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Billet de blog 21 avril 2020

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AU CHARBON LES SUBSTITUABLES !

Il ne suffit pas de se targuer d'une organisation irréprochable pour qu'elle devienne réalité. La communication a ses limites et en macronnie elle aussi est en crise. L'accumulation d'errements, d'hésitations, de nouvelles officielles mensongères et de déclarations contradictoires a fini par décrédibiliser la parole politique.

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Illustration 1

 À défaut d'arguments et de faits tangibles, le président ne dispose plus désormais que des éléments de langage que lui concoctent ses experts en manipulations.

Il y a bien longtemps que la parole présidentielle est appauvrie, vide de sens, décrédibilisée. Elle est désormais totalement démonétisée.

Qui peut encore croire une équipe dirigeante aussi peu lucide, aussi peu réaliste aussi peu consciente de la réalité de la situation ?

Il ne suffit pas de pérorer que tout est sous contrôle pour que la situation soit sous contrôle ! Il ne suffit pas de se pousser du col en prétendant haut et fort que tout était prêt pour que tout soit prêt sur le terrain !

Au cas présent, c'est même tout le contraire.

Dans nombre de pays des têtes seraient tombées face à une telle incurie.

Nombre de gouvernements – humiliés de tant d'incompétence - se seraient retirés d'eux mêmes.

En France il n'en est rien.

Campé sur son arrogance, convaincu d'une légitimité qu'il n'a jamais eu, le président de la République fait reposer le fonctionnement des derniers rouages de notre société en lambeaux sur ceux que l'on nomme désormais les premiers de corvées, ces femmes et ces hommes qui s'échinent jour et nuit pour assurer un minimum de service au public, sans moyens humains ni matériel approprié.

Après tant d'années de démantèlement et de destruction méthodique des services publics, ceux que le pouvoir méprisant traitait il y a quelques semaines encore de nantis et de privilégiés constituent aujourd'hui le dernier rempart avant l'effondrement généralisé de la start-up nation macronienne dont la seule vocation n'a toujours été que de générer en flux continu un ruissellement à haut débit de bénéfices en direction de l'actionnaire.

Dans ce contexte de faillite, notre salut repose sur les plus vulnérables, les plus démunis, les plus modestes, les moins protégés, celles et ceux de l'ombre.

Emmanuel Macron n'est certes que le continuateur de cette politique délétère menée depuis de trop nombreuses années par ceux qui l'ont précédé aux commandes de notre pays.

Il n'en est pas moins un disciple appliqué de ce dogme libéral, de cette lutte des classes des temps modernes menée sans relâche par les tenants du tout marché pour reprendre immeuble après immeuble, rue après rue, quartier après quartier les avantages, les acquis et les droits du plus grand nombre au seul profit de l'actionnariat triomphant.

L'économie réelle – celle qui produit de ses mains et de ses usines – ayant été largement démantelée et délocalisée, le capitalisme décomplexé ne cache plus depuis longtemps son objectif de produire, faire produire et commercialiser le maximum de biens – fussent-ils futiles et inutiles – lui permettant d'engranger quel qu'en soit le prix le maximum de résultat qu'il se gardera bien de redistribuer.

Il y a belle lurette que la consommation n'alimente plus la création d'emplois, la solidarité sociale et la couverture des besoins vitaux collectifs du pays.

Jamais il n'y a eu autant de misère. Jamais il n'y a eu autant de laissés-pour-compte. Jamais les services publics (santé, enseignement, culture...) n'ont été aussi dépourvus. Jamais le bien commun n'a été aussi délaissé, aussi appauvri, aussi dégradé, aussi malmené en si peu de temps.

Cette dégradation n'est en rien un dommage collatéral dû à l'application zélée des préceptes édictés par le catéchisme libéral. Elle est tout au contraire un objectif revendiqué, clairement énoncé et méthodiquement poursuivi.

Jamais les salariés, les travailleurs précaires, les intérimaires, les saisonniers, les intermittents, toutes celles et tous ceux auxquels on a fait miroiter les vertus du statut envié d'auto-entrepreneur – ces précaires que l'on a travesti en chefs d'entreprises (entreprises dont ils sont tout à la fois dans un subtil dédoublement de personnalité imposé, le subordonné malmené et le patron exigeant autant qu'intransigeant), jamais les artisans, les travailleurs indépendants, toutes celles et ceux qui traversent plus d'une rue pour aller travailler, toutes celles et tous ceux que le pouvoir traite d'invisibles lorsqu'ils se pressent dans le hall des gares au petit matin ou tard le soir, n'ont été aussi malmenés, autant méprisés, autant violentés par un pouvoir dont le cynisme l'a conduit à ne les considérer qu'en tant que négligeables et substituables 1.

Les mots, les incantations, les promesses dérisoires du discours du 13 avril 2020 n'y peuvent rien, jamais dans le même temps les bénéfices des entreprises transnationales n'ont été aussi importants.

1 voir à cet égard l'intervention du macroniste Laurent Alexandre (ENA, HEC) fervent soutien du gouvernement à propos du mouvement des Gilets Jaunes lors d'une table ronde sur le trashumanisme à destination des étudiants de Polytechnique, Centrale-Supelec et ENS Paris Saclay médusés, qualifiés par l'intervenant de « Dieux ».

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