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Billet de blog 15 novembre 2024

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Un « contre-roman national » ?

Pour faire pièce à ce qu’on appelle le ‘’roman national » très prisé en particulier par l’extrême-droite mais pas seulement , Laurence De Cock en est venue à penser qu’on ne pouvait se contenter de ‘’déconstruire’’ ce roman par des références savantes, mais qu’il était nécessaire de mettre en forme des contre-propositions effectives, une « Histoire de France populaire » sous la forme d’un récit.

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Comme elle le souligne volontiers elle-même, Laurence De Cock s’est demandé « si nous n’étions pas un peu surplombants et rabat-joie avec nos permanentes leçons de savants ; tout cela m’a convaincue de me lancer dans un projet qui tente de tenir ensemble tous ces aspects : assumer un récit, s’adresser au plus grand nombre, intégrer l’histoire sociale, coloniale et celle de l’immigration dans une trame nationale »

Et c’est ainsi que vient de paraître aux éditions Agone, un ouvrage d’une facture tout à fait inédite qui, par cela même, mérite déjà d’attirer l’attention : « Histoire de France populaire. D’il y a longtemps à nos jours » ( 550 page, 29 euros)

Laurence De Cock est partie pour cette aventure qui est avant tout une réécriture d’un ouvrage ‘’savant’’ de Gérard Noiriel paru en 2018 aux éditions Agone également : « L’histoire populaire de la France. De la guerre de cent ans à nos jours »

Elle n’ a pas choisi le même début que Gérard Noiriel (c’est toute une’’ histoire’’ le début d’une ‘’histoire’’, le début d’un ‘’récit’’ ). Ce début se déroule en deux temps. Premier chapitre : « Il y a très longtemps, la France avant la France ; de la préhistoire au Moyen Age ». Deuxième chapitre « L’éveil du peuple de France ; du milieu du XiV° à la fin du XV° siècle »

Si on compare les deux ouvrages, celui de Gérard Noiriel et celui de Laurence De Cock, le premier se situe dans la tradition savante, le second tente résolument l’aventure d’un récit plaisant et-ou poignant en s’efforçant certes de trahir le moins possible ce qu’ont apporté les recherches savantes mais en s’exposant aux apories de la vulgarisation. Il peut donc être facile de lui reprocher des ‘’approximations’’ , mais cela est inhérent au projet même de Laurence De Cock. Et l’on peut estimer qu’elle s’en sort plutôt bien le plus souvent.

Elle mène aussi avec résolution, pour chaque période historique, son projet d’« intégrer l’histoire sociale et coloniale à une trame nationale ». Et cela évitant le plus souvent des ‘’outrances’’ à rebours du ‘’roman national «  traditionnel.

Un seul exemple, tout à fait méritoire, les pages que Laurence De Cock consacre au Code noir ( pp 122-125) : » Le code noir est le plus souvent présenté comme une édifiante illustration de la barbarie de l’esclavagisme colonial et de l’officialisation de la toute-puissance des maîtres. Essayons de le voir sous un angle un peu différent. D’abord il officialise la prise de contrôle direct des colonies, dix ans après la dissolution de la compagnie des Indes occidentales. De fait les colonies sont réorganisées à l’image des provinces françaises. Ensuite, le Code fournit un cadre administratif qui rompt avec les premiers temps de la colonisation , où la brutalité des maîtres sur les engagés et les esclaves pouvait n’avoir aucune limité […] Il n’y est bien évidemment pas question d’égalité : les esclaves n’ont pas les mêmes droits que les maîtres, et le code officialise la domination absolue des seconds sur le premier »

Bref, on peut apprendre beaucoup à la lecture de cet ouvrage indéniablement neuf dans certaines de ses thématiques et dans sa facture privilégiant délibérant le récit et la vulgarisation en s’efforçant réellement de ne pas tomber dans le ‘’simplisme’’ .

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