Mardi, lors de la discussion d’un amendement sur le « genre » à l’Assemblée nationale, l’affirmation que l’éducation sexuelle appartient aux familles est revenue en force parmi les députés de droite.
On croyait cela dépassé et voué aux oubliettes de l’histoire, notamment depuis le début du XXI° siècle.
Certes, lorsque la question de l’éducation sexuelle à l’Ecole a été posée dans les années qui ont suivi Mai 68, certaines fédérations de parents d’élèves sont alors montées au créneau avec des attendus significatifs. Ainsi la Fédération de Paris des Associations de parents d’élèves de l’enseignement libre a incriminé « le processus inéluctable qui transforme le projet de l’Education nationale en une vaste entreprise de libération sexuelle" (communiqué du 20 février 1973). Et l’Union nationale des associations des parents d’élèves autonomes a tenu à distinguer " l’information sexuelle " qui peut être donnée à l’école à condition qu’elle ne fasse pas intervenir de jugement moral, et " l’éducation sexuelle " qui est liée à des options philosophiques et religieuses ; en concluant qu’ " une éducation sexuelle à l’école qui respecte le principe de laïcité est impossible " (communiqué du 29 janvier 1973).
Et, finalement, le ministre de l’Education nationale d’alors, Joseh Fontanet – un ‘’démocrate chrétien’’ – a décidé en juillet 1973 d’opérer un clivage fondamental entre " l’information sexuelle " (obligatoire, intégrée aux programmes, pour tous les élèves) et " l’éducation sexuelle " (facultative, soumise à l’autorisation des parents pour le premier cycle).
Mais un cap décisif a été franchi au moment du changement de siècle. Les dispositions de l’article 22 de la nouvelle loi du 4 juillet 2001 relative à l’interruption volontaire de grossesse et à la contraception ont complété le Code de l’éducation par un article aux termes duquel « une information et une éducation à la sexualité sont dispensées dans les écoles, les collèges et les lycées à raison d’au moins trois séances annuelles ».
La circulaire d’application préparée sous le gouvernement Jospin paraît le 17 février 2003 sous le gouvernement Raffarin, sans modification majeure ( si ce n’est que toutes les séances en primaire doivent être assurées par les professeurs des écoles et non par des intervenants extérieurs ou le personnel médical, conformément à l’orientation de l’équipe du ministre de l’Education nationale Luc Ferry qui vise à recentrer l’enseignement élémentaire sur les disciplines fondamentales ).
La circulaire insiste sur le fait que la loi ( du 4 juillet 2001 ) a désormais « confié à l’Ecole une mission éducative dans le champ bien spécifique de l’éducation à la sexualité ».
« Cette démarche est d’autant plus importante qu’elle est à la fois constitutive d’une politique nationale de prévention et de réduction des risques ( grossesses précoces non désirées, infections sexuellement transmissibles, VIH/sida ) et légitimée par la protection des jeunes vis-à-vis des violences ou de l’exploitation sexuelles, de la pornographie ou encore par la lutte contre les préjugés sexistes. L’éducation à la sexualité à l’Ecole est inséparable des connaissances biologiques sur le développement du corps humain, mais elle intègre tout autant, sinon plus, une réflexion sur les dimensions psychologiques, affectives, sociales, culturelles et éthiques ».
Cela implique à l’évidence, comme le souligne la circulaire elle-même, que « la mise en œuvre de l’éducation à la sexualité » ne soit pas circonscrite, loin s’en faut, aux cours de sciences de la vie et à leurs enseignants : « Au sein des écoles et des établissements scolaires, tous les personnels, membres de la communauté éducative, participent explicitement ou non, à la construction individuelle, sociale et sexuée des enfants et des adolescents […]. Ces pratiques éducatives impliquent une nécessaire cohérence entre les adultes participant au respect des lois et des règles de vie en commun qui s’exercent aussi bien dans le cadre de la mixité, que de la lutte contre les violences sexistes et homophobes contraires aux droits de l’homme […]. Dans les enseignements, à tous les niveaux, les programmes des différents champs disciplinaires ( tels que la littérature, l’éducation civique, les arts plastiques, la philosophie, l’histoire, l’éducation civique juridique et sociale…) offrent, dans leur mise en œuvre, l’opportunité d’exploiter des textes ou des supports en relation avec l’éducation à la sexualité selon les objectifs précédemment définis ».
C’était une circulaire publiée sous le gouvernement Raffarin, et sous la houlette du ministre de l’Education nationale Luc Ferry ( après une préparation sous le gouvernement Jospin )…Une décennie après, on voit où l’on en est dans la régression à droite.
Billet de blog 5 juin 2013
La ''famille'' ou le ''genre''?
Mardi, lors de la discussion d’un amendement sur le « genre » à l’Assemblée nationale, l’affirmation que l’éducation sexuelle appartient aux familles est revenue en force parmi les députés de droite.
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