L’héritage
Au jeu des ressemblances, Marcello Mio multiplie les moments de grâce trouble. La magie du cinéma permet que par instants, dans une démarche ou une mimique, l’image de Marcello se glisse dans le regard de la spectatrice grâce à la présence de Chiara. Plaisir d’une reconnaissance fugace. Mais le propos est vertigineux : au-delà de l’apparence, que tenons-nous de nos parents? Jusqu’où vivent-ils en nous? Désirons-nous leur ressembler? toute fille ne ressemble-t-elle pas autant à son père que tout fils à sa mère?
Réel, fiction ou mémoire
La circulation des références donne un doux vertige. Honoré filme un Marcello proustien lorsqu’il plonge dans la fontaine de Trevi de La Dolce Vita avec le costume d’Intervista - où chez Fellini Mastroiani âgé revoyait la scène. Ici il ne s’agit pas tant de revoir que de rejouer, avec une grande légèreté. Marcello, Catherine ou Chiara sont à la fois des personnes et des personnages de cinéma. Honoré joue autant de leurs biographies que de leurs cinématographies, les renvoyant finalement toujours à la mémoire de la spectatrice.
Un regard sur la transition sociale
Là où le film acquiert à la fois légèreté et profondeur, c’est que Chiara ne veut pas devenir Catherine mais Marcello. Il est d’ailleurs délicieux de voir revenir Melvin Poupaud en amour de jeunesse de Chiara (ce qu’il était) : on ne peut pas tout à fait oublier son Laurence Anyway. Autour du nouveau Marcello, c’est l’incompréhension. Sauf chez Luchini, qui lui, immédiatement, assume le changement de genre, et fait un bien fou à Chiara-Marcello.
Ode au spectateur
Ce que le film transmet, c’est aussi une furieuse envie pour une femme d’expérimenter ce que cela fait que de se glisser dans le costume d’un homme - avec moustache . Et Marcello Mio nous rappelle par la même occasion la force du cinéma (comme de la littérature avant lui) : nous permettre de nous glisser dans d’autres corps que les nôtres.

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