Il a suffi que le ministère indique que le ministre avait l'obligation de publier les calendriers scolaires sur trois ans (dans le cadre actuel) mais qu'«il ne s'interdisait pas de les renégocier en 2015» pour que les lobbys du tourisme se manifestent.
Dans un communiqué signé de l'Union des Métiers et des Industries de l'Hôtellerie (UMIH), du Syndicat national des agents de voyage (SNAV), de Domaines Skiables de France, du Syndicat National des Résidences de Tourisme (SNRT), du Conseil National des Professions de l'Automobile (CNPA) et du Syndicat des Entreprises du Tour Operating (SETO), les professionnels du tourisme ont déclaré qu' « attendre 2015 pour entamer les discussions s'est beaucoup trop tard»; et ils ont mis particulièrement l'accent sur une revendication: « instaurer le zonage pour les vacances estivales, c'est permettre à plus de Français de partir en vacances tout en leur offrant une plus grande souplesse dans les prix, d'éviter les pics d'activité en assurant une meilleure répartition de l'offre hôtelière, de faciliter les transports, de réduire les nuisances environnementales, et surtout de maintenir des activités touristiques et des emplois sur tout le territoire national ».
L'Histoire montre que dans ce genre de bras de fer, le ministre de l'Education nationale peut être démenti par plus ''haut'' que lui. On n'en prendra pour exemple – éclatant- que ce qui s'est passé dans le suivi d'une autre loi d'orientation, celle de1989.
La loi ''Jospin'' promulguée le 14 juillet 1989, qui a pour ambition de mettre l’école « au service de l’élève », fixe pour objectif le rééquilibrage de « la journée, la semaine, l’année ». Effectivement, dès juin 1989, Lionel Jospin fait adopter au Conseil supérieur de l’éducation, et à l’unanimité ( notamment des représentants des parents d’élèves et des enseignants ), un calendrier triennal fondé sur l’alternance de sept semaines de travail et de deux semaines de congé.
Mais ce bel édifice conçu dans l’intérêt des enfants ne durera qu’un an et sera remplacé par un montage qui laisse place à d’autres intérêts, économiques en particulier. Une nouvelle fois, le retour à trois zones ( demandées par les représentants des transports et des lobbies du tourisme ) va rendre impossible un calendrier en 7/2 ( qui n’est compatible qu’avec deux zones au maximum ).
Les retours de vacances d’hiver sont difficiles le samedi 16 février 1991. De la neige ; des bouchons ; des mécontents. Le Premier ministre Michel Rocard se prononce publiquement pour un retour aux trois zones, allant même jusqu’à suggérer que l’on pourrait étaler à nouveau les vacances d’été. Les lobbies s’engouffrent dans la brèche. Edmond Maire ( ancien secrétaire général de la CFDT ) est le premier à demander un étalement des vacances beaucoup plus diversifié en sa qualité de président de l’association Villages Vacances Familles ( VVF) et de vice-président de la section des affaires sociales du Conseil national du tourisme.
Le ministère de l’Education nationale rend public le 13 mars 1991 un projet d’arrêté visant à modifier le calendrier scolaire triennal adopté à l’unanimité des 62 membres du Conseil supérieur de l’éducation en juin 1989. Le directeur de cabinet de Lionel Jospin, Olivier Schrameck, indique qu’il s’agit d’un « ajustement » né d’une concertation entre le ministère de l’Education nationale et celui du Tourisme, à la demande du Premier ministre Michel Rocard. Les modifications porteront sur les congés d’hiver et de printemps pour lesquels les trois zones seront rétablies. Pour manifester leur désapprobation, 56 des 62 membres du Conseil supérieur de l’éducation ( qui n’ont qu’un rôle consultatif ) quitteront la salle au moment du vote, le 28 mars.
Edmond Maire n’est pourtant pas pleinement satisfait. Il se félicite certes du retour aux trois zones des vacances d’hiver et de printemps, mais il juge « incompréhensible » que le gouvernement n’ait pas décidé d’amorcer un étalement des vacances d’été. « il n’est pas possible, conclut-il, de laisser de côté les professionnels des transports et du tourisme. Car c’est bien de cela qu’il s’agit : concilier réellement les intérêts des enfants à l’école, ceux des enfants en vacances et ceux de la société ». Où s'arrêtera-t-on ?