ALLIANCE RENAULT-NISSAN :
Vous l’appellerez RNO, ou quand la communication sert la stratégie
L’accord de mars 1999 qui créa l’Alliance Renault-Nissan devait après une période de deuil « raisonnable » assoir définitivement la prépondérance du groupe français sur le groupe japonais, conformément aux accords de 2002 signés par les deux partenaires de l’Alliance.
Nous savons aujourd’hui qu’il n’en est rien. Depuis 2014 progressivement les deux sociétés sont entrées dans une phase fusionnelle. A ceci près que c’est Renault qui doit laisser ses ambitions au cimetière des illusions perdues. La manière avec laquelle les relations entre Renault et Nissan, ont été dirigées, devrait être le fil conducteur à toute réflexion sur l’Alliance. Beaucoup de choses ont été dites, beaucoup d’écrits circulent. Le bilan de l’Alliance est essentiellement perçu à travers le prisme de Nissan qui sert d’étalon pour juger les résultats du constructeur français, enfermé ainsi dans un face à face mortifère. Ce qui fait diversion et élude toute appréciation, sur la gouvernance et la stratégie mises en œuvre par le PDG des deux groupes et de l’Alliance mais aussi évite tout questionnement sur les méthodes déployées pour aboutir aux objectifs finaux : qui prendra la prédominance (financière) et/ou le leadership (pouvoir) du groupe en construction.
« Renault et Nissan ne cherchent pas à créer une culture Renault-Nissan ou franco-japonaise artificielle : les deux partenaires tirent au contraire le meilleur parti de l’enrichissement mutuel qu’apportent à leur objectif commun deux cultures nationales et deux cultures d’entreprise différentes ». Cet extrait de la chartre Renault-Nissan est battu en brèche par la réalité. Là aussi nous sommes face à une entreprise qui volontairement « manipule » l’information.
Concrètement la maîtrise de la communication permet de laisser croire que, par exemple, le déséquilibre constaté sur les volumes est dû à des carences chez Renault, alors que ce déséquilibre trouve sa source dans une décision de Carlos Goshn : laisser les marchés chinois et nord-américains à Nissan. Et d’user de ce levier pour revoir les participations croisées.
D’autres exemples de cette manipulation ?
- Dans le cadre de la communication, aujourd’hui, le mot alliance, chez Renault, recouvre des concepts différents : 1°L’Alliance entre les deux constructeurs qui « représente la collaboration stratégique pluriculturelle »[1] suite à l’accord du 27 mars 1999 ; 2° Le Directoire de l’Alliance (ABM Alliance Board) crée en 2002 « l’organe de gouvernance de l’Alliance, dont le siège se trouve à Amsterdam chez Renault-Nissan BV, société détenue à part égale par les deux entreprises. Il est présidé par Carlos Ghosn, PDG de l’Alliance Renault-Nissan »[2] ; 3° Le nouveau « Comité de direction de Alliance », annoncé le 17 mars 2014 ; 4° Le terme alliance, jusqu’alors employé pour désigner un accord au sommet, s’applique maintenant à la gestion opérationnelle des deux constructeurs, à partir de la filiale RNBV
- Lorsque l’anglais a été choisi comme langue de l’Alliance les responsables des deux groupes ne pouvaient ignorer que cette décision mettrait certaines catégories du personnel en difficulté, qui de ce fait se sont trouvées exclues. Dans leur ouvrage « Management interculturel et processus d'intégration : une analyse de l'alliance Renault-Nissan », MM. Christoph Barmeyer et Ulrike Mayrhofer analysent l’accord qui a donné naissance à l’Alliance… : « Dans le domaine du management international, l’utilisation d’une langue étrangère constitue un défi particulier. Elle peut susciter un renversement des repères et des autorités : la bonne maîtrise d’une langue étrangère peut cacher un manque de compétences techniques ou managériales. En revanche, sa mauvaise maîtrise laisse peu de possibilités aux managers compétents de s’exprimer et donc de s’affirmer.
LaLa symbolique qui entoure le nom de RENAULT, «constructeur d’automobiles à Billancourt », garde encore quelque pouvoir d’attraction et/ou de répulsion, en résumé ne laisse pas indifférente. Changement d’époque : au silence des presses d’emboutissage hier synonyme d’arrêt de travail a succédé le bruissement des communiqués de presse, nouveau porte-voix du dialogue social. Que voilà un beau sujet de thèse : « indicateur de qualité du dialogue social chez Renault à travers la presse ! »
Au-delà des clichés dont l’empreinte reste forte … que reste-t-il de Renault ; hier, la marque d’un groupe automobile aux dimensions internationales, aujourd’hui …. une marque dans un groupe …
A propos de symbole, quelle signification faut-il accorder au fait que l’action Renault est maintenant traitée par un code mnémonique : RNO, qui rapproche un peu plus Renault de Nissan faut-il y voir le futur nom de la raison sociale de l’entreprise ?
Lexique boursier : code mnémonique[3]
Le code mnémonique, est utilisé pour désigner rapidement un titre boursier, tout en permettant de l’identifier simplement, grâce aux associations d’idées impliquées par ce système, dans le but de retenir plus facilement une information…Le code mnémonique est largement accepté, sa ressemblance phonétique avec l’entreprise désignée lui assurant une plus grande facilité de mémorisation.Le code mnémonique ne se constitue que de cinq caractères au maximum, faisant le plus souvent raison sociale de l’entreprise … Celui-ci peut même parfois prendre une forme encore plus simple, le constructeur automobile Renault présentant, pour sa part, le code mnémonique RNO.
le 14 avril 2017 claude.patfoort@orange.fr ncien salarié et militant CFDT de Renault
[1] Document de référence Renault 2013, page 26
[2]Créée le 28 mars 2002, Renault-Nissan b.v. (RNBV) est une société commune, de droit néerlandais, détenue à parité par Renault SA et Nissan Motor Co. Ltd., ayant pour mission le management stratégique de l’Alliance. Source document de référence Renault 2012
[3] http://www.comparabourse.fr/