Il y a un changement significatif dans le comportement des électeurs en France et de façon générale dans plusieurs pays du monde : Dégoûtée par l'attitude du personnel politique (de droite comme de gauche) qui les trahit, une partie toujours plus importante des citoyens se tournent vers des nouveaux venus n'appartenant pas à « l’establishment » qui, empruntant sans vergogne les éléments les plus populistes du discours politique, réussissent à les convaincre qu'ils sont, eux, immunes du cancer de la corruption qui détruit la démocratie.
C'est ainsi qu'en France se pérennise un glissement des électeurs vers l'extrême droite tandis que les plus méfiants à l'égard de certains miasmes de discours fascisants vont grossir les rangs des abstentionnistes.
Comment les citoyens peuvent-ils être si naïfs ? Et si ce n'était pas de la naïveté ?
On a un peu trop oublié que dans une élection quand elle est organisée régulièrement, ce qui est généralement le cas dans nos états de droit, chaque voix compte à part égale, avec le même niveau de légitimité, la différence étant dans le niveau d'information de l'électeur.
Ce niveau a peu à voir avec le niveau d'intelligence, de statut social, d'instruction, ou avec l'engagement militant de l'électeur potentiel mais la vie moderne étant ce qu'elle est avec toute sa complexité, le choix électoral est la plupart du temps une question d'affect, les candidats étant jugés pour ce qu'ils paraissent, ou par ce que l'environnement médiatique en laisse paraître.
Le front national xénophobe supporté par un capitalisme national dont fait partie la famille milliardaire Le Pen serait-il l'avenir promis à ce qu'il nous reste de démocratie ?
Heureusement, NON ! Il y a d'autres forces militantes veillant sur nos intérêts bien compris et luttant pour nous éviter cette indignité : Comme par miracle, à un an de l'élection présidentielle, un chevalier blanc nous est apparu, surgit d'on ne sais trop où, un certain Emmanuel Macron, un jeune homme sorti de l'ENA, ce qui est très classique et passé par la banque Rothschild, ce qui est tout de même un signe de compétence, temporairement ministre de l'économie ce qui n'est pas rien mais d'autant plus habile qu'il a su sauter du train Hollandais avant son déraillement et qu'il se présente à nous, ni de droite ni de gauche dirigeant un parti – pardon : un mouvement – « en marche » lui aussi sorti du néant, qui modestement se propose de sauver la France, hors d'un système dont il dénonce le fonctionnement, avec une poignée de plus ou moins notables politiques, de gauche et du centre, eux aussi pressés de quitter le système pour veiller à leur avenir politique dans une structure moins fissurée et prête à l'écroulement.
Le monde médiatique ne s'y est pas trompé, il a de suite flairé le « bon coup » qui réveillera l'intérêt d'un public blasé. De TF1 à BFM en passant par Le Figaro et par libé, on spécule désormais sur la présence d'Emmanuel Macron au second tout de l'élection présidentielle de 2017 dans un duel émouvant avec Marine Le Pen. Macron a pas mal d'avantages : On n'a repéré dans son environnement aucun de ces crânes rasés inquiétants que l'on voit parfois circuler, en ombre chinoise, derrière certains apparatchiks du parti bleu marine, et des supports lui viennent au contraire des milieux bien pensants de la société, et d'abord des milieux financiers et industriels. Ce jeune homme propre sur lui passe bien à la télé au point que certains sondages le placent désormais dans la meilleure des perspectives pour sa présence au second tour de la présidentielle. Il pourrait même nous dit-on décider certains abstentionnistes à retourner aux urnes.
Assez curieusement, cette apparition dans le monde politique en rappelle bien d'autres comme par exemple dans les années 90 Bernard Tapie l'affairiste que les sondages populaires voyaient déjà volontiers en position présidentielle avant qu'un carton rouge ne le pousse hors du terrain de jeu, ou encore en 2011 Dominique Strauss Khan, patron du FMI et candidat socialiste qu'il a fallu remplacer au pied levé par François Hollande avec le succès que l'on sait.
Ce n'est un secret pour personne que les oligarques du monde économique mettent à chaque échéance électorale les moyens nécessaires en lobbying et en communication pour s'assurer que le résultat de l'élection sera sinon conforme au moins acceptable pour leurs intérêts. Ils n'y parviennent pas toujours mais ne manquent jamais d'essayer. C'est une fois encore le cas. On connaît peu de choses sur le programme électoral que Emmanuel Macron n'a pas encore pris la peine d'élaborer mais cela a-t-il vraiment de l'importance ? Pour les milieux économiques internationaux l'extrême droite présenterait des inconvénients certains. La droite intégriste de Fillon présente à peu près les mêmes défauts, vu le radicalisme affiché par ses positions. Les autres candidats, à droite comme à gauche ne représentent pas un danger, ils ont si peu de chances d'arriver au sommet de la compétition, y compris Benoît Hamon qui hérite d'un PS en miettes et Jean Luc Mélanchon muré dans sa volonté isolationniste. Emmanuel Macron est donc aujourd'hui le meilleur des candidats possibles.
Bien sur, la partie n'est pas jouée, et à gauche le choix de la primaire socialiste est une bonne nouvelle car il laisse au parti socialiste une chance de se rebâtir une stratégie moins social démocrate laissant la place à l'utopie constructive d'un monde meilleur ou le citoyen occuperait plus de place. Bien sur, le souverainisme affiché de Mélanchon a des aspects positifs, comme force de combat même quand il ignore le caractère transfrontières de l'activité économique , mais la division de la gauche a peu de chances de conduire à l'élection de son représentant en 2017.
Peut-être dans cinq ans …
attendons la suite.