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Billet de blog 12 septembre 2023

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Anatomie d'une chute pour désosser le cinéma

D’une facture assez classique et sans esthétisme tapageur, "Anatomie d’une chute" déborde du film de prétoire pour livrer une mise en abîme des moyens du cinéma. Au scalpel.

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La justice peut-elle s’en tenir aux faits? A la physique des corps? Il y a des corps qui chutent (balle, mannequin). Ce sont des corps dans des espaces - ceux de la géographie d’une vie (Berlin, Londres, Grenoble ou le chalet) ou du quotidien (l’enfant se repère avec des marques collées aux murs). Le film noir nous rappelle que là où l’on se trouve conditionne ce que l’on voit et ce que l’on entend. La vérité des faits est aussi affaire de point de vue, si l’on confronte par exemple deux experts balistiques. C’est que la vérité s’énonce. Et avec la parole, tout se brouille. Pas de vérité sans possibilité du mensonge. 

A ceux qui connaissent la vérité (comme l’insupportable personnage du psy, joué par Wajdi Mouawad) s’opposent ceux qui vivent l’opacité du réel. D’abord Sandra (Sandra Huller joue un personnage ayant le même prénom que le sien) et surtout Daniel, l’enfant malvoyant. Pour ce dernier, le monde est tellement opaque que tout l’enjeu est pour lui d’en venir à se forger une conviction. Avec lui, on ne découvre pas la vérité, on en décide, à l’aide de ses souvenirs. 

Corps dans l’espace, point de vue, jeu, découplage du son et de l’image, utilisation du réel pour bâtir de la fiction, production d’images à partir d’une bande son… tout cela fait aussi d’Anatomie d’une chute une dissection méthodique des moyens de l’écriture cinématographique. Magistrale et jamais pédante.

Illustration 1
Avocat général : point de vue narquois d'un corps-costume qui sait © Les films Pelléas, Les films de Pierre

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