«S'accrocher à des vieilles lunes socialistes qui vous ont conduit au pouvoir en 1997 par effraction [...] oui par effraction parce que c'est sur un coin de table que vous avez rédigé l'affaire des 35 heures, c'est sur un coin de table que vous avez rédigé M. Strauss-Khan et Mme Aubry, l'affaire des emplois jeunes, et c'est sur un coin de table que vous êtes en effet arrivés aux affaires et c'est sur un coin de table que vous rédigez un projet aujourd'hui caduc qui ne correspond en rien à la réalité économique de notre pays...».
C'est en ce termes que François BAROIN, Ministre de l'Economie et des Finances s'est exprimé aujourd'hui mardi 8 novembre 2011 dans une séance de questions au Gouvernement au lendemain d'un second Plan d'Austérité annoncé par l'austère de Matignon, le Premier Ministre François Fillon.
Et bien entendu, la séance houleuse a été levée séance tenante par Bernard Accoyer, le président de l'Assemblée nationale sous les quolibets des bancs de la Gauche à l’égard de l’imprudent, imposteur, impertinent, mais si habile Ministre de l’Economie et des Finances.
Et au-delà de la stratégie de radicalisation de la bataille politique qui s’engage pour les élections présidentielles du printemps 2012, des passes d’armes classiques en pareil cas, et de la possible volonté de provocation d’un ministre d’Etat qui provoque délibérément l’Opposition pour ne pas avoir à justifier l’injustifiable politique de destruction du modèle social français né de la réflexion de membres du Conseil National de la Résistance, c’est un message clair, un de plus que lance la Droite au Peuple de France. La guerre ouverte est déclarée à la Gauche (c’est normal) et au Peuple (c’est un scandale). J'y vois bien entendu aussi, cette croyance permanente chez certains élus de droite, que celle-ci (la droite) a vocation naturelle au pouvoir à l'exclusion de toutes les autres composantes de la vie politique. Bref, le pouvoir s'exercerait de manière "naturelle" par les représentants des partis de la Droite et les conservateurs. La droite considéère que le pouvoir "lui revient de fait et naturellement", car de ses rangs sort l'élite seule capable de l'exercer...
En écoutant François Baroin parler de « lunes socialistes » et regardant en streaming la vidéo de son intervention dans l’Hémicycle du Palais Bourbon (Voir la vidéo ici : http://www.youtube.com/watch?v=Py9K5X0byFg&feature=player_embedded)
m’est soudain revenu en mémoire ce livre exceptionnel de Georges BERNANOS, Les grands cimetières sous la lune. J’avais croqué jadis rédigeant ma maîtrise d'histoire contemporaine, dans ce formidable témoignage sur la Guerre d’Espagne écrit depuis Palma de Majorque par ce grand intellectuel de Droite. Bernanos y assène un véritable pamphlet contre la Droite franquiste et la Droite française incapables d’humanité à l’égard des républicains espagnols condamnés au peloton d’exécution. Ce sont ces républicains espagnols qui peuplent les « grands cimetières sous la lune ». Et je ne peux m’empêcher de penser à nos frères espagnols touchés par un chômage massif de plus 22% de la population active, dont la moitié sera en fin de droits en fin d’année et nos frères de France et d'Europe qui sont en souffrance. Qui travailleurs pauvres, qui chômeurs, qui allocataires des minimas sociaux...
Alors quand François Baroin, parle des « vieilles lunes socialistes », je ne sais à qui il pense, mais moi, ce qui est sur, c’est instinctivement à au grand Jean JAURES que je pense. A l’homme de paix, au leader socialiste originaire de Castres. A Jaurès le paysan, Jaurés l’occitan, Jaurès l’apôtre de la paix, Jaurès qui a toute sa vie mis la « question sociale et le Peuple » au cœur de ses préoccupations d’homme d’Etat. A Jaurès le dreyfusard, luttant contre toutes les intolérances et les injustices, la figure tutélaire du Front populaire qui a défendu la démocratie, les libertés fondamentales et la République lorsque celles-ci étaient menacées dans les années 30. Jaurès qui a été au fond la première victime de la Grande guerre, assassiné à Paris le 31 juillet 1914. Lui qui disait en 1914, en voyant le vilain tour que prenait alors l’Europe des nationalismes au bord de l’abîme : « Chaque peuple paraît à travers les rues de l’Europe avec sa petite torche à la main et maintenant voilà l’incendie ». Il reprochait alors aux ministres « à la tête légère » de ne pas faire tout pour éviter la guerre. Jaurès n’était jamais aussi bien qu’au milieu des siens, du peuple, des gens du commun. L’Europe est aujourd’hui au bord de l’abîme par la faute de politiciens cupides et malhonnêtes et les peuples au bord du précipice. Or c’est d’un homme de paix que nous avons besoin à la tête de notre Etat, de notre Exécutif. Et qu’avons-nous à la place ? Un Exécutif qui attise la guerre sociale, qui au lieu de sécuriser le Peuple, sécurise les marchés financiers qui mettent les Peuples à genoux avec la complicité des politiques.
Car aujourd’hui, c’est de guerre dont il s’agit. Mais d’une guerre sociale, d’une lutte contre les Peuples de la part des nantis et les hommes qui roulent pour eux. Les républicains espagnols qu’hier Franco faisait fusiller, ce sont les Peuples d’Europe qu’aujourd’hui les Plans d’Austérité accablent. Ce sont nos frères grecs, nos frères « indignés » de toute l’Europe contre lesquels les gouvernements asservis ont décidé de mener une guerre sociale. C’est ici le néolibéralisme de Reagan et Thatcher qui est en action. La « crise » économique et celle de la dette souveraine ont bon dos, mais c’est un système pensé pour faire la guerre aux peuples qui est mis sciemment en œuvre. Ce quinquennat a réussi le tour de force de « prendre aux pauvres pour donner aux nantis ». C’est proprement révolutionnaire. Où est « l’Esprit de Philadelphie ? ». Pour mémoire, voir l’excellent ouvrage de Alain Supiot, L'Esprit de Philadelphie - La justice sociale face au marché total(Seuil, janvier 2010, 13€), et l’excellent article que lui consacre de Laurent Mauduit ici : http://www.mediapart.fr/journal/france/290110/justice-sociale-le-manifeste-de-lapres-guerre-aux-oubliettes
Aujourd’hui durant le G20, notre président de la République dort dans une suite royale à 37 000 € la nuit dans un palace cannois. (Voir ici : http://www.ladepeche.fr/article/2011/11/08/1210846-g20-la-nuit-a-37-000-de-sarkozy.html) et dans le même temps demande à son Premier ministre de présenter aux « bon peuple » un second Plan d’austérité frappé du sceau de l’injustice. Un Plan de désespérance, un Plan d'anéantissement des peuples qui n'est qu'à son début...
Le premier acte de cette guerre-là, c’est de priver les Peuples souverains de nos démocraties du droit de contrôler l’action de leurs magistrats une fois ceux-ci élus. Et l’exemple du « référendum » grec dont les ténors du G20 cannois ont exigé l’annulation en est une preuve. En France, nous avions connu cela dans le cas du Traité « simplifié » de Lisbonne passé par voie parlementaire en 2007 pour apprendre au Peuple français qu’il ne faut pas aller à l’encontre des dictateurs. Jean Jaurès disait « La réforme des institutions vient trop tard quand le cœur des Hommes est brisé… ». Or aujourd’hui ce sont les agences de notation, les marchés financiers prédateurs et les banksters qui imposent leurs vues aux magistrats élus (de Droite) « corrompus » idéologiquement par le néolibéralisme aux accents reaganiens et thatcheriens. « There is no alternative » voilà le crédo, le catéchisme néolibéral de la clique au pouvoir en France depuis 2007. Et cette idéologie corrompue ne supporte pas le peuple. Il faut l’écraser, l’épuiser, le fatiguer, le diviser, l’éreinter, bref, il doit se soumettre aux forces du Capital, du Travail à la chaîne, à l’esclavage, à la soumission, à l’abdication, au renoncement au bonheur. La Droite française au pouvoir mène aujourd’hui une politique claire. C’est « la revanche des nantis qui n’ont jamais accepté que les gouvernements du Front populaire et plus tard de mai 1981 ». Il faut démanteler les lois sociales de 1936, de l’Après-guerre et de 1981. Ainsi, comme a pu le dire dans une tribune au magazine Challenges, Denis Kessler, ex-numéro 2 du MEDEF s'enthousiasmant des premiers mois de présidence de M. Sarkozy : "Il s'agit aujourd'hui de sortir de 1945, et de défaire méthodiquement le programme du Conseil national de la Résistance !". Au moins les choses sont claires. Il faut en finir avec les congés payés, les retraites, la Sécurité sociale, la santé, l'éducation nationale et j’en passe.
Aujourd’hui, alors que nos politiques se couchent face à la « dictature des marchés » dans la main desquels ils mangent, l’intervention de François Baroin à l’Assemblée nationale est une insulte à la « démocratie » et au « Peuple souverain ». Comment peut-il oser dire, lui le Ministre d’Etat que les socialistes ont pris le pouvoir par effraction en 1997 ? Y a-t-il eu Coup d’Etat de la Gauche en 1997 ? Pas du tout. C’est à la suite d’une victoire aux législatives et de l’impopularité grandissante de la politique d’austérité (déjà) du Premier ministre le plus impopulaire (ou presque), de la V° République aujourd’hui Ministre des Affaires étrangères, Alain Juppé, considéré par beaucoup à l’époque et notamment son mentor politique Jacques Chirac comme « le plus brillant d’entre nous !!! ». Pas de coup de force, pas de coup d’Etat donc, sinon un coup d’Etat permanent des économistes, des banquiers, des financiers et autres diafoirus qui peu à peu « assassinent le malade ». Comme disait Bernanos : « A en croire les bien-pensants, l’ouvrier comblé crèverait de bien-être ». Il faut donc lui retirer et détricoter comme à tous ses frères de misère et d’infortunes (5 millions de chômeurs, 1 millions de français au RSA, 100 000 SDF, 8 millions de pauvres, 17% de smicards…) les lois sociales qui lui offrent un peu de dignité et de confort. Objectif ? Passer la corde à nœud coulant autour du cou…
Plutôt que de lune, c’est du soleil que l’on veut. C’est de l’espoir. C’est un nouveau Front populaire qui saura redonner vie à notre démocratie (couchée et rampante, si je suis optimiste) et dignité aux français qu’il nous faut. Mais ce sont des hommes de "gauche" qui se rapprocheront du Peuple et je n'en vois pas beaucoup et sans doute pas celui qui est investi par le PS. Il devrait lire et relire le grand Jaurés lorsqu'il disait: "Le capitalisme porte en lui la guerre comme la nuée porte l'orage". Il faudra apporter la paix et la raison, mais faire une guerre sans merci aux marchés...
M. le Ministre, vous n'étiez sans doute qu’un bon soldat aux ordres, en mission aujourd’hui, mais vous avez insulté les institutions, le régime politique (République), le Peuple souverain (en théorie, mais plus du tout en pratique) et vos collègues députés. C’est une démission pure et simple qui s’impose. Puisse un intellectuel de Droite rappeler à l’ordre cette clique au pouvoir comme avait su le faire le grand Georges Bernanos en 1938 ? Enfin j’espère que de grands cimetières sous la lune attendront l’exécutif et les parlementaires de cette Droite arrogante et corrompue en mai 2012. La France et les français sont à genoux. Un deuxième quinquennat et on tuera le malade comme on le fait en Grèce aujourd'hui et le fera en Italie demain. La Grèce berceau de la démocratie. L'Italie, berceau de la République et du Droit écrit....
Puisse le peuple retrouver la ferveur de mai-juin 1936 et mai 198, la Gauche (la vraie), le pouvoir et la Droite goûter aux charmes de misère, de la précarité et de l’exclusion…
Un seul mot d’ordre pour 2012, au sujet de de ces fondés de pouvoir des marchés financiers et la clique au pouvoir, qui à l'image de l'expression utilisée par Baroin "prise de pouvoir par éffraction", démontre que la Droite considère que c'est la seule à devoir occuper le Pouvoir. Un mot d'ordre: No pasaran !!!