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Billet de blog 20 novembre 2019

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Le voile de la soeur interdite dévoile la confusion venue de soi-disant laïques

Dans le cadre de la confusion entretenue par certains à propos de la laïcité (visant essentiellement les musulmans) cela devait arriver comme un boomerang: une religieuse a été sommée d'enlever son voile pour être acceptée dans un appartement aux Résidences Autonomies à Vesoul

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Le'' Centre communal d'action sociale'' qui gère cette résidence lui a signifié par courrier que "dans le respect de la laïcité, tout signe ostentatoire d'appartenance à une communauté religieuse ne peut être accepté en vue d'assurer la sérénité de toutes et de tous. En effet la religion est une affaire privée et doit le rester"

On en est là! De grands acteurs de la "séparation de l'Ecole et des Eglises" (en 1882) comme Jules Ferry, ou de la ''séparation de l'Etat et des Eglises'' (en 1905) comme Jean Jaurès ou Aristide Briand en resteraient bouche bée! Et pourtant on ne peut les soupçonner d'être des ''islamo-gauchistes'' ( mais il est vrai que Jean-Jaurès a pu être traité de ''socialo-papiste'' en son temps par certains...)

On ne saurait trop rappeler le discours de Jules Ferry au Sénat le 10 juin 1881  , pour tenter de dissiper l'ombre de la confusion en la matière: « J'ai toujours pensé que l'oeuvre du gouvernement de la République n'est point une oeuvre de sectaires, que nous n'avons ni le devoir ni le droit de faire la chasse aux consciences et qu'en agissant ainsi , nous manquerions à notre premier devoir. Nous sommes institués pour défendre les droits de l'Etat contre un certain catholicisme, bien différent du catholicisme religieux, et que j'appellerai le catholicisme politique. Quant au catholicisme religieux, qui est une manifestation de la conscience d'une si grande partie de la population française, il a droit à notre protection […]. Oui , nous sommes entrés résolument dans la lutte anticléricale ; je l'ai dit et la majorité républicaine m'a acclamé quand j'ai tenu ce langage. Oui nous avons voulu la lutte anticléricale, mais la lutte antireligieuse, jamais, jamais »

Il ne s'agit d'aucune façon pour Jules Ferry de refouler l'expression religieuse en tant que telle: on "manquerait alors à notre premier devoir". Jules Ferry indique même que "le catholicisme religieux a droit à notre protection"

La "séparation de l'Etat et des Eglises'' se situe dans ce droit fil. Le premier article de la loi indique que la liberté de conscience est au fondement de la loi: "La République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes sous les seules restrictions édictées ci-après dans l'intérêt de l'ordre public" C'est même la première loi française qui fait de la liberté religieuse un droit, rompant ainsi avec le régime d'autorisation qui a prévalu tout au long du XIXe siècle concordataire

On rappellera aussi in fine que l'amendement présenté lors du débat en vue de permettre l'interdiction aux prêtres de porter  la soutane ( une ''robe'' constituant une atteinte à la dignité masculine, le signe d'une ''soumission'' envers la hiérarchie, ''un acte permanent de prosélytisme") a été repoussé alors par 391 voix contre 184, le rapporteur de projet de loi , Aristide Briand, arguant qu'on ne pouvait pas "par une loi qui se donne pour but un régime de liberté" interdire une façon de se vêtir.

Qu'on se le dise...

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