Chaque journaliste peut un jour se trouver confronté à la question. La société des journalistes du " Progrès de Lyon ", où cela s’est produit, s’est dite très " inquiète " et a demandé à sa direction " l’instauration d’un débat ouvert sur la manière de traiter ces sujets d’actualité délicats ".
L’affaire remonte au 12 janvier, mais elle n’a été médiatisée à l’échelle nationale que lundi dernier, via le blog des correspondants de " Libération " à Lyon ( http://libelyon.blogs.liberation.fr/info/2009/01/mdias-peut-on-r.html ) et reprise mardi soir par la journaliste Chloé Leprince dans " Rue 89 " ( http://www.rue89.com/2009/01/27/les-medias-doivent-ils-cesser-dinterviewer-les-raci ).Je me permets de mettre en valeur cette affaire ( et de renvoyer à ces deux articles ) car il se trouve que je connais la journaliste incriminée, Muriel Florin, une très bonne professionnelle avec qui j’ai travaillé plusieurs fois sur les problèmes éducatifs dans lesquels elle est spécialisée. Et je le fais en souhaitant de tout cœur que cela ne nous sorte pas de la qualité et de la tenue des interventions qui ont eu lieu sur Mediapart dans la dernière période au moment de ‘’Gaza’’. Je me le permets même, parce que nous avons su être quasi ‘’exemplaires’’ par rapport à d’autres médias.
Et je me contente de reprendre ici en premier lieu la partie " retour sur les faits " de l’article du blog de " LibéLyon " du 26 janvier.
" Le dimanche 11 janvier, Muriel Florin, journaliste au Progrès, est envoyée par sa rédaction couvrir un rassemblement organisé à Lyon au parc de la tête d’Or par le CRIF ( conseil représentatif de la communauté juive de France ). Objet de cette manifestation : à la fois dénoncer la recrudescence des actes antisémites en France depuis la reprise du conflit au Proche-Orient, mais aussi réaffirmer la solidarité de la communauté juive avec la politique d’Israël. Muriel Florin prend en note les interventions officielles, mais va aussi prendre la température dans le foule et interviewer des participants. Il y a ce jour-là près d’un millier de personnes. La tension est palpable. " LibéLyon " était aussi présent à ce rassemblement. Comme Muriel Florin, nous avons pu constater qu’à côté des discours officiels apaisants, il y avait une peur et une méfiance visible et exprimée de la part de certains participants vis-à-vis de la communauté musulmane française. Sentiments qui, parfois, se traduisaient par l’expression de propos racistes. Muriel Florin interviewe un groupe de quelques personne. Elle rapporte, entre autres, les propos d’un dénommé Roland : ‘’Ils n‘ont qu’à partir. S’ils restent, c’est qu’ils veulent mourir. Les arabes sont des menteurs et des voleurs et la presse française les soutient’’. ‘’Ils sont violents, brutes et haineux’’ ajoute sa voisine. Qui ça ? ‘’Les arabes’’ souffle-t-elle. Un jeune homme proteste. ‘’ Ne dites pas cela. Nous voulons tous la paix… " ( Extrait de l’article paru le 12 janvier dans " Le progrès " ). Muriel Florin relate aussi d’autres propos qui témoignent de la diversité de points de vue des participants à ce rassemblement. Son article, comme n’importe quel article au Progrès, est relu par un responsable d’édition, corrigé par un secrétaire de rédaction. Il est censé être validé par le rédacteur en chef de permanence. En rentrant de son reportage, la journaliste avait prévenu de la dureté de la scène à laquelle elle avait assisté et expliqué qu’elle souhaitait rendre compte de cette réalité. Sans que personne n’y trouve à redire "
Epilogue ( provisoire ? ) "A son retour de trois jours de congé, Muriel Florin estconvoquée par son rédacteur en chef, Xavier Antoyé. L’entretien prend la forme d’une remontrance sèche. Xavier Antoyé lui explique qu’elle va recevoir un ‘’avertissement’’. Les syndicats et la société des journalistes ( SDJ ) réagissent. Les premiers pour dénoncer le comportement autoritariste de la direction. Muriel Florin est en effet la troisième journaliste en trois jours à être sanctionnée. Les seconds, pour demander à ce qu’un débat de fond soit enfin ouvert sur le traitement des sujets complexes comme celui-ci. Syndicats et Société des journalistes dénoncent par ailleurs ensemble ‘’l’injustice’’ d’une décision qui tombe sur une journaliste sans prendre en compte la chaîne des responsabilités qui s’applique à une rédaction. Le jour où Muriel Florin a écrit son article, il y avait un rédacteur en chef de permanence. C’était justement Xavier Antoyé […]. Suite à la mobilisation, Muriel Florin devrait échapper à l’avertissement, et se contenter d’une ‘’simple’’ lettre d’observation "