Ils se tiennent dans une situation tendue en raison de la «réforme» décidée précipitamment par le ministre de l’Education nationale d’une part, mais aussi par les polémiques suscitées par la «relation pédagogique» très particulière mise en valeur dans le film Entre les murs d’autre part.
Ces " Etats généraux de la formation des enseignants " auront lieu ce samedi 4 octobre à l’université Paris 12-Créteil à l’invitation de nombreux syndicats d’enseignants, de mouvements éducatifs ou pédagogiques, sans compter des syndicats étudiants et lycéens ( l’UNEF et l’UNL ) et la présence de l’une des principales organisations de parents d’élèves, la FCPE ( http://www.former-des-enseignants.org/eg/ ).
Il s’agit de proposer des perspectives d’avenir les plus circonstanciées et les plus communes possibles face à la ‘’réforme précipitée’’ de la formation des enseignants annoncée par Xavier Darcos au début des dernières grandes vacances… On sait maintenant de façon claire – mais on pouvait s’en douter compte tenu du dispositif de formation professionnelle prévu reposant essentiellement sur le ‘’compagnonnage’’ - que cela allait permettre d’économiser près de 4500 postes d’enseignants stagiaires ( dont 3000 dans le primaire, 1000 dans le secondaire public et 450 dans le privé ; cf le point de presse du 26 septembre du directeur de cabinet du ministre de l’Education nationale à propos du projet de loi de finances 2009 qui prévoit 13500 suppressions nettes de postes budgétaires en tout dans l’enseignement scolaire ).
L’état initial du texte de " l’Appel " qui sera discuté par les différentes parties prenantes et lancé par ces " Etats généraux " ( après amendements ) considère que " Enseigner est un métier qui s’apprend " : " Pour un élève, apprendre, ce n’est pas simple ; donc, faire apprendre toute une classe d’élèves dans sa diversité, c’est forcément complexe ! Comme les médecins, les ingénieurs ou les magistrats, les enseignants exercent un métier de conception qui nécessite une formation universitaire et professionnelle de haut niveau, qui demande du temps et exige une alternance permettant des allers retours entre la théorie et la pratique. Et cette formation, en lien avec la recherche, doit permettre à l’enseignant ou aux autres cadres éducatifs en formation de réfléchir à leurs pratiques et de les adapter à l’hétérogénéité des élèves ". Or cela ne paraît pas être foncièrement pris en compte par la réforme annoncée par Xavier Darcos qui semble croire que l’exercice de ce métier relève " du talent et du mimétisme " ( dans le ‘’compagnonnage’’ ).
Dans ces conditions, on comprendra aisément que le pédagogue très connu Philippe Meirieu ( qui ouvrira le 4 octobre cette journée des " Etats généraux de la formation des enseignants ") ait tenu à mettre en cause nettement la " relation pédagogique " très particulière ( et très controversée ) montrée dans le film de Laurent Cantet et François Begaudeau " Entre les murs " ( dans un long article paru le 15 septembre sur le site du " Café pédagogique " ) : " Jamais on n’est mis en face d’une situation d’apprentissage vraiment construite, avec des contenus exigeants, des consignes claires, des activités encadrées. Ce qu’on nous montre comme matrice pédagogique, c’est un vague cours magistral dialogué – rien à voir avec Socrate, comme le disent certains ! -, où, en l’absence de structuration pédagogique, de lest intellectuel, d’enjeux culturels, le professeur est contraint de jouer avec la séduction, la pression et la sanction […]. L’exercice de l’autoportrait s’effectue sans le moindre filet, avec une prise de risque maximale et quasiment aucune chance d’aboutir. En effet, s’il y a quelque chose que la pédagogie nous a apprise, c’est que parler de soi sans tomber dans la banalité ou l’exhibition voyeuriste est extrêmement difficile. Cela suppose des médiations, une vraie distanciation, une progression longue et patiente, le plus souvent du ‘’il’’ au ‘’je’’. Cela suppose aussi un travail sur la complexité de la langue et pas seulement une improvisation à partir d’un questionnaire ‘’j’aime-j’aime pas’’ […]. On peut tenter d’aider le ‘’soldat Martin’’ ( le personnage du professeur que joue François Begaudeau ) à organiser des espaces et des temps dévolus au travail intellectuel, des rituels qui permettent de créer des postures mentales de disponibilité aux savoirs, des dispositifs d'apprentissage où les élèves soient véritablement actifs...au vrai sens du terme: intellectuellement actifs, et pas seulement physiquement et psychiquement agités ".
Bref, le métier d’enseignant est un métier qui s’apprend …pour que les élèves – tous les élèves – puissent apprendre.
PS ( ajouté ce lundi soir 29 septembre ) : alors qu'il avait été annoncé depuis plus d'une semaine un point de presse des organisateurs des "Etats généraux sur la formation des enseignants'' au siège des ''CRAP- Cahiers pédagogiques'' ce mardi 30 septembre à 11 H 30, la presse vient d'être invitée à venir assister au ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche ce même mardi à 12 H 15 à la signature d'"un protocole sur les objectifs et les principes directeurs de la réforme du recrutement et de la formation des enseignants" entre la Conférence des Présidents d'Université et la Conférence des Directeurs d'IUFM d'une part, et les ministres Valérie Pécresse et Xavier Darcos d'autre part. On admirera la précipitation et la coïncidence ( troublante ).