
Les questions "d'identité de genre" ont aujourd’hui pris toute la place dans les débats féministes. De toute l'histoire de l'humanité, aucune lutte n'a progressé aussi rapidement, avec autant de moyens et de visibilité que le mouvement “queer”, ou transactivisme, qui porte depuis une dizaine d’années des revendications au nom des personnes transgenres.
Que l’on soit écologiste, antispéciste ou simple militant-e de gauche, personne n'y échappe. Cependant le milieu militant le plus touché par ce sujet est bien la lutte pour les droits des femmes, au point d’invisibiliser ces dernières et d’exclure des militantes avec violence, et ce, dans le but d’inclure des hommes s’identifiant comme trans.
C'est ce constat que nous souhaitons relayer, nous, militantes et activistes féministes, survivantes de la prostitution et du porno, de viol, femmes en situation de handicap, migrantes et réfugiées, femmes apostates, victimes des dictatures religieuses, victimes d’excision, femmes lesbiennes, bisexuelles, femmes souffrant de dysphorie, hommes transgenres et aussi femmes en détransition... mais surtout femmes harcelées, violentées, lynchées, humiliées, censurées, menacées de mort et aujourd’hui exclues des milieux féministes pour nos idées, nos histoires et nos vécus.
Le collectif « Nous Toutes », créé en 2018 en surfant sur la vague #metoo, s’est imposé avec des positionnements problématiques dès ses débuts. Nous avons constaté la rupture du collectif avec les valeurs féministes historiques dès les premières marches, lorsque Caroline de Haas et ses alliées ont accepté de laisser défiler en première ligne des hommes travestis issus d’organisations luttant ouvertement pour la décriminalisation du proxénétisme (Strass et autres organisations rassemblées sous le symbole du parapluie rouge). Nous pourrions également évoquer le défilé du 10 novembre 2019 aux côtés d’associations islamistes, d’entrepreneurs identitaires et d’imams intégristes (Rachid Eljay) qui expliquent que les femmes sans voile n’ont pas d’honneur et qu’il est possible de disposer de leurs corps.
« Nous Toutes » prétend encore à ce jour lutter contre les violences sexistes et sexuelles. Cependant, nous constatons leur silence assourdissant lorsque les viols et les agressions sont commises par des personnes transgenres (agressions de femmes lors du 7 mars 2021 place de la République), lorsque les victimes sont des survivantes du système prostitutionnel (8 mars 2020, deux militantes du collectif CAPP dont une survivante de la prostitution tabassées à la manifestation Parisienne), lorsque les victimes sont lesbiennes et refusent “les pénis de femmes” (agressions des femmes du collectif Résistance Lesbienne) ou encore lorsque les victimes de cyber harcèlement sont des féministes radicales. Pour faire le lien entre toutes ces agressions, nous pourrions résumer en disant que “Nous Toutes” tolère la violence lorsque les victimes sont des femmes qui expriment une critique de cette idéologie qui s’impose partout comme un dogme, l’idéologie de genre.
Mais une étape supplémentaire a été franchie lorsque, le 5 octobre dernier, « Nous Toutes » publie sur sa page Facebook un visuel déclarant vouloir exclure les femmes appelées “TERF” de la marche organisée le 21 novembre à Paris.
“TERF” est un acronyme anglophone dégradant, diffamatoire et insultant, incitant à la haine et à la violence à l’encontre de femmes. En effet, les tweets, collages et tags incitant à « buter, tuer ou brûler une TERF » sont devenus tristement banals.


Lors de la "marche lesbienne" en avril 2021, un homme avec un t-shirt qui appelle à tuer les "terfs".
Cet acronyme (“Trans Exclusionary Radical Feminist”) accuse les féministes qui se réfèrent au sexe, et non au ressenti subjectif des individus, dans leur analyse des rapports de domination des hommes sur les femmes, d’exclure les personnes trans du féminisme. Ainsi, lorsqu’une féministe dit qu’un homme ne peut pas être une femme, ou encore que les lesbiennes n’aiment pas les pénis, celle-ci est immédiatement jugée « transphobe », menacée et ostracisée.
Une grande majorité de femmes ne peut donc plus lutter pour leurs droits pour la simple raison qu’il est désormais tabou d’affirmer que le genre est une hiérarchie construite socialement à travers des injonctions spécifiques à chaque sexe, imposées aux individus depuis leur naissance. Il est même devenu dangereux de refuser de définir le fait d’être une femme ou un homme selon notre adhésion ou non à des stéréotypes sexistes. Ce qui était encore il y a peu la base de toute théorie féministe est devenue une hérésie justifiant pour certain.e.s une condamnation au bûcher.
De la même manière, il est désormais interdit aux femmes de refuser des individus mâles dans leurs espaces et leurs luttes sur leur simple déclaration qu’ils « se sentent femme ». Elles sont, au contraire, obligées de céder à toutes leurs revendications, les personnes trans devant être considérées comme davantage discriminées que les femmes dans la société.
Les féministes visées par l’acronyme “TERF” ne nient pas l’existence des personnes trans et ne luttent pas contre leurs droits. Nous comprenons le profond malaise qui touche les personnes qui ne se reconnaissent pas dans les stéréotypes sexistes assignés à leur sexe. Nous pensons cependant que la solution réside dans l’abolition de ces normes oppressives, et non dans leur légitimation en tant qu’identité profonde, innée et indiscutable.

Au contraire des organisations comme « Nous Toutes », nous luttons avec et pour les « hommes trans » qui subissent le sexisme depuis leur naissance étant donné qu’elles sont nées filles.
Nous opérons également une distinction rationnelle entre la lutte pour les droits des femmes, qui représentent un peu plus de la moitié de l’humanité, et celle pour les droits des personnes trans. D’une part, parce-qu’il s’agit de problématiques différentes et d’autre part, parce-que nous constatons que la seconde, étant donné qu’elle concerne des hommes, prend fatalement le pas sur la première.
Nous souhaitons aujourd’hui partager notre inquiétude face à l’influence des organisations telles que « Nous Toutes » ou l’entreprise de Caroline de Haas “Egae” qui imposent à des milliers de femmes, sous peine d’être accusées de « transphobie », la définition « est une femme quiconque se “sent femme’’ », refusant tout questionnement sur l’origine de ce ressenti et les conséquences que cette définition implique pour les droits des femmes.
Nous osons affirmer, malgré les représailles que nous subissons depuis plusieurs années et qui ne cessent de s’aggraver, qu’une femme est une personne qui a un corps d’humaine adulte femelle avec n’importe quelle personnalité et non “une personnalité féminine” avec n’importe quel corps. Que toute autre définition relève du sexisme.
Nous alertons sur la recrudescence de violences physiques et verbales lors d’événements ou sur les réseaux sociaux, dont des milliers de femmes sont victimes en raison de leur désaccord avec l’idéologie queer. Nous dénonçons enfin la complicité de « Nous Toutes » dans cette récente mise en place d’un climat de terreur et de répression des libertés d’opinion et d’expression au sein du féminisme.
Il nous est devenu impossible de parler des problèmes sexo-spécifiques sans être cataloguées de “transphobes”. Il nous est devenu impossible de parler de précarité menstruelle, de violences gynécologiques et obstétricales, d’excision, de mariage forcé, de droit à l’avortement, de néonaticide fondé sur le sexe, de déportation et de la traite des êtres humains à des fins d’exploitation sexuelle, de clitoris ou encore de cancer du sein, et ce, au sein même des mouvements censés lutter pour rendre visible ces violences machistes et les condamner. Cette situation absurde doit cesser.
Nous ne nous laisserons pas exclure de nos luttes.
Signataires :
Rosen Hicher, survivante de la prostitution, initiatrice de la marche mondiale des survivantes de la prostitution
Daria Khovanka, survivante de la prostitution, membre du collectif CAPP
Joana Vrillot, Fondatrice et coordinatrice du collectif CAPP
Marguerite Stern, créatrice des collages contre les féminicides
Dora Moutot, créatrice du compte @tasjoui
Marie-Jo Bonnet, Historienne, écrivaine
Alexine Solis, Survivante abolitionniste
Ibtisamme Betty Lachgar, psychologue clinicienne, militante féministe CAPP
Brigitte Bianco, Autrice
Francine Sporenda , Responsable rédactionnelle du site Révolution féministe
Valérie Pelletier, survivante de la prostitution et militante féministe
Sophie ROBERT, réalisatrice et productrice de documentaires
Emy.G, vidéaste du compte @antastesia
Dr. Ingeborg Kraus, Psychotraumatologue
Collectif de colleuses L'AMAZONE PARIS
Lady. K, peintresse
Esther Cannard - enseignante
Arielle Constantieux, Barista
Laure Greene, employée
Anna Martin, Responsable d'exploitation
Anna Le Boucher, survivante et abolitionniste
Collectif de colleuses l'AMAZONE Haute-savoie
Flo Marandet, enseignante
Anissia Docaigne-Makhroff, juriste et activiste féministe
Pauline Makoveitchoux, photographe
Collectif de colleuses l’AMAZONE Arlysère
Victoriane Patraud, Graphiste
Sarah Mounzouni, graphiste
Marfa Docaigne-Makhroff, consultante
Audrey Arendt, philosophe
Mélanie Telle, étudiante en conservation du patrimoine
Maureen KAKOU, poétesse
Manon Didier, chargée de prévention santé
Manon Lassalaz, enseignante spécialisée et détentrice d'un M2 Gender studies
Noémie Huart - animatrice en éducation permanente féministe. Militante féministe
Sofia Recham, Agent commercial immobilier
Ana Lebón, Assistante gériatrique
Laurie Briand, Etudiante apprentie conductrice de travaux
Catalina Roth, Réceptionniste
Clara Delattre, étudiante
Anne Palmowski, journaliste et réalisatrice
Sandrine Beydon, déléguée pharmaceutique
Camille Thibault, étudiante
Graziella Florimond Pouvait, enseignante, écrivaine et afro féministe
Lucie Calmels, commerciale
Maeve Laveau Northam, militante féministe lesbienne radicale
Carole Barthès, graphiste
Raquel Oliveira Coelho - Animatrice
Magali Salvadori, gestionnaire de paie
Aurore Benard, militante féministe, LGBT et Antispéciste
Gloria Martinez, Pâtissière
Alice Gonnet, directrice d’un ALSH
Déborah D’Imperio, directrice artistique
Andreea Nita, étudiante
Kim Jacques, technicienne de support
Julie de Frondeville, peintresse
Nassira Izmar, étudiante
Noellie Barailles, professeur de plongée
Julia Guerrois, traductrice
Melissa Roche, Autrice
Ophélie Grange, ouvrière agricole
Clara Noizet, enseignante
Laurence Martin, retraitée, feministe universaliste radicale
Aurea Tellier, étudiante
Camille Girard, militante lesbienne radicale, alliée Detrans et FTM
Sidwell Rigade, Ingénieur en biologie
Laure Zajac Fouissac, Hôtesse de l’air
Cassandra Bidois, étudiante
Pauline Lisi, étudiante
Milène Rault, étudiante
Anabelle Debiève, juriste & CM
Ana Minski, militante ecoféministe
Laetitia Wider, journaliste
Lucie Dorat, Enseignante
Sandra Besson, entrepreneuse
Anaïs Martinez, Artiste visuelle
Jeanne Gut, vendeuse
Khady Toure, Assistante sociale
Zélie Marie, Psychomotricienne
Rosalie Amara, chargée RH
Aurélie Doriani, Ingénieure en informatique
Lyse Nicoud, chirurgienne-dentiste
Marion Av, militante féministe
Pauline Amélie, photographe
Hisaé Yerlikaya, militante et Juriste
Anaïs Lenal, artiste féministe et militante
Pauline Maulmont, étudiante et activiste féministe
Charline Beauvais, militante féministe
Jessica Moreau, libraire
Anna Wolska, militante féministe
Valérie Bardin, Comptable
Mélissa Parmentier, en reconversion professionnelle
Liv Simonet, étudiante en master d’histoire médiévale
M. Minier, étudiante en génie de l’environnement
Yasmina Mounir, ingénieure
Rendu Emeline, Étudiante
Lea Dubois, étudiante
Aza Ninarova, avocate
Silas Lang, Sans emploi
Leïla Rojas, assistante psychiatre