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Billet de blog 8 octobre 2018

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Manières africaines.

Sur le continent noir, c'est toujours la même histoire. On va aux élections, et puis, on découvre que l'Etat est un petit vicieux, on veut le pouvoir d'Etat tout en se retirant du cadre que fixé l'Etat.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Ils étaient huit candidats plus un président à se présenter au scrutin présidentiel à un tour ce dimanche 7 Octobre au Cameroun. Et, bien que le conseil constitutionnel n’ait pas encore divulgué les précieux résultats, certains ont déjà la vérité des urnes.

Climat délétère. 48 heures avant le vote, le MRC, parti de Maurice Kamto, par la voix de son directeur de campagne, lançait déjà les hostilités, lors d’une conférence de presse : « [Nous sommes] prêts à défendre [nos] votes quelque soit le prix à payernos votes méritent d’êtres défendus et nous sommes prêts à payer le prix fort pour ça ». Suspicion profonde entre les différents acteurs du processus électoral donc.

24 heures avant l’ouverture des bureaux de vote, on pouvait déjà lire sur les réseaux sociaux, en quantité, des accusations de fraude. 

Hier dimanche, dès la fermeture des premiers bureaux de vote, les mêmes réseaux sociaux étaient devenus de véritables cours de justice, certains scrutateurs-militants, se trouvant dans les bureaux de vote, se faisaient le devoir de partager photos et videos du décomptage des bulletins de vote et de les répandre sur internet. Que partageaient-ils précisément? Des résultats favorables à leurs différents candidats. 

Ainsi, pleuvaient sur la toile, des informations éparses, minuscules, désordonnés invérifiables, qui alimentaient les espoirs, les craintes, les doutes, les insultes, les haines. Les institutions de la République étaient hors courses.

Témoin d’un bureau, untel militant scrutateur croyait-il, en partageant videos et photos, révéler une vérité valable dans plus de 24 000 autres bureaux de vote ? Croyait-il se prémunir d’une fraude ? Croyait-il défendre le vote des siens ? Non, Il était un agent de la propagande parmi tant d’autres. Propagande des oppositions contre propagande de l’Etat via la télévision à capitaux publics et la chaîne privée Vision 4.

La vérité était asphyxiée de partout. Nul ne se souciait des conditions de sa survie. Les uns et les autres, par leur sur-activisme virtuel et médiatique rendaient impossible les conditions d'un véritable débat contradictoire en cas de contentieux. C'était prévisible.

A quoi servait-il d'aller dans des élections si c'était pour se plaindre en désordre des cas de fraude, avant, pendant, après les élections? Ces dénonciations tous azimuts de fraude étaient elles mêmes des fraudes massives et participaient à tout brouiller. 

Le comportement, très répandu en Afrique, qui consiste à participer à des élections, pour après refuser l'issue du vote, est irresponsable et a deux visées : premièrement,réclamer une intervention ou une pression étrangère; deuxièmement, inciter les populations désorganisées à descendre  dans les rues pour contribuer encore un peu plus à leur misère. 

Au Cameroun, c'est l'opposant Maurice Kamto, ex ministre délégué de la justice au Cameroun, juriste et avocat de l'Etat équato-guinéen (propriété privée de la famille Obiang Nguema),qui, au mépris de la loi électorale camerounaise, s'est proclamé Président élu du Cameroun, dès le lendemain du scrutin. Alors que l’article 137 du code électoral qui a rendu  possible sa candidature stipule : «  Le Conseil Constitutionnel arrête et proclame les résultats de l’élection présidentielle dans un délai maximum de quinze (15) jours à compter de la date de clôture du scrutin. »

 S'il n'y a pas de confiance, et le respect des règles du jeu qui va avec, les acteurs politiques qui décident néanmoins de participer à un scrutin douteux sont tous des fraudeurs ou des mal intentionnés, qui agissent dans la même logique  que les gangs rivaux dans  la mafia. I

L’opposition n’a guère eu les garanties d’une organisation scrupuleuse des élections, elle n’a guère eu les garanties de la bonne foi de l’Etat, pourquoi a t-elle consenti à participer à cette compétition électorale? Tout comme la chèvre, l'opposition  broute là où on l’attache. Le pouvoir l’a attaché aux élections, et elle broute. 

Vu le contexte, l’opposition (les oppositions), croit-elle que les populations vont corriger du seul fait de leur vote les vicissitudes de  l’Etat ? Croit-elle que sans organisation véritable elle peut s’accaparer du pouvoir d’Etat ?  Ça ne s’est vu nulle part. Battre pareil régime par voie électoral. L'Etat c'est Biya. Le régime de Biya n’est peut-être pas populaire, et encore, mais ce régime tient encore les deux choses qui font l’Etat du Cameroun, la vie des camerounais : l’armée et l’administration.

 Les opposants, au cours de cette campagne, se sont déclarés républicains. Qu’est-ce que la république sinon les institutions, la loi ? Or, ces opposants républicains ont dénoncé le rôle de l’armée et d’Elecam pendant ces élections. A juste titre. Ils ont eu raison de dénoncer ces institutions, elles sont éminemment dans le coup électoral… Cependant, cette dénonciation fait d’eux des non républicains. Car, la République du Cameroun n’a point d’autres contours que les tracés d’Ahidjo et de Biya. S’ils se déclarent républicains à tout prix, soit ils respectent les institutions du Cameroun (de Biya), soit ils sont simplement des républicains de papier, sans réel, sans Cameroun.

 La République dite du Cameroun ce n’est pas sur les réseaux sociaux. Les réseaux sociaux ne sont même pas le Cameroun…c’est le worl wide web. Les résultats partiels et partiaux qui circulent sur la toile sont des résultats clandestins (je ne dis pas faux)…et la République, c’est la légalité (je ne dis pas la vérité).

 Pronostiquer la victoire de Biya n’a rien de très sorcier. Cela procède d’une analyse purement rationnelle, froide de la situation.  Or, en l’état, une victoire de l’opposition, ou tout au plus, une prise du pouvoir de l’opposition, relèverait du pur et simple fantasme, d’une pensée magique, mystique...ou d'un coup extérieur.

 Les camerounais ne feront pas l’économie de la pensée s’ils veulent non seulement renverser le régime Biya, mais bien le renverser. En Egypte, la foule majestueuse n’a guère attendu les institutions pour renverser Moubarak. Hélas, l’a-t-elle bien renversé ? Pas vraiment. Puisque après le « Moubarack dégage », place aux islamistes, puis retour de l’armée de Moubarak, c'est-à-dire retour à la case de départ.

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