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Billet de blog 17 novembre 2015

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Au début, ça allait

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Au début ça allait.

Tout est allé tellement vite. J’ai pas vraiment eu le temps de réfléchir, en fait.

Bizarrement, la proximité de l’attaque de mon lieu de vie ne m’a pas bouleversé plus que ça.

C’est tellement irréel.

Je tiens le coup, même pas peur.

Même si cette fois c’est vraiment passé près.

Et puis il a fallu gérer : l’annonce aux enfants, les rassurer.

« Oui, bon ok on va souvent au Petit Cambodge mais ne vous inquiétez pas, on y retournera, la vie continue. »

« Oui c’est pas loin du tout de l’école mais t’as vu c’était la nuit. »

Bref, rétrospectivement tu vois bien à quel point ça tient pas la route.

Lundi, faut bosser la tête vide, je fais mes trucs machinalement. Ca passe, faut bien. De toute façon c’est pas comme si on avait le choix.

Je me dis que ça va, je gère.

Pourtant je sens bien cette distance qui s’installe, dès le samedi, même avec la personne qui partage ma vie. Qui sanglote au réveil mais que je suis incapable de consoler.

Mais j’élude.

Je suis dans un tunnel et je ne m’en rends même pas compte.

Je repousse tout ce que je peux, y compris la moindre décision.

Par contre je suis vachement content d’avoir réparé mon vélo, tu vois ?

Ouais parce que je suis un bobo et je donne une leçon de dignité au monde entier. Je roule en vélo, non pas parce que je flippe ma race mais parce que je prépare la COP21, genre.

Et puis vient le moment où je me  dis que je vais me botter le cul et reprendre le cours de ma vie et faire un truc que j’adore : ALLER A UN CONCERT QUOI !

Je me fends même d’un tweet bien bravache en réponse au groupe qui confirme son concert : I’LL BE THERE LET’S HAVE A PARTY !

J’y crois. Dur comme fer.

Jusqu’au moment, lundi soir, où les gosses avant de se coucher font un petit conciliabule et annoncent, tranquillement du haut de leurs 9 ans : « Nous on veut pas que vous alliez à ce concert. Vous risquez de mourir et on ne veut pas être orphelins ».

Et là tout ce que je ne voulais pas voir me revient en pleine figure. Avec en bonus cette peine infinie que mes gosses de 9 ans en viennent à appréhender calmement que la mort violente de leurs parents au coin de la rue est une hypothèse plausible.

Tu n’es pas censé affronter ça à 9 ans.

Personne n’est censé affronter ça, ceci dit.

Et là je ne sais plus quoi faire.

Bien sûr nous n’irons pas à ce concert. « Seulement cette fois-ci » on leur a dit.

Je ne sais même pas si j’ai peur, je me sens vide. J’ai les larmes aux yeux, souvent.

Je me rends compte que je n’arrive pas à suivre l’actualité, parce que je ne sais que trop ce que je vais y trouver : la médiocrité de certains – beaucoup - de nos politiques, le lâcher de fachos, les donneurs de leçon et le pire qui reste à venir. Je regarde pousser les drapeaux, je regarde mon monde virtuel devenir bleu blanc rouge. Je regarde l’histoire défiler devant moi, celle qui s’écrit avec un grand H, celle de la rencontre avec les grands hommes.

J’y crois pas aux grands hommes. Si au moins c’étaient des femmes.

Ce que je vois venir, c’est un mauvais remake de ce qui s’est passé aux Etats-Unis il y a 14 ans et qui a créé ce que nous vivons aujourd’hui.

Je ne sais pas quoi faire.

Ce qui est sûr, c’est que je ne vais pas aller vivre à Aurillac (sorry, no offence) pour me sentir en sécurité.

En fait je voudrais simplement que mes gosses vivent avec l’insouciance de leur âge.

Mais ça je crois que ça va pas être possible.

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