Samedi 6 novembre dernier à Beyrouth avait lieu l’étonnant concert d’un jeune avocat libanais iconoclaste reconverti dans la musique.
Dans l’amphithéâtre de l’Université Saint-Joseph qui était barricadée par les militaires en raison de l’organisation sur place d’élections étudiantes très politisées et sensibles, Nadim Bou Khalil, une trentaine d’années, donnait l’un de ses premiers concerts accompagné de musiciens européens revêtus des maillots de grandes équipes de foot pour l’occasion.

Fils d’un grand avocat beyrouthin, et lui-même avocat, Nadim Bou Khalil a choisi de bifurquer vers l’une de ses vieilles marottes : celle de la poésie, de la musique et des chansons à texte. Il a déjà publié 5 recueils de poésies et deux CD disponibles au Virgin de Beyrouth.

Et pour son début de carrière musicale, Nadim qui réside à Mairuba dans les montagnes du Liban n’y va pas de mains mortes en dénonçant son ancienne profession. Dans une chanson intitulée « Les Avocats », il stigmatise la profession avec le refrain satirique suivant :
« les porcs de la bourgeoisie
dans des peaux de corbeaux
sécrètent l’hypocrisie
et un calme de tombeau »
Dans un style proche d’un Vincent Delerme et avec une voix de velours, Nadim est un peu le Alain Souchon libanais. Il chante des thèmes mélancoliques comme « Dialogue entre un cri et un chuchotement », et « Puisque » ou d’adolescents comme : « Mon canapé », « Les pucelles ».
Ses premiers mots d’accueil étaient dédiés aux victimes d’attentats politiques depuis 1975 et aux amours impossibles entre communauté religieuses. Très touchants. On pense alors aux affreux et lâches assassinats politiques de ces dernières années (comme ceux de Samir Kassir et de Gebran Tuéni), et aux cas de nombreux jeunes libanais obligés de fuir à l’étranger le conservatisme de leurs parents. Son père, pas du tout rancunier malgré la diatribe contre sa profession était visiblement fier de filmer lui-même un des premiers concerts de son fils.
Si c’est un immense honneur pour la France que d’avoir des chanteurs francophones au Moyen-Orient, le conseil que l’on pourrait lui donner est d’utiliser ses talents plus souvent en France et le mettre aussi au service de grandes causes. Il y aurait là un créneau !
Le Liban et le Moyen-Orient mériteraient plus de portes paroles en France. Et avec son grand talent pour les textes, Nadim pourrait faire passer des idées. Certains artistes libanais comme Abdel Rahmane El Bacha, pianiste franco-libanais renommé et résidant en France, grand spécialiste de Chopin, fait la promotion d’idées d’ouverture notamment en donnant des concerts dans le cadre de l’ADICR (Association pour le dialogue interculturel et religieux).
Ce petit bout de terre bordé par la fameuse « Mare Nostrum » et porte de l’Orient qui réunit malgré eux Chiites, Sunnites, Maronites, et Orthodoxes Grecs ou Arméniens est en effet un terreau très propice à l’émergence d’idées qui transcendent les religions, les ethnies et les nationalités. C’est de ça dont le monde à besoin. Que Nadim vienne nous le chanter !
Car le Moyen-Orient est particulièrement lésé par les médias occidentaux qui ne s’intéressent qu’aux problèmes de la Guerre en Irak, qu’à une couverture superficielle des conflits militaires, qu’au fondamentalisme islamique ou encore à juste titre à la pauvreté. Mais jamais l’intérêt n’est porté aux habitants ordinaires. Voici en image ce qu’est le Liban, autrefois baptisé la « Suisse» du Moyen-Orient :
2009 sera l’année des élections législatives. Toutes les élections sont très sensibles au Liban.
Il faudra mettre en garde les adeptes des coups tordus. C’est parfois aux artistes de s’emparer de ces sujets en apportant humour et légèreté. Comme le chante Souchon : Abderhamane, Martin, David : Et si en plus y a personne !
Voici quelques images du Liban :


Beach Club Eddé Sands vers Byblos à 45 mn de Beyrouth, un des club ou les libanais vont faire la fête

Forêt de Cèdres du Liban qui délaisse trop souvent les problématiques écologiques