Pas de figures imposées, mais un parcours de figures libres. Le risque serait la banalité ; mais la singularité des propos force l''attention. C'est d'ailleurs un philosophe professionnel, Denis Kambouchner, qui en a écrit la préface en marquant bien l'originalité et l'intérêt de l'ouvrage qui vient fort à propos en un moment où les injonctions ''identitaires'' se multiplient, s'affrontent, s'efforcent de ''faire la loi''.
D'où l'intérêt très actuel de ce livre à la fois très personnel et très politique au sens non politicien du terme. Quelques titres de chapitres successifs évocateurs. « Qu'ai-je qui me soit propre ? ». « N'ayant rien qui me soit propre, pour pouvoir dire JE, je revendique d'être l'auteur de moi-même » . « Mais suis-je pour autant responsable de moi-même ? » . « Pour passer du JE au Nous, un système de créances est nécessaire ». « La nécessité d'un NOUS pour qu'il y ait un JE, impose l'existence d'une morale » . « La nécessité d'un NOUS pour qu'il y ait un JE impose aussi un système de reconnaissance sociale ».. « Mais un JE revendiqué incite à la transgression, à l'abolition du NOUS ou à l'élaboration d'un NOUS factice et mortifère ». « L'Ecole est nécessairement prise entre l'affirmation des JE et l'élaboration d'un NOUS ». « Jusqu'à quel point la culture, le partage du rêve éveillé nous protège-t-il d'un NOUS totalitaire ? »
Et cela se termine par une vingtaine de pages -sérieuses – sur sa « Déclaration de non -candidature à l'élection présidentielle ». Bravo l'artiste ou le funambule aux propos aussi bien d'ordre ''égotiste'' qu'''ontologique'', singuliers et anthropologiques. Finalement très politiques.
« Ce qui me permet de dire JE. Traité d'ontologie relative » de Pascal Bouchard. Paru en mai 2022 aux éditions EdiSens. 142 pages ; 16 euros.