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Billet de blog 26 mars 2025

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Entretien avec John Smith, réalisateur de Being John Smith

Porter le nom le plus commun d’Angleterre, c’est un fardeau que le cinéaste John Smith a transformé en film. Entre documentaire et expérimentation visuelle, il nous invite à réfléchir de façon décalée sur la question de l’identité. What is it like Being John Smith?

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Illustration 1
© John Smith

Ce titre évoque à la fois l'identité et l'anonymat. Votre nom a-t-il été une source d'inspiration pour vous ? 

Vous savez, en tant qu'artiste, on est censé se démarquer, pas rester anonyme !  Honnêtement, je ressens souvent un certain embarras à cause de mon nom. Je ne dirais  pas qu'il m'inspire, mais il a sans doute influencé mon travail. Je fais des films sur le  quotidien et l’ordinaire et mon nom est lui-même d'une grande banalité. 

Tout au long du film, vous oscillez entre l'envie de « vous démarquer » et celle de  « vous fondre dans la masse ». Cette dualité a-t-elle influencé votre parcours  artistique ? 

Il est très important pour moi de m’intégrer, même si une part de moi aimerait me  distinguer. Mais je veux que mon travail soit accessible à tous, y compris à ceux qui ne  sont pas familiers avec l'art ou le cinéma. C'est pour cela que l'humour occupe une place  essentielle dans mon travail, il rend les films plus accessibles. 

Ce film emprunte un ton et une approche très autobiographique, comment est-ce  qu’il co-existe avec vos films précédents ? 

J’essaye depuis les années 70 de faire des films qui ne se ressemblent pas ! J’aime  quand le public ne devine pas que c’est mon film jusqu’au générique. Je pense que le fil  rouge dans mon travail est la volonté de faire planer le doute. Je n’ai pas envie que le  public ne me fasse pas confiance mais je veux qu’il reste sur ses gardes. Il faut provoquer  surprise et incertitude, sinon j’ai juste l’impression de nager dans une soupe tiède. Dans  ce film en particulier, j’emprunte des éléments autobiographiques, mais les intertitres et les  images retravaillées font douter sur la véracité absolue de mon récit. Pour ça, je joue avec  la tension entre image, son et voix off, toujours avec humour, parce que sinon à quoi bon !  J’adore perturber les attentes des spectateurs.  

Being John Smith est dans la veine du (net) found footage avec beaucoup d’images  fixes, pourquoi choisir cette forme ? 

J’avais envie de faire un film sur mon nom depuis longtemps, et l’envie s’est matérialisée  avec le plan qui clôt le film. En fouillant dans les affaires de mon père, photographe  amateur prolifique, je suis tombée sur une photo de moi à trois ans. J’avais le début et la fin de mon histoire, il fallait que je trouve le milieu. J’ai rédigé mon script et j’ai partiellement  rempli les vides sur ma table de montage, sans le souci de tout combler, parce que j’aime  des écrans noirs qui ouvrent d’autres narrations. En regardant ce que j'avais, ça m'a paru  très conventionnel, alors j’ai utilisé ces intertitres pour instiller de la surprise et du doute.  J’étais davantage satisfait et ça me permettait de mieux représenter comment je me  sentais face au contexte politique actuel. Ah et je m’arrange toujours pour faire des films  sans budget : le voici. 

Justement, votre film porte une forte dimension politique. Pensez-vous que le  cinéma, même expérimental ou autobiographique, doit toujours avoir une portée  politique ?

Je ne pense pas qu'il doive y avoir des règles. On ne devrait pas culpabiliser si l'on veut  simplement filmer de jolies fleurs sans message politique. Mes premiers films étaient  purement visuels, sans sous-texte engagé. Pourtant, aujourd'hui, avec la situation  actuelle, j’aurais du mal à faire un film sans résonance politique. D'une manière ou d'une  autre, tous mes projets récents intègrent cette dimension. 

Ce film a-t-il changé votre relation avec votre nom et votre identité ? 

Réaliser ce film a été une expérience cathartique. J'avais tant à dire sur mon nom que le  processus a été assez fluide. Bien sûr, j'exagère certains aspects pour l'humour, mais tout  repose sur un ressenti authentique.  

Propos recueillis par Lucile Gautier et Assia Tahiri 

Le film sera projeté : 

Mercredi 26 mars à 21h à l'Arlequin 1 

Vendredi 28 mars à 14h au Saint André des Arts

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