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Billet de blog 5 juin 2015

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Contribution à la concertation sur la réorganisation de l'islam en France

Depuis maintenant plusieurs semaines des réflexions sont menées sur la place de l'Islam en France et de sa gestion. Après les anciens ministres de l'intérieur M.Joxe, M.Chevenement et M.Sarkozy nous voila de nouveau devant une énième tentative. Jusqu'à quand ?

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Concertation des musulmans

Depuis maintenant plusieurs semaines des réflexions sont menées sur la place de l'Islam en France et de sa gestion. Après les anciens ministres de l'intérieur M.Joxe, M.Chevenement et M.Sarkozy nous voila de nouveau devant une énième tentative. Jusqu'à quand ?

En attendant, il se pose toujours le problème de cette représentativité très défaillante et à laquelle aucune structure n'y a répondu avec efficacité que ce soit le Conseil Français du Culte Musulman (Cfcm) ou que d'autres organisations comme l'Uoif qui en a fait partie ou encore les grandes mosquées comme celle de Paris, d'Evry ou de Lyon qui y ont participé aussi. 

Au point que l'on se demande quelle serait vraiment l'utilité de leur mise en place et plus particulièrement celle du Cfcm et de ses filiales régionales les Crcm dont l'élection est fort complexe basée sur les mètres carrés. Ce mode de désignation est tellement contestable qu'il donne lieu à plusieurs exagérations dans les surfaces pour avoir plus de votants. 

L'objet de ces réunions de concertation déclenchées par le Ministère de l'intérieur dans les sous préfectures et les préfectures est louable. Il s'agit : d'identifier les thèmes prioritaires d'intérêt et de préoccupation chez les français musulmans en relation avec la question de l'Islam en France.(1)

Une opinion publique désemparée qui a besoin d'être rassurée  

Cette situation d'une représentativité de l'islam en France, non clairement identifiée et qui dure depuis de trop nombreuses années, a pour conséquence de désemparer une opinion publique déjà saturée et excédée par une actualité quasi permanente faisant la une des médias sur des faits liés improprement et précipitamment à cette religion. 

Depuis le début de l'année, il s'y est ajoutée l'attaque horrible de "Charlie" dont les assaillants, de jeunes délinquants passés par la case prison et fichés jusqu'aux USA, l'auraient revendiquée par des "cris islamistes". 

Sans oublier qu'il y a aussi, toujours en arrière fond, les terribles événements géopolitiques illustrés d'actes barbares, de massacres et de décapitations suivis des destructions de sites archéologiques qui se déroulent dans le monde musulman et dont les images sont diffusées presque en direct et en boucle sur les chaînes TV et sur internet. 

Tous ces bouleversements ne font qu'augmenter les confusions et les amalgames de toutes sortes qui portent un tort considérable aux citoyens de confession musulmane. 

Car dans ces conditions, il ne peut qu'apparaître logique que l'on ait du mal à comprendre cette religion et les valeurs qu'elle est sensée véhiculer. Quand bien même elle se revendique de la continuité des enseignements des révélations antérieures et des Livres saints que sont la Tora et les Évangiles cités dans le Coran. 

Mais contrairement à toutes ces désinformations répandues et aux slogans anti musulmans et sans chercher à faire un cours de religion, il faut tout de même savoir que l'islam, à l'instar des autres cultes, recommande en de nombreux chapitres et versets de faire le bien : 

"Quant à l'orphelin, ne le brime pas! Quant au mendiant, ne le repousse pas! Quant aux bienfaits de ton Seigneur, raconte-les." Coran chapitre 93. (2)

Ou encore :

"O vous qui croyez! Tenez-vous fermes comme témoins, devant Dieu, en pratiquant la justice. Que la haine envers un peuple ne vous incite pas à commettre des injustices. Soyez justes! La justice est proche de la piété. Craignez Dieu! Dieu est bien informé de ce que vous faites. Dieu a promis à ceux qui croient et qui font le bien un pardon et une récompense sans limites." Coran 5, v.8 et 9.(2)

C'est là l'enseignement et le comportement que se charge le croyant et c'est ce que s'efforcent de respecter les pratiquants musulmans dans leur ensemble. 

Pour toutes ces raisons voici développées ci-dessous des idées largement partagées et qui pourraient alimenter la discussion sur la concertation entreprise depuis plus de deux mois par le gouvernement. Bien entendu, dans cet article elles ne peuvent qu'être indicatives et non exhaustives. 

Une représentativité déficiente 

Comme on l'a vu en introduction, les incompréhensions que suscite la situation actuelle de la représentativité de l'islam en France viennent, pour une grande part, de tous ces "responsables" qui n'ont pas réussi à organiser le culte musulman ni à le défendre et encore moins à expliquer la spiritualité de cette religion. 

Ils vont d'échec en échec et se maintiennent à leurs postes contre toute raison au lieu de laisser agir des personnes plus compétentes. 

En dehors de certains cercles restreints qu'ils rencontrent souvent en catimini, ils ont fait la preuve de leur déficit à communiquer avec les simples gens. Ces derniers ne demandent qu'à comprendre que la pratique religieuse musulmane est tout à fait compatible avec les valeurs républicaines et de celles de la laïcité. 

Cette compatibilité est indéniable et elle existe depuis près de deux siècle sans difficulté que ce soit au sein de l'armée française, dans les administrations, les entreprises, les écoles et dans l'espace public. 

Les plats de substitutions par exemple, dont ont parlé les médias à cause du maire de Chalons-Sur-Saône en mal de sensation, ont toujours existé sans créer une quelconque polémique. C'est tout simplement du bon sens en dehors même de toute croyance. C'est par le respect de la sensibilité de chacun que la solidarité s'affirme et que la cohésion sociale se forge. 

Pourquoi serait-elle remise en cause aujourd'hui par certains esprits contrariés? On a entendu par exemple à plusieurs reprises un Onfray, sûr de lui se qualifiant de "philosophe", fanfaronner de bien "connaître" le Coran. C'était le 25 mars 2015 dans le grand journal de canal+ devant M.Juppé qui était plus réservé sur cette question. M. Onfray affirmait avec tout son sérieux qu'une "sourate" (chapitre du Coran) dirait aux musulmans "d'égorger les juifs". Bien sûr, ce qui est totalement inexact. Mais personne sur le plateau ne l'a contredit ou ne lui a demandé d'en rapporter la preuve. 

Il avait donné une autre version en mai 2013 sur BFMTV où il annonçait, toujours sûr de lui, face au journaliste Bourdin resté sans voix que le Coran incitait les musulmans à "égorger son voisin". Or, le mot "égorger" n'existe pas dans le texte coranique. Mais voilà les absurdités que l'on peut entendre régulièrement sans que les dits "représentants" du culte musulman n'y apportent le moindre démenti alors que ces allégations sont complètement diffamatoires. 

Dans le Coran, les versets qui parlent de "combattre" sont rares et encore il faudrait les comprendre dans leurs contextes. Tout comme il en existe dans la Bible et dans le nouveau testament. L'Evangile de Luc (chap.19 verset 27) ne fait-il pas dire à Jesus : "Quant à mes ennemis, ceux qui n'ont pas voulu que je règne sur eux, amenez-les ici, et égorgez-les en ma présence.".(3)

 Allons nous dire pour autant que le christianisme n'est pas compatible avec la Republique?
Non ! mille fois non. 

Pourtant, il faudrait juste expliquer la réalité du dogme de l'islam et c'est ce que n'ont pas su faire les personnes du Cfcm, les associations religieuses et les grandes mosquées toutes concernées. 

D'autres questions légitimes se posent aussi :

-Quel est le bilan de leurs actions ?

-Que deviennent par exemple les sommes récupérées de la taxe dite du "halal" alors que cet argent devait servir en priorité à réaliser les lieux de culte, former et rémunérer des imams, ...etc ?

-Pourquoi les membres de la communauté musulmane n'ont-ils pas accès aux bilans financiers que rapportent ces certifications de la viande "halal" qui sont gérées par les mosquées de Paris, d'Evry et de Lyon? Quelles sont leurs utilisations ? 

-Quel est le bilan de la "Foire Musulmane" du Bourget organisée chaque année par l'Uoif et qui rapporte un fort chiffre d'affaires ?

Comment sortir de ce statuquo ?

Quelques propositions pour une pratique religieuse respectée et régulée  

Avertissement : Il est une réalité qui apparaîtra peut être à certains comme une énormité et à d'autres comme une banalité : c'est qu'il existe bien une hiérarchie religieuse en islam. Celle-ci s'impose non pas comme un ordre religieux construit à l'exemple de celui de l'Eglise mais basée sur le savoir, la maîtrise, la connaissance et la compréhension religieuse. Cette faculté de la science théologique religieuse donne une position hiérarchique à ceux qui en sont capables et leur permet d'avoir qualité pour commenter, discuter d'un avis ou d'une interprétation appuyés sur le texte révélé, la vie du Prophète et sur l'enseignement des exégètes reconnus. 

Les personnes appartenant à cette hiérarchie religieuse feront autorité par leur aisance dans la connaissance du dogme de la religion et par son interprétation grâce à une formation religieuse d’un niveau supérieur. 

Par contre, il y aurait besoin d'un cercle de communicants capables de s'exprimer vers l'extérieur et les médias. Les religieux se confinant au travail purement théologique. 

En effet, il est un constat que cette communication fait défaut. Elle devrait être sous la responsabilité de personnes nouvelles qui en auraient la maîtrise. 

1) La mise en place d'un Conseil Théologique Musulman faisant autorité 

C'est donc la condition première à toute réussite d'une nouvelle organisation représentative musulmane totalement indépendante et inféodée à aucun parti politique ni à aucun pays étranger. 

A elle seule, cette structure résoudrait pratiquement tout le problème en débat aujourd'hui. Avec la seule réserve que la qualité religieuse des membres, de préférence de nationalité française, qui la composeraient serait indiscutable. Pour y siéger il faudrait ainsi faire preuve de compétences et de formations acquises qui seraient indiscutables. 

En plus des références de ses membres, cette autorité religieuse s'imposerait aussi par des avis bien motivés et incontestables. 

Elle serait l'interlocuteur religieux des administrations et le guide d'une communauté musulmane et elle aurait des attributions étendues en matière de religion. Comme par exemple le contrôle du personnel religieux et la délivrance d'un agrément à tout imam pour lui permettre d'officier le culte musulman. Ainsi on éviterait non seulement les "imams" de circonstance autoproclamés et capables parfois d'interprétations erronées. Mais surtout ceux qui prônent ce qu'on appelle le radicalisme ou l'extrémisme et qui sont tout deux étrangers à l'esprit de tolérance de l'islam.   

Il appartiendrait également à ce Conseil Théologique de valider toutes les associations à but religieux portant un nom lié à l'islam. Il aurait la compétence de donner l'aval à l'autorisation d'ouverture de tout lieu de culte musulman (mosquée, salle de prière). 

Ce Conseil Théologique mettrait aussi en action une commission chargée de valider et de contrôler les produits "halal" dont il aurait le strict contrôle de la certification. Voilà de quoi lui permettre d'avoir un financement pour l'ensemble de ses activités. 

La perception de ces différentes taxes dites du "halal" lui donnerait également les moyens financiers pour aider la création de lieux de culte officiels, d'écoles et de prendre en charge la formation et la rémunération des imams. 

Précision importante : 

Il serait logique et normal que ce Conseil Théologique, s'il venait à être créé, puisse avoir de préférence son siège à la Mosquee de Paris, symbole de l'Islam en France depuis sa création décidée en 1920 après l'hécatombe de la terrible première guerre mondiale de 1914/18 qui avait vue le sacrifice de plusieurs dizaines de milliers de soldats musulmans appartenant à tous ces régiments de l'Armée d'Afrique décimés mais toujours reconstitués. Le seul point à résoudre au préalable c'est que cette mosquée historique de Paris revienne sous la tutelle de l'Etat Francais comme elle l'était auparavant gérée par les Francais musulmans rapatriés.

2) Les besoins de la communauté

Le besoin premier ce sont des lieux de culte dignes, visibles mais assumant le rite avec discrétion et à dimension locale.

Aujourd'hui, les prières se déroulent bien souvent dans des conditions qui sont souvent inacceptables. Et parfois pire, quand elles empiètent sur la rue qui relève du domaine public et qui ne saurait être occupée ni perturbée par des pratiques religieuses, quelles qu'elles soient. 

Ensuite, se pose le problème des espaces confessionnels des carrés musulmans dans les cimetières qui devrait être réglé une fois pour toute. Le respect des rites funéraires selon la croyance des défunts ne mérite de souffrir d'aucun obstacle. Il importe de prévoir un espace dédié dans toutes les communes.  

Un autre besoin très attendu est celui de rendre actif un contrôle efficace et indépendant de la traçabilité des produits dits "halal" qui souvent n'est pas très claire au préjudice du consommateur musulman.  

Enfin, une intervention directe, rapide et ferme des procureurs de la République contre tout acte de discrimination, de racisme et d'islamophobie et faire appliquer la loi dans toute sa rigueur pour stopper les débordements qui se multiplient en ce moment.  

3) Administrer avec rigueur le fonctionnement des associations religieuses et des mosquées en fixant un délai d'un an pour celles déjà existantes afin qu'elles se mettent en conformité avec la loi

La responsabilité de la situation difficile que connaît aujourd'hui l'exercice de la pratique confessionnelle musulmane incombe comme on l'a vu, à l'encadrement souvent médiocre et incompétent des associations musulmanes sur les plans administratifs et religieux. Même si parfois il y a ici ou là des réticences administratives ou politiques.  

C'est pour toutes ces raisons qu'il est temps comme on l'a vu plus haut : 

-de mettre en place un organisme théologique musulman reconnu issu soit d'un accord entre personnels religieux qualifiés soit mis en place par les autorités sur la base de compétences validées par un diplôme d'une institution religieuse islamique. Il sera ensuite chargé d'imposer des critères d'autorisation et d'habilitation pour tout ce qui touche à l'islam. On ne peut laisser indéfiniment des gens non formés, sans contrôle ni validation quelconque, créer ou gérer une association qui porte le nom de la religion musulmane ou d'ouvrir et de diriger sans être agréés un lieu de culte. 

-Ne pas autoriser des personnes à s'ériger en responsables d'associations musulmanes sans qu'elles en aient les compétences et sans posséder au préalable une instruction de bon niveau si possible universitaire prioritairement française. Ces personnes compétentes ne manquent pas, elles sont nombreuses mais non sollicitées voir écartées. 

-De même, qu'on ne peut laisser exercer la fonction de chaire d'"imam" sans que soit vérifié par une commission un cursus d'études et de formation religieuses.

-Favoriser d'une façon ou d'une autre l'accès aux responsabilités associatives des nouvelles générations nées en France et qui sont souvent empêchées. En effet, les personnes en place ont tendance à refuser le renouvellement de leurs postes dans ces structures dans le seul but de préserver leurs privilèges et des intérêts personnels.

-Rendre obligatoire la présence de femmes, qui seraient volontaires, dans la gestion dirigeante de ces associations. 

4) Exercer un contrôle étatique strict et implacable

Le respect de la laïcité n'interdit pas à l'Etat de contrôler le fonctionnement de ces associations religieuses musulmanes et l'obligation d'un strict respect des statuts de la loi de 1901 ou de 1905 sous peine d'interdiction d'exercer. Il s'agit : 

-de vérifier régulièrement les comptes financiers et les mouvements d’argent suite aux quêtes et aux dons perçus par les associations qui sont versés surtout en espèce et en exiger la transparence. C'est là une des conditions pour éviter les abus éventuels. 

-de rendre obligatoire la tenue des Assemblées Générales avec présentation du bilan moral et du bilan financier. Ils doivent être validés par les fidèles. De même qu’il importe que des élections libres puissent désigner les Conseils d'administration et les bureaux comme le prévoient les statuts des associations  

-de limiter à 3 ou 5 ans maximum les mandats des membres du bureau et des conseils d'administration. Et éviter aussi qu'il y est des responsables dans ces organes ayant des liens familiaux entre eux. Rendre obligatoire une alternance des dirigeants afin d'éviter les abus de pouvoir et les abus de confiance. 

-de provoquer des contrôles financiers inopinés diligentés par l'administration en cas de besoin sur les comptes des associations et des responsables à titre préventif pour garantir une totale transparence, ce qui fait défaut aujourd'hui. 

Il est anormal de laisser cette religion gérée et dirigée par des personnes non qualifiées religieusement et administrativement et sans que leur façon de fonctionner ne fasse l'objet de contrôle, ce qui ne peut qu'entraîner d'éventuels abus. 

De très nombreuses associations ont toujours les mêmes dirigeants depuis 10, 20 voir 30 ans sans discontinuité. 

Ce sont là des questions urgentes si on veut sortir du marasme dans lequel se trouve la communauté musulmane car le manque de contrôle du fonctionnement de ces associations religieuses peut nuire à l'harmonie de la société et peut mettre en définitive le citoyen musulman dans une situation inconfortable et délicate. 

Les propositions énumérées ci-dessus sont partagées par un grand nombre de citoyens musulmans. Si elles étaient retenues elles pourraient contribuer favorablement au débat actuel.  

Conclusion : une communauté absente du débat qui la concerne

Peu de pratiquants ont entendu parlé de cette concertation des "associations musulmanes" déclenchée par le gouvernement sauf s'ils en ont été informés par les médias. Pratiquement, ni affichage dans les mosquées et ni annonce lors des prêches le vendredi n'ont été faits. Il n'y a guère eu de débat entre les fidèles ou les adhérents des associations (s'il en existe) pour savoir ce qu'il faudrait faire remonter. 

Pourtant, dans chaque lieu de culte il y a des personnes capables d'idées et de propositions écrites ou orales mais elles n'ont indéniablement guère été sollicitées. 

On aimerait aussi savoir si les associations se concertent entre elles avant d'aller rencontrer les représentants de l'Etat.

Quand sera-t-il pris conscience que c'est par la pratique du dialogue au sein des associations religieuses et par le renouvellement de leurs "responsables" que l'on pourrait améliorer la situation chaotique dans laquelle se trouve la communauté musulmane en France?

Ce n'est qu'à ces conditions décrites ci-dessus qu'il serait enfin possible de faire entendre à une opinion publique souvent déconcertée au sujet de l'islam, que cette religion, tout comme celles qui l'ont précédée, enseigne une morale élevée. Elle vivifie les belles vertus, incite aux bonnes œuvres, favorise l'émancipation de l'esprit et de la raison, réveille la volonté et recommande l'épanouissement de l'homme sur la voie de l'effort. 

On peut très justement regretter qu'il n'y ait pas aujourd'hui des personnes de la dimension d'un Émir Abdekkader, devenu citoyen français et dont le séjour en France avait forcé le respect et l'admiration générale. Défenseur de la minorité chrétienne à Damas en 1860 quand il s'y était installé, il avait superbement expliqué la magnanimité de l'islam par son comportement tolérant et par son érudition.(4)  

Où encore des intellectuels qui seraient à l'image d'un Djamel Eddin El Afghani, lequel de passage à Paris commenta la conférence sur "L'islam et la science" donnée à la Sorbonne par Ernest Renan. Le professeur Renan qui avait bien définit le concept de "Nation", était marqué par les philosophes musulmans Avicenne et Averroès (10 et 12è s.). Il reconnaissait qu'ils ont "représenté pendant cinq siècles la tradition de l'esprit humain". Cette dispute sur le rapport de la science et de la religion eut lieu dans le Journal des Débats dans un respect mutuel. L'auteur de "Vie de Jésus", qui a toujours admis l'authenticité du texte coranique même s'il n'y adhérait pas, pouvait se permettre de qualifier dans cet échange le cheikh El Afghani de "remarquablement intelligent" et de souligner qu'il avait "des arguments considérables". (5)

Dommage que les "élites" musulmanes ne soient plus à la hauteur des idées de ces hommes et de celles de nombreux autres tels Mohamed Iqbal, Cheikh Abdou, Malek Bennabi, Najmouddin Bamatte ou Mohamed Arkoun car comparé à tous ces penseurs le discours actuel est bien faible. 

En attendant, la responsabilité est lourde pour ceux qui en ont la charge.  

1) circulaire de mars 2015 du ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve adressée aux préfets pour organiser dans chaque département une consultation locale. 

http://circulaire.legifrance.gouv.fr/pdf/2015/03/cir_39347.pdf

2) Coran traduction Denise Masson, collection folio 1967

3) La Bible de Jérusalem 

4) Livre "Abdelkader au Château d'Amboise" de Mgr Dupuch 1849 réédition Ibis Press 2002

5) dans Journal des Débats du 29 mars et du 18 mai 1883. Nouvelle édition de "L'islam et la science" L'Archange du Minotaure 2005

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