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Claude LAYALLE

Ex ingénieur -physicien- - membre d'ATTAC. Auteur de l'essai "Le rasoir d'Ockham" paru en Juin 2017 aux éditions Edilivre

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Billet de blog 6 juillet 2015

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Le nouveau mur de la honte

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Quand allons nous cesser d'alimenter la fiction suivant laquelle les gouvernements décident et pas conséquent sont capables de tirer des leçons sur une quelconque crise financière ? En confiant la gestion de la monnaie aux marchés qui sont aussi leurs créanciers, les gouvernements ont de longue date abandonné toute idée de peser sur les événements économiques.

Le rôle de chacun semble désormais bien distribué: Les lobbies organisés font et imposent leur loi, les personnels politiques ont pour mission de présenter cette loi comme la seule possible (TINA!!!) au peuple qui se croit encore en démocratie. La société civile (nous) s'épuise à combattre le premier rang d'assaillants politiques sans même jamais avoir en ligne de mire les donneurs d'ordre en bande organisée qui sont l'état major planqué à l'arrière.

Dans cette distribution des rôles, seuls les acteurs économiques d'un côté et les acteurs sociaux (encore nous) de l'autre sont réellement en guerre pour le pouvoir, le paradoxe étant qu'ils ne se rencontrent pratiquement jamais sur un champ de bataille: C'est par des traités comme TAFTA ou des lois comme la loi Macron que l'oligarchie financière assure sa domination sur le monde, par politiques interposés. C'est par l'action sociale sous toutes ses formes, (dont certaines efficaces mais c'est si rare), que les forces sociales prétendent se défendre en combattant non pas l'adversaire mais son porte flingue.

Nous devons cesser de prétendre déjouer les plans des politiques: Ils n'en ont pas plus qu'une girouette dont un certain politicien (célèbre pour avoir retourné si souvent sa veste) disait : "ce n'est pas la girouette qui tourne, c'est le vent".

Les politiques peuvent changer, passer de la droite à la gauche, ou l'inverse, le vent vient toujours de la même direction et la girouette suit le mouvement.

Il arrive pourtant que des politiques changent la donne, ou en tous cas essaient de le faire, comme Syriza en Grèce ou Podemos en Espagne avec le soutien des citoyens. Croisons les doigts pour qu'ils réussissent : Nous avons bien besoin qu'ils nous montrent que c'est possible et nous donne envie d'essayer aussi. Si ce n'est pas le cas, ils auront en tout cas mérité notre respect, une valeur non monétaire incommensurable.

Les résultats de Podemos aux élections régionales et municipales comme le succès de Syriza aux élections législatives et le résultat spectaculaire du NON au référendum Grec n'indiquent pas seulement que le vent tourne  : c'est aussi une évolution historique.

En bousculant les partis traditionnels installés dans la collaboration avec l'oligarchie financière, les citoyens de ces deux pays introduisent dans le jeu politique de nouveaux acteurs directement confrontés aux réseaux mafieux de la banque et des marchés pour lesquels tous les moyens sont bons pour refuser une opposition démocratique.

C'est particulièrement évident en Grèce ou chacun a pu constater l'agressivité et les moyens de propagande publics et privés mis en œuvre pour compromettre la simple expression d'une volonté démocratique par le référendum.

Une ou même deux hirondelles ne font pas le printemps et par ailleurs l'extrême droite, expression d'un capitalisme à l'ancienne, identitaire et xénophobe marque des points un peu partout, donnant même l'impression comme en France avec le FN de constituer la véritable opposition, face à une classe politique sans crédibilité prisonnière des réseaux bancaires et financiers.

Le combat s'engage non plus seulement contre le pouvoir corrompu de Bruxelles et des capitales européennes mais directement contre les marchés et les réseaux multinationaux créanciers qui soutiennent les économies comme la corde soutient le pendu.

Dans certains pays dont la France, l'opposition de gauche reste minoritaire, en particulier me semble-t-il en raison de son incapacité à surmonter ses divisions idéologiques et les égos de certains dirigeants, ce qui la conduit à s'organiser en écuries concurrentes dès qu'une élection approche.

Cette culture nous condamne à la reconduction permanente d'une monarchie républicaine derrière laquelle s'abritent les pouvoirs occultes du lobbying international.

De quoi sera fait demain ? Je ne sais toujours pas si la remarque incontournable : « la prédiction est un art bien difficile, surtout en ce qui concerne l'avenir » est de Marc Twain, de Tristan Bernard ou encore de Niels Bohr, mais elle n'a rien perdu de son actualité.

Ce qui est certain, c'est que l'expression majoritaire du peuple Grec a modifié les rapports de force : Dans quelles mesures ? Nous le verrons sans doute dans les jours qui viennent. Le résultats du référendum, victoire pour Alexis Tsipras, lui impose aussi une feuille de route qui n'est pas exempte de difficultés nouvelles  : Il faudra bien renégocier !

La restructuration de la dette, avec comme alternative le défaut de paiement et la sortie de l'euro seront au centre du débat. Dans tous les cas, les citoyens Grecs n'ignorent pas qu'ils n'ont pas fini d'en baver, qu'ils restent dans l'UE et la zone euro ou qu'ils doivent en sortir mais l'acceptation de nouvelles concessions importantes serait une nouvelle humiliation qu'une majorité ne semble pas prête à accepter.

Même en cas de succès des négociations permettant à la Grèce de rentrer dans le rang de l'euro, elle n'échapperait pas au danger qui menace aujourd'hui l'Argentine 15 ans après la crise avec le retour des exigences prédatrices d'une classe financière aux objectifs inchangés : La solution de la crise grecque sans modification substantielle des politiques européennes serait une impasse mais cette modification dépendra essentiellement de la mobilisation dans les autres pays de l'UE.

Ce qui est certain, c'est que bon gré mal gré nous allons devoir accepter le fait que la dette contrôlée par les banques et les institutions rend les états toujours plus dépendants des marchés : elle les entraîne dans la course folle de la « compétitivité » sans freins dans un monde sans croissance. Il devient a contrario non seulement nécessaire mais urgent de développer de la solidarité et de la régulation pour faire face aux défis environnementaux . Le pouvoir ayant pour une large part changé de mains, du public vers le privé, ceci suppose de le reconquérir, en premier lieu en ayant le courage comme les grecs de refuses la dépendance et l'humiliation..

il est plus que jamais intolérable que la classe politique traditionnelle prétende imposer aux citoyens les exigences de l'oligarchie financière et industrielle qui affiche ouvertement son mépris pour la démocratie .

La primauté des prétendus besoins de l'économie sur l'urgence des besoins humains : voici le nouveau mur de la honte à détruire, comme il y a 30 ans on a abattu le rideau de fer : Le peuple grec a donné les premiers coups de pioche, à nous tous de continuer.

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