SCISSION DE RENAULT
QUAND RENAULT JOUE A LA ROULETTE RUSSE
RENAULT EN DANGER
Sans que l’on sache si d’autres actifs seraient concernés, - ici nous faisons allusion à Dacia, Alpine, DIAC, RCI banque, etc. - l’annonce par Renault de la création de deux filiales l’une qui regrouperait les motorisations thermiques et hybrides, l’autre les véhicules électriques oblige à revoir son statut comme constructeur automobile.
Alors qu’il est largement évoqué, à ce stade, le terme de scission est réfuté par les organes de communication du groupe. Vieille technique ! En effet, comment critiquer ce qui, officiellement n’existe pas ? Ce déni peut s’expliquer par le fait que les actionnaires sont maintenus à l’écart de ce qui s’apparente à un démantèlement de l’Entreprise...
Les actionnaires de la société scindée doivent voter la scission en assemblée générale extraordinaire, sur la base d’un projet de scission et d’un rapport d’un commissaire à la scission. Le schéma selon lequel s’effectuera la scission (voir partie 2) est défini par le projet de scission. C’est également l’assemblée de la société scindée qui adopte les statuts des sociétés bénéficiaires, si elles sont créées à l’occasion de la scission. (Art L.236-16 et L.236-17
Qu'est-ce qu'une scission d'entreprise ?
C’est une opération par laquelle les actionnaires d'une société décident de séparer leurs branches d'activité en sociétés distinctes. Les différentes divisions créées par la scission, ou bien vont constituer des sociétés nouvelles indépendantes, ou bien elles peuvent également être fusionnées à une société préexistante.
Un fait est sûr, l’Alliance a vécu. Un signe ne trompe pas. Il y a peu, tout en réfutant l’hégémonie, plus que supposée, de Nissan sur son partenaire nous aurions eu un discours lénifiant sur une union supposée exemplaire qui se délite jour après jour. Cette réorganisation ne se fait pas dans le cadre de l’Alliance. Au contraire elle est synonyme de rupture. Dans une relation apaisée les deux partenaires de L’Alliance auraient trouvé « un gentlemen agreement » avant de faire appel à la bourse.
Si dans le cas du véhicule électrique le but avoué est de mieux valoriser la filiale ainsi crée, pour la division des moteurs thermiques l’objectif est tout autre. Ce qui nous est proposé n’est ni plus ni moins qu’une ouverture du capital de Renault. Qui laisse entrevoir un éclatement de ce qui fut le premier constructeur européen
Une scission est l'opération de réorganisation d'une entreprise qui consiste à la fractionner, généralement en plusieurs nouvelles entreprises. Il s'agit principalement d'une technique de désinvestissement dans laquelle une ou plusieurs filiales d’une entreprise cotée sur le marché boursier sont séparées de l’entreprise mère pour devenir une entité indépendante qui sera par la suite elle-même cotée sur le marché boursier bien qu’elle appartienne, au moins au début, aux actionnaires de l'entreprise d’origine.
Le propos est peut-être exagéré, il n’est pas irrationnel
D’ores et déjà Renault officialise sa volonté de se délester de sa partie thermique, en ne conservant, selon la presse, que 40% du capital de cette dernière. Parmi les noms cités, comme partenaire, le groupe automobile chinois Geely. L’arrimage de l’européen à l’asiatique se confirme de plus en plus. Il y a quelques mois après avoir dissout sa coentreprise avec le groupe chinois Dongfeng Motors Group, Renault a choisi Geely pour remonter sa part de marché en Asie et surtout en Chine où elle est proche du zéro pointé. D’autre part Renault va produire en Corée des véhicules sur plate-forme de la Volvo XC40, toujours avec Geely, propriétaire du Suédois.
A ce stade c’est une OPA, amicale, peut-être, mais qui traduit un affaiblissement dont nous savons pertinemment que l’issue certaine est la perte d’autonomie du plus faible. Ce qui reste du groupe de Billancourt joue sa survie, à la roulette russe (sic) via cette alliance avec son concurrent chinois.
Ce processus ne peut se faire qu’avec l’aval de l’Etat premier actionnaire de Renault. La présentation qui nous est faite conduit à nous interroger sur les liens entre Renault et la Nation. Ce concept pouvait paraître suranné, il y a peu. La mondialisation dans laquelle baigne une Europe du marché, montre régulièrement ses limites et a contrario, qu’un Etat ne doit pas se contenter de ses domaines régaliens. Pour répondre à la demande croissante en matière d’éducation, de santé, de sécurité, les finances publiques doivent compter sur les ressources et donc les emplois apportés par une industrie forte.
Pour reprendre ce qui a déjà été écrit en d’autres lieux, l’ex-Régie doit se diversifier dans des technologies qu’elle a négligées. Le renouveau est dans un projet global. Ce dernier doit inclure des secteurs d’activités délaissés par Renault et qui font défaut au pays. Le transport ne se limite pas à la voiture individuelle. La balance commerciale y gagnerait si la production de poids lourds, de bus voire de tracteurs revenait dans le giron du constructeur hexagonal. Une diversification est s’autant plus indispensable que le tout électrique est synonyme de perte d’emplois. Aujourd’hui les effectifs selon des sources du constructeur en France, sont de l’ordre de 30 000, à périmètre identique, ils chuteraient à 10 000.
Utopie ? Alors Renault n’est pas en reste quand dans sa réponse à l’actionnaire (AG de 2022) elle poursuit :
« Renault Group a fait le choix stratégique d’ancrer la production des principaux composants de la chaîne de la valeur de la mobilité électrique en France, ce qui illustre sa volonté de développer des activités de haute technologie sur des marchés à fort potentiel et de se positionner comme le leader de la voiture électrique en Europe »
Tous responsables ?
.Il faut bien admettre que les salariés pour une grande partie d’entre eux étaient indifférents à la stratégie suivie. Est-ce la raison pour laquelle les organisations syndicales sont restées dans un rôle convenu ? L’impuissance des organisations syndicales à porter la contradiction sur la politique de l’Entreprise au-delà des incantations et postures laissent le champ libre au discours patronal. Les organisations syndicales avaient-elles la volonté et la capacité de se confronter pour s’opposer à la politique initiée par C Ghosn poursuivie par son successeur ? Sont-elles armées pour cela ? Les syndicats sont devenus des « machines électorales, instrumentalisés par une Direction dont le logiciel « relations avec les partenaires sociaux » est resté bloqué sur un certain jour de novembre 1989.
Si la confrontation n’a pas lieu, si la puissance publique et ses représentants la refusent et si les organisations syndicales ne prennent pas leurs responsabilités, que restera-t-il de Renault, sinon une banale sous-marque d’une holding internationale ?
Au-delà du sauvetage d’une entreprise emblématique, il serait temps que la France s’engage dans une véritable politique industrielle.
Boulogne Billancourt octobre 2022