il de plus important dites-moi ?
Développons rapidement, si vous voulez bien. Il faut savoir que dans le droit israélien, la majorité des condamnations, assez lourdes je le concède, disons très dissuasives, se font à la suite d’aveux. Voilà, les aveux. Et la meilleure preuve de l’utilité et de la pertinence de notre arsenal juridico sportif, n’est-ce pas, est que notre taux de réussite, parlons cash, de condamnations ! est proche de 100%.
Oui. Vraiment. Allons, disons, environ 99% ! Et l’avantage, avec LA PREUVE ! c’est que, finis les procès soi-disant équitables et tout le tintouin. Ben oui, l’aveu ! l’aveu ! l’aveu ! Même de n’importe quoi évidemment. Vous savez parfaitement que les Bougnoules font n’importe quoi, n’est-ce pas ? Il s’avère alors que, n’importe quoi, est tout à fait suffisant vous comprenez ? C'est VITAL pour Israël ! Et bien oui quand même. Vous imaginez, 12 millions de Palestiniens dans un prétoire ? Ou rien que les 4,7 millions encore en Palestine ?
Sachez néanmoins, chers touristes circonspects, qu'Israël a bien entendu signé la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, de telle façon que nous sommes dorénavrant, dans la totale incapacité de pratiquer un certain nombre d'atrocités à l’ancienne, je l’avoue. Encore que pour être totalement franc, il nous faut rappeler que quelques éléments de détail peuvent laisser penser, que si raffinées soient-elles, nos « méthodes d’interrogatoire spéciales», c’est leur nom précis en effet, peuvent se rapprocher, en termes d’efficacité je veux dire, bien qu’à la marge, des tourments de leurs ancêtres à pinces et à tenailles ! Ce qui, soit dit en passant, montre bien que le passé était d’une cruauté parfaitement superflue ! Car, soyez-en assuré, malgré l’extrême bienveillance qui préside aujourd’hui à nos interrogatoires, nos capacités à vous faire avouer n’importe quoi, restent entières pour autant. Je m’en porte garant !
A ce stade néanmoins, si vous voulez en savoir davantage, il va falloir rentrer un peu dans les détails actifs n’est-ce pas ? Ah, au fait... Je ne vous ai pas demandé, vous travaillez pour quel média ? Comment ça, vous ne travaillez pas ? Ah bon.. Vraiment ? D’où ça ? Eh ben, c’est proprement incroyable. Non non, je vous crois quand-même ! Vous venez donc, de Vénus ? Ah Venus... Venus, vedi, vici ! Incroyable.
Bon, soyons un peu sérieux jeune homme. Comment pensez-vous qu’on obtient assurément, je veux dire, imparablement, ces aveux ? Sans leur crever les yeux ou leur arracher la langue, à ces braves gens du cru, n’est-ce pas ? Ce qui laisserait des traces tout à fait disgracieuses. Et en plus, visibles, en effet. Et bien, la première chose, pour que tout le monde soit à l’aise, je vais vous dire, c’est de mettre tous ces candidats prisonniers, sous prétexte de dangerosités ontologiques diverses, bien connues et surtout bien réelles, en « détention administrative », ben oui. Je ne vous apprends rien ? Il s’agit en effet, tout simplement, de leur proposer, contractuellement, ce que nous appelons comme je viens de vous le dire, une détention administrative ! Ça n’a donc rien de méchant, n’est-ce pas ? Et c’est une appellation magique, en effet. Bien mieux qu’incarcération, non ? Et de plus, c'est une disposition reproductible, à volonté. Vous comprenez ? Qui ne demande aucune autorisation, pas même à Dieu... Non non, je ne plaisante pas. Une détention administrative, c’est juste, en attendant !
Bon, pour revenir au sujet principal, si vous permettez… Si vous aviez encore la certitude que quiconque puisse tenir plus de deux heure dans cette position abominable, ou dans bien d’autres variantes, je dois vous dire tout de suite, et bien c’est niet. A part quelques circassiens oui, qui tiendront quelques dizaines de minutes supplémentaires, pour les plus follement héroïques et en suppliant d’arrêter toute les cinq minutes évidemment ! mais alors ? Ça ne vaut plus rien, n’est-ce pas ? Pour les autres, le public habituel, je parle des prisonniers oui, qui diront n’importe quoi, et bien, quelle importance ? Même si vous n’avez rien commis de courageux dans les semaines précédentes, je peux vous assurer que vous trouverez très vite quelque chose à avouer. Oh oui ! C’est naturel. Pourquoi s’obstiner, puisque, de toute façon… Excusez-moi, j’ai un petit coup de mou là. Qu’est-ce que je vous disais ? Ah oui. Avouez n’importe quoi ! ça vous libérera de toute manière ! Ça vous libérera de quelque chose qui s’avère quand même, au long cours, une contrainte assez rude ! vous voyez ? Disons, presque atroce.
Ah oui bien sûr. J’ai essayé. Dix minutes. Oh, ça m’a suffit grandement. Ben, j’ai tout le temps des lumbagos, voilà ! Et puis franchement, j’aime pas trop souffrir. Non, je préfère la télé. L’avantage, c’est également que ça laisse très peu de traces comme manips. Pas comme ces abominations syriennes, où même si vous avouez votre numéro de carte de crédit, vous pouvez finir à la poubelle dans l’heure qui suit, vu votre état.
Non, vous savez, en Israël, jusqu’à présent, on évitait les cadavres d’opposants. On se contentait de les emprisonner en effet, mais autant de fois que nécessaire, bien sûr. Quitte à mettre le paquet sur les cours de yoga, les cours de claques, les privations diverses, etc. Eau, repas, protection contre le froid, ou le très chaud, et tous ces trucs superflus dans les interrogatoires, comme, pipi, caca, dodo, tout ça. Ou une bonne privation d’espace de survie. Dans le genre, une journée de résidence dans des placards minuscules, toujours avec des positions d’homme-serpent évidemment, ça aide à réfléchir je peux vous dire. Des placards dégueulasses si possible, ben oui, c’est pas le Hilton quand même ! Ou alors, en leur hurlant dans les oreilles de temps en temps. Ah ben, faut ce qui faut, hein ! Voire, quand ils sont vraiment bêtement courageux, à l’extrême, disons, et qu’ils refusent de dénoncer, je ne sais pas... au moins quelqu’un, voire, n’importe qui, ou disons, un parent par exemple. C’est simple ça, non ? Parce que, s'ils produisent vraiment que dalle, on va être obligé de les passer à tabac quand même. On est pas seulement Mère Thérésa, hein ? Ah oui, c’est donnant donnant. Ou alors, on les met à poil. En les menaçant de viol possiblement. Ou même, en les violant parfois. Bon, discrétos, hein ? Mais voilà, quand ils font vraiment exprès, de... comment vous dites… de jouer au kakou, hein ?
Alors là, croyez-moi, on a beaucoup plus simple. On les prévient tout bêtement qu’on va s’en prendre à leur femme. A leur frère. A leur sœur. A leurs amis, et pas que pour des prunes. On peut débarquer chez eux à n’importe quelle heure de la nuit ou du jour, vous savez ? C’est portes ouvertes non-stop en Israël ! Mais attention, toujours porteurs de véritables, ou disons, de futurs véritables aveux. Et c’est reparti pour un tour avec un nouveau, ou une nouvelle ! Quel âge minimal ? A 12 ans, ne les plaigniez pas, les prisonniers c'est déjà dangereux ! Pardon. Je voulais dire les Palestiniens. Et justement, c’est pour ça qu'on met le paquet sur les mômes, n’est-ce pas ? Pour les prévenir voilà. Pour leur bien futur oui. Et puis on a des techniques un petit peu plus douces quand même. On les frappe gentiment. Là où ça fait vraiment mal tout de suite. Par exemple sur les oreilles. Ou sur les lèvres. Oui, sur les lèvres, essayez avec votre môme, vous verrez, il va se calmer tout de suite. Et puis s’il joue lui aussi au kakou, vous le foutez à poil tout simplement, hein ? Ou pareil, vous lui sortez des fils électriques bidons sous le nez, et là je peux vous dire qu’il comprend tout de suite. Ben oui, ça va plus vite ! Inutile de balancer une grenade ou un missile dans sa piaule, non ?
Agrandissement : Illustration 2
La suite. La terrible suite. Quelle sera-t-elle ?
D’où l’importance de connaître les nombreuses autres preuves et informations capitales.
Israël (2) Le cauchemar au fond du puits
https://blogs.mediapart.fr/cham-baya/blog/020124/israel-2-le-cauchemar-au-fond-du-puits