La Croisade d’Amélie
Le portefeuille à double fond du soldat Ouéda-Castéra
Je propose une lecture différente, plus « battante », de la posture d’Amélie Ouéda-Castéra au ministère de l’Education nationale. Par-delà la salve de critiques dont elle fait l’objet, se joue, me semble-t-il, une nouvelle partition de la pêche en eaux troubles d’Emmanuel Macron révélée lors du vote de la loi Immigration. Faute de majorité, il marchande avec la droite l’ajout d’articles flattant le RN, lequel en retour lui donne ses voix.
Puis le Conseil constitutionnel censure 35 des 82 articles, la plupart ajoutés par la droite, considérés par les Sages comme des « cavaliers législatifs », c’est-à-dire sans rapport avec la loi. Ce sur quoi comptait le président Macron. Au final le texte de loi, ainsi « blanchi », est validé par le Conseil constitutionnel. Un texte qui contient la totalité des 27 articles du projet initial de Gérald Darmanin, écarté un mois plus tôt par une motion de rejet votée par le RN. Tour à tour le RN et le Conseil constitutionnel auront été instrumentalisés. Un tour de passe-passe inspiré du Prince de Machiavel : la fin justifie les moyens.
Quel rapport avec la prestation d’Amélie Ouéda-Castéra à l’Education nationale ?
Sur la forme
Sitôt arrivée aux commandes de l’Education nationale, la presse nous apprend coup sur coup que les trois enfants de la ministre sont scolarisés dans un établissement privé, que celui-ci a fait l’objet d’une enquête administrative dénonçant des pratiques hors-la-loi (catéchisme obligatoire, prosélytisme religieux, sexisme, homophobie) ; que la ministre a retiré son aîné de l’école publique il y a quelques années en invoquant un motif mensonger et blessant pour les enseignants ; qu’elle a opté pour les classes non mixtes de l’établissement ; que son aîné y a bénéficié d’un détournement de Parcoursup.
On assiste alors à un lynchage médiatique et politique, sorte de censure semblable à celle du Conseil constitutionnel plus haut, au sens où elle ne peut être que prévisible voire… préméditée.
Sur le fond
Revue de presse :
« Les catholiques ont plus voté FN que l’ensemble des français aux élections régionales selon un sondage Ifop pour l’hebdomadaire Pèlerin, pour qui ‘’la digue catholique s’effondre’’ face à l’extrême droite » (L’Express, 9 décembre 2015).
« Désormais, les thèmes du FN entrent en résonance avec une large frange de l'opinion publique catholique. Celle-ci est particulièrement sensible, selon Jérôme Fourquet [Directeur de département Opinions de l’Ifop], à la ‘’peur identitaire’’ et au ‘’péril islamiste’’. ‘’Depuis longtemps, les catholiques ont pris conscience qu'ils sont minoritaires dans la société française. Mais les thématiques identitaires ont pris, ces derniers mois, une place grandissante dans le débat public’’, explique-t-il.
Que dit l'Eglise catholique ? Pour l'heure, face à la montée du Front national, l'épiscopat catholique est silencieux. ‘’Il y a un malaise évident chez les évêques, pointe Jérôme Fourquet. Sur le terrain, ils perçoivent la montée des thèses frontistes parmi leurs fidèles.’’ L'été dernier, l'initiative de l'évêque de Toulon-Fréjus, Mgr Dominique Rey qui avait invité Marion Maréchal-Le Pen aux universités d'été Science et foi chrétienne de la Sainte-Baume (Var) n'avait pas suscité de polémique en interne, une rupture par rapport à l'attitude des années 80 et 90. ‘’Il y a un fort activisme à la base, notamment à travers le courant de Mgr Rey, qui plaide pour un dialogue avec Marion Maréchal-Le Pen’’, explique Gaël Brustier, chercheur en sciences politiques et spécialiste des radicalités (Libération, 9 décembre 2015).
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« Reportage à l’église parisienne Sain-François-Xavier dans le très comme il faut VIIème arrondissement le jour de l’Assomption. (…) La tolérance des catholiques, autrefois plus élevée que celle du reste des Français envers les musulmans, est aujourd’hui en dessous de la moyenne, selon un sondage publié par Le Monde». Faut-il alors croire cette femme, accompagnée de son grand fils à la messe célébrant la montée au ciel de la vierge Marie, elle et lui affichant une franche hostilité à ceux des musulmans qui ‘’refusent de vivre à la française’’? ‘’Les élections parleront !’’, prédit la mère en quittant le parvis ». Lors de la Manif pour tous, les cloches de Saint-François-Xavier, au passage des cortèges, sonnaient à pleine volée » (Le Temps, 15 août 2016).
« D’après un sondage Ifop, le vote pour le Front national a franchi un nouveau palier au sein des électeurs catholiques » (Le Monde, 9 mai 2017).
« Pour la première fois, cet électorat plus à droite que la moyenne s’est vu privé de candidat issu de la droite classique au second tour des présidentielles. Une partie de celui-ci a alors basculé sur le Front national » (Jérôme Fourquet, IFOP, dans Le Monde du 9 mai 2017).
« Les catholiques ont davantage voté pour l’extrême droite que l’ensemble des Français au premier tour de la présidentielle » (Sondage Ifop pour La Croix, avril 2022).
Epilogue
Au final Amélie Ouéda-Castéra agit tel un « cavalier ministériel », accumulant actes et propos sans rapport avec son ministère. Elle joue dans la cour des cathos du RN. Si elle essuie nombre de coups au fond du cours, « en même temps » et à contre-jour des médias, elle monte au filet et marque des points invisibles. Tout l’art de jouer seule en double, avec le coup de raquette de son mentor illusionniste. Machiavélique ? « Jugez-moi sur mon action !». Elle le sera à l’aune du résultat des présidentielles de 2027. L’histoire de Sainte Amélie, dévote et martyre… Une cagnotte est en cours au lycée Stanislas pour sa future statue dans la cour des filles.
