Islamophobie, anti semitisme : comparaison n'est pas raison

J’ai lu et relu l’article de Guillaume Weill Raynal publié dans le club de Médiapart https://blogs.mediapart.fr/guillaume-weill-raynal/blog/150916/oui-l-islamophobie-actuelle-ressemble-l-antisemitisme-des-annees-30 qui fait un parallèle entre le discours islamophobe et le discours antisémite d’avant guerre, mais j’ai lu aussi les nombreux commentaires qui vont de l’invective à l’analyse, le mien essaye de rester dans le domaine ce cette dernière. Cet article m’a mis mal à l’aise pour deux raisons. La première, parce ce que ce qu’il décrit est vrai. On peut même approfondir la comparaison. Zemmour a le talent pamphlétaire de Drumont, Onfray par certains côtés est Barrésien et, au sexe près, Marine sur les tréteaux et les plateaux ressemble à Déroulède. Marcel Déat pointe son nez chez quelques socialistes et la bedaine sanglée de Doriot bat les estrades du FN depuis longtemps. Mais la métaphore de ces années sombres ne montre pas que le contexte et les situations sont très différentes et que l’époque en question, même si elle l’a permis, n’avait pas encore connu ni le Veld‘hiv ni Drancy. La seconde raison qui me met mal à l’aise avec cet article, est qu’il semble être le point de vue symétrique du concept d’islamo-fascisme dont j’ai montré la bêtise conceptuelle dans le journal de l’IRIS : http://www.iris-france.org/55686-lislamo-fascisme-une-grave-erreur-danalyse-et-de-jugement/ , une sorte de point Godwin qui annihile toute analyse sérieuse sur notre histoire, même si Guillaume en introduction lève prudemment sa plume pour justifier la suite de son analyse.  Si Paul Ricoeur  estimait que la métaphore pouvait avoir une certaine efficacité heuristique, il expliquait aussi que l’événement qui est le surgissement du passé dans notre présent ne peut pas fonder une analyse. Ces comparaisons historiques qui ne sont pas raison, embrouillent le débat public. Elles clivent et tentent de mobiliser autour de slogans ou d’idées qui font appel au ressentiment, à la peur, plutôt qu’à l’intelligence des situations, ce dont on manque cruellement aujourd’hui. Un projet d’affiche anxiogène du parti socialiste pour engager la campagne des présidentielles est assez éloquent à ce sujet. On y voit sur un fond violet sombre, la France, barrée des deux flammes du logo du FN en rouge et noir, avec le slogan : « FN le côté obscur de la France ». On distingue un oeil à gauche (sur la Bretagne ?), comme en embuscade. Le message est clair : le FN = Dar Vador = le casque à boulon noir = nazi. Ca promet pour la tenue des débats. Pauvre France.