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Combien de temps avez-vous accordé au montage de Sa rafale, dont la gestation a pris du temps ? Et pensez-vous qu’il est plus difficile de monter votre propre travail, pour vous qui êtes monteur ?
Maxime Garault : Paradoxalement c’était le montage le plus simple que j’ai fait jusqu’à présent. Je l’ai tourné en 2020 et je n’étais pas convaincu. J’ai laissé le film dans un carton et en 2023 j’en ai parlé à une amie qui a demandé à voir des images et m’a dit de le monter. La structure était assez simple, mon inquiétude était surtout qu’il y ait un épuisement et il fallait qu’il y ait quelques variations à l’intérieur du dispositif. Donc, on commence les volets fermés, un espace clos pour recréer un peu l’espace mental de l’hôpital et peu à peu la lumière revient, un mouvement vers l’extérieur. Avec cette progression les tableaux ne pouvaient qu’être dans un certain ordre, il fallait commencer par celui qui se faisait volets fermés, etc... Avec le récit chronologique en voix off et ces peintures le montage était très simple, la question était de déterminer le moment où je coupais pour mettre les déjeuners, ce que j’utilisais comme matière de la peinture, pour faire résonner le travail de Guillaume… et faire coïncider un minimum le récit avec le tableau en cours. Monter mes images a toujours été plus simple pour moi parce que je n’ai pas peur d'abîmer le travail de quelqu’un d’autre. Et comme je l’ai commencé seul il n’y avait pas d'attente autour de ce film donc j’avais beaucoup de liberté.
Quelles sont vos influences et que pensez-vous des documentaires sur les hôpitaux psychiatriques ?
C’est étonnant parce que je n’en ai pas vu tant que cela. Par contre, bien après l’avoir monté j’ai vu 12 jours de Depardon et j’avais été un peu gêné par quelque chose d’un peu surplombant et surtout, sans trop en dire, dans nos deux films il y a un personnage qui a commis le même crime, sauf qu’il est vraiment montré comme un fou chez Depardon et dans mon film cette personne souffre de son geste. En fait, je pense qu’être à hauteur de patients, parce que j’ai été moi-même hospitalisé, amène à une approche différente et je ne pense pas que j’avais encore vu de film qui parlait à cette hauteur-là. Je n’ai pas l’impression que le film raconte quelque chose de très important sur la psychiatrie, il me semble que c’est juste un film sur l’empathie que j’ai eue pour le parcours des personnes que j’ai rencontrées là-bas. S’il y a une influence c’est notre désir avec Guillaume de convoquer la figure de ces personnes de façon magique par la peinture et par la voix. C’était pour moi une façon de les faire exister un peu plus longtemps dans ma vie aussi.
Le film ressemble-t-il à ce que vous imaginiez initialement, notamment dans le fait qu’une partie est assez indépendante de vous, reposant sur la création artistique de Guillaume ?
Je ne m’attendais pas à ce que les portraits me rappellent les personnes en question et quand il a peint le premier et que j’ai retrouvé quelque chose de la personne que j’avais connue je me suis dit « waouh c’est fou » ! Guillaume a cette sensibilité, cette capacité à capter, et je pense que l’expérience de la maladie a un effet sur son rapport à la peinture, il y avait une beauté dans ce qu’il captait. Je ne l’ai pas mis dans le film mais avant chaque portrait je lui parlais de la personne qu’il allait peindre. Je ne savais pas exactement où ça allait et à quoi ressembleraient les portraits, mais j’étais heureux de passer un moment avec Guillaume et il y a quelque chose et de lui et des patients, qui s’exprime. J’aime bien cette idée qu’il y ait quelque chose qui nous échappe à toutes et à tous, et que ça crée du lien entre toutes ces personnes.
Propos recueillis par Eleanor Murphy
Le film sera projeté :
samedi 22 mars à 17h30 au Saint André des Arts
mardi 25 mars à 14h à l'Arlequin 1