Coronavirus. Plus grave qu'une crise sanitaire : une crise de confiance

Si l’on veut s’imaginer ce que serait une société sans confiance, il suffit de regarder un film post-apocalyptique. Un épisode de la série Walking-Dead se prête assez bien pour se représenter les choses : tout inconnu est une menace potentielle.

À l’inverse, notre société. Et si celle-ci tient, c’est par la confiance. On aurait tort de sous-estimer son impact. Iriez-vous acheter une baguette si vous aviez une défiance envers le boulanger et par-extension vis-à-vis du système sanitaire ?

Il peut exister un esprit critique ou/et soupçonneux ici et là à certains endroits mais sa somme ne peut dépasser la confiance. Par-exemple, on peut ne pas être très vaccins. Ou/et être du genre à attendre le dernier moment pour aller chez le médecin. Mais en cas d’accident grave, c’est à priori sans hésiter que vous iriez à l’hôpital vous soigner. Vous restez méfiant mais pas suffisamment pour décider d’une voie alternative.

Les premiers symptômes d'une crise de confiance

Que se passerait-il si la méfiance générale faisait basculer la balance ? La réponse est difficile à donner mais on peut trouver des éléments de réponse dans l’attitude des théoriciens du complot et de la conspiration, le mouvement survivaliste etc.

Le mouvement des gilets jaunes est à cet égard aussi riche en enseignements. Surtout après le début du mouvement après le discours annonçant des « mesures d’apaisements ». Des critiques ont été faites sur la nature de la réponse mais également une remise en cause de la parole donnée. La suite est connue : le mouvement a continué comme si de rien n’était.

Cette confiance était déjà fragilisée avec les critiques de plus en plus importantes vis-à-vis de la mondialisation et des institutions européennes. Aujourd’hui, elle est un peu plus abîmée avec la crise sanitaire liée à l’épidémie du coronavirus. La suite logique est une défiance inouïe. Et les réactions à ce sentiment diffèrent selon la nature des protagonistes et la nature de leurs relations.

• Défiance envers l’état : Les hôpitaux réclament toujours des moyens auprès de l’état mais fautes de réponses s’organisent, prennent des initiatives comme si l’autorité étatique n’existait plus. D’une certaine manière, cette émancipation pragmatique est salutaire mais d’autres cas, cette défiance peut être dangereuses.
  
• Défiance entre les individus : distanciation sociale. Il est évidemment souhaitable que celle-ci soit respectée. Néanmoins nos interactions sociales deviennent suspectes. Je dois protéger en ne touchant pas les autres mais je dois aussi me protéger en ne touchant pas les autres. Et avec cette dernière injonction s’insinue l’idée que tout individu est potentiellement dangereux pour moi. Ce dernier point va jusqu’à susciter des réactions honteuses où des infirmières parce que travaillant en contact avec des malades reçoivent des injonctions à déménager de leur part de certains de leurs voisins.

L’affaire ne s’arrête pas là. Prenons le cas de ces ruptures de stock de papiers toilettes et de pâtes au sein des supermarchés. Certains y ont vu un comportement irrationnel de la part de la population. Absolument pas. Le sujet a été étudié. Je vous envoie à sa lecture. Mais il est question aussi de crise de confiance envers la capacité des autorités à assurer la mise à disposition de ces deux biens.

Quelle dernière escale après une défiance irréversible ?

Difficile d’imaginer l’ensemble des conséquences si ce lien qui fait corps à toute société venait à disparaître.

Il y a cependant une légende biblique qui laisse entrevoir une détestable perspective : la légende de la tour de Babel : « Les hommes dans leur ambition avaient entrepris la construction d’une tour. Celle-ci serait si haute qu’elle leur permettrait d’atteindre les cieux. Dieu pour les détourner de ce dessein brouille leur langue -qui était alors unique- afin qu’ils ne se comprennent plus et les dispersa sur toute la terre.

Si nous pouvons communiquer mais que la confiance cesse alors c’est la fin de toute coopération. La société telle que nous la connaissons cesserait alors d’exister et ferait place à une structure sociale qui aurait pour particularité de ne plus pouvoir avancer.

Autre article lié au sujet : Coronavirus ou notre aube de Ragnarök.

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