20000 espèces d’abeilles d'Estibaliz Urresola Solaguren : se faire un nom
Le cinéma ibérique voit l’émergence de réalisatrices qui filment l’enfance, l’été, à la campagne, sans mièvrerie. Après le drame familial catalan Nos soleils, de Carla Simon (Ours d’or à Berlin) et l’onirique Alma Viva de Cristele Alves Meira, voici le basque 20000 espèces d’abeilles - également repéré à Berlin avec un prix d’interprétation pour la jeune Sofia Otero. Estibaliz Urresola Solaguren joue des plans rapprochés sur les visages et de somptueux plans d’ensemble, notamment lors de deux magnifiques scènes de baignade, pour brosser l’émergence de l’identité trans d’une enfant comme un drame familial, et pas seulement individuel.
Dans cette famille, comparée à une ruche, aucun personnage n’est laissé de côté. Les tourments existentiels de l’enfant percutent l’élan artistique de la mère, confrontée à la falsification, tout comme sa propre mère l’a été au mensonge. Face à cette grand-mère qui a choisi de regarder ailleurs se dresse une tante un peu sorcière, capable elle de voir et d’écouter. La force symbolique du christianisme irrigue tout le film, de Santa Lucia au baptême, rejoignant des croyances plus païennes autour des voeux jetés au feu, des abeilles ou d’une statue sauvée des eaux. C’est dans la densité de cette trame culturelle que chacune se révèle. Rappelant qu’il est difficile d’envisager un genre hors de la culture qui lui donne ses formes.
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