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Billet de blog 22 avr. 2015

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L'autonomie pédagogique

Controversée dans le secondaire et objet de polémiques dans l'actuelle réforme du collège, l'autonomie pédagogique est au contraire un principe de base dans les universités, et depuis fort longtemps.

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Controversée dans le secondaire et objet de polémiques dans l'actuelle réforme du collège, l'autonomie pédagogique est au contraire un principe de base dans les universités, et depuis fort longtemps.

Cela se passe dans un même pays, sans susciter pour autant la réflexion, ni même attirer l'attention. En 1982 néanmoins (il y a déjà une génération!) Hélène Desbrousses – une socio-historienne – a tenté de penser cette ''curiosité'' en proposant deux ''idéaux-types'' explicatifs en opposition : à savoir d'une part ce qu'elle appelle la ''forme scolaire'' et d'autre part ''la forme universitaire'' (cf « Instituteurs et professeurs », Edires, 1982).

Selon Hélène Desbrousses, ce qui caractérise la « forme universitaire » est la personnalisation du rapport pédagogique, non au sens du caractère affectif ou de l'individualisation des apprentissages, mais au sens de la valorisation du caractère personnel (original) de l'enseignement distribué. Un universitaire est un ''enseignant-chercheur'', enseignant parce que chercheur (et en tant que tel ''à nul autre pareil'', et en quelque sorte ''irremplaçable''). C'est pourquoi d'ailleurs on trouve tout à fait légitime qu'il participe directement à l'évaluation et à la certification de ses propres étudiants (on a même créé l' « éméritat » pour que les professeurs retraités puissent participer es qualité aux jurys de thèse de leurs propres doctorants).

C'est l'universitaire lui-même (et au-delà, la communauté des enseignants-chercheurs, la ''corporation'' : ''universitas'', c'est la ''corporation'') qui pose la légitimité du contenu du savoir enseigné.

Dans la « forme scolaire » au contraire, selon Hélène Desbrousses, les enseignants ont en principe à enseigner des savoirs qui sont définis en dehors d'eux dans un programme. Les enseignants ne peuvent être considérés comme personnellement responsables de leur programme d'enseignement, lequel relève de prescriptions auxquelles ils sont, au même titre que leurs élèves, assujettis. Cela implique aussi que l'enseignant se doive autant à chacun, qu'il soit ''équitable''. En principe, et par principe (loin que chacun soit considéré comme à ''nul autre pareil''), les enseignants de la « forme scolaire » sont considérés comme ''interchangeables'' . L'une des conséquences de tout cela étant qu'en principe, ils ne peuvent pas ''certifier'' leurs propres élèves (contrairement aux universitaires).

Dans  la «  forme universitaire », la hiérarchie des éléments du métier se décline de façon très caractérisée : en premier la recherche, puis l'administration (les universitaires s'auto-administrent, surtout au niveau de leurs unités pédagogiques) et en dernier lieu l'enseignement (comme on le voit dans les éléments pris en compte pour les carrières ou dans la hiérarchie des primes à l'université). C'est exactement le contraire pour la « forme scolaire », dont la hiérarchie des éléments du métier est rigoureusement inverse....

Cela dit, il faut prendre les ''idéaux-types ''pour ce qu'ils sont (et non pour des descriptions empiriques exhaustives, sans inflexions voire ''dérogations'') . Dans la réalité, cela est toujours un peu plus compliqué (selon les secteurs, les degrés) avec des variations (historiques voire ''géographiques''). Et on peut faire confiance pour cela aux commentateurs à venir.

D'autant plus que l'on peut soutenir en première approche qu'il y a eu depuis déjà pas mal d'années une certaine ''secondarisation'' des universités (surtout dans les premières années universitaires). Peut-on en dire autant, à l'inverse, pour des évolutions qui seraient à l'oeuvre, ou qui poindraient , dans le secondaire ?

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